Le Temps

Pamela Anderson, anatomie d’un coeur brisé

C’est le documentai­re Netflix qui agite la Toile. «Pamela: A Love Story» voit la star des années 1990 donner sa version de son histoire. Un portrait intime d’une romantique malmenée

- VIRGINIE NUSSBAUM @Virginie_nb

C’est le genre de célébrités qu’on avait un peu oubliées, (dé)laissées dans un tiroir de la pop culture labellisé «1990». Mais Pamela Anderson est de retour, et on ne peut l’ignorer tant ces derniers jours son nom a envahi les réseaux – ceux qui n’existaient pas lors de son ascension au rang de superstar suscitant le plus de fantasmes dans le monde. Un come-back subi, d’abord, lorsque sa vie était faite fiction. Il y a un an, la série Pam & Tommy (disponible sur Disney+ en Suisse) revenait sur le mariage de Pamela Anderson avec le rockeur Tommy Lee, marqué par le scandale de leur sextape volée puis diffusée en masse grâce aux balbutieme­nts d’internet. Une mise en scène aussi trash et bruyante que l’époque, au mauvais goût assumé – mais pas à celui de l’intéressée, accusant la série d’avoir «retourné le couteau dans la plaie».

Il était temps pour Pamela Anderson d’en saisir le manche, à la mode prince Harry: une autobiogra­phie (Love, Pamela) doublée d’un documentai­re Netflix. Un moyen privilégié ces dernières années par les idoles féminines malmenées par le star-system, afin de reprendre le contrôle du narratif – Monica Lewinsky ou Britney Spears avant elle.

Des montagnes de VHS

Voici donc Pamela: A Love Story. Un film de près de 2h dans lequel Pamela Anderson, 55 ans, donne sa version de l’histoire – qu’elle a minutieuse­ment documentée et ce, dès le début, dans des journaux intimes. Des extraits choisis, au style étonnammen­t sensible, ainsi que des vidéos home made constituen­t la colonne vertébrale du récit.

Et des VHS, il y en a des montagnes dans sa maison de Ladysmith, sur l’île de Vancouver. C’est là, dans le village de son enfance, que Pamela Anderson est revenue s’installer durant le confinemen­t. Un paysage entre forêts et mouettes, loin des plages de Californie sur lesquelles elle courait au ralenti il y a 30 ans. «C’est pas du nu, j’espère!» s’amuse Pamela, t-shirt blanc et sans maquillage, en glissant une cassette dans le lecteur. On la découvre étonnammen­t rieuse et candide, à la fois amusée et déconcerté­e au moment de rembobiner sa vie.

Qui commence par une enfance chahutée, entre une mère serveuse et un père joueur de poker alcoolique. Des années marquées par l’instabilit­é et les abus, d’une babysitter d’abord avant un viol subi à l’âge de 12 ans. Ces traumatism­es font de Pamela Anderson une adolescent­e timide, mal dans sa peau.

Puis vient le basculemen­t en 1989 lorsque, repérée par les caméras d’un match de football, la Canadienne devient égérie d’une marque de bière avant d’être contactée par le magazine Playboy. Après un premier shooting, qui la voit «reprendre le contrôle de sa sexualité», Pamela Anderson

se teint en blonde et déménage à Los Angeles. Cette Norma Jean devenue Marilyn rêve de cinéma.

Sauveteuse plantureus­e dans l’immense succès Alerte à Malibu, C. J. Parker sera finalement son premier et seul vrai rôle, la sacrant déesse érotique… à tout jamais. Un symbole porteur et une image plus collante que le sable de Santa Monica: jusque sur les plateaux de talk-shows, on ne lui parlera plus que de sa poitrine.

Six mariages

Le film explore la frontière fine entre émancipati­on et misogynie, mais plus encore la relation de Pamela Anderson avec Tommy Lee, batteur du groupe Mötley Crüe rencontré en 1994. Et épousé en maillot de bain à Cancun après quatre jours de relation. Un couple passionnel et toxique qui mettra au monde deux garçons – l’aîné, Brandon Thomas Lee, produit le film.

Comme pour l’exorciser, ce dernier revient longuement sur le vol, dans leur garage, de la fameuse sextape, en réalité montage de souvenirs de vacances en tenues légères. Des images qui rapportero­nt 77 millions de dollars aux distribute­urs mais dont Pamela et Tommy ne verront jamais la couleur. Le documentai­re attribue à cet épisode la fin du couple et de la carrière de la Canadienne, qui enchaînera dès lors les apparition­s de type séries B.

Frustrant lorsqu’il ne fait qu’effleurer les autres facettes de la star, son engagement pour la cause animale comme son amitié pour Julian Assange, Pamela: A Love Story esquisse un portrait intime, psychologi­que de son héroïne présentée comme une romantique invétérée – son sixième mariage s’est terminé durant le tournage. Un coeur blessé, mais pas geignard. «Je ne suis pas une victime, je me suis mise dans des situations folles et j’ai survécu», conclut Pamela Anderson. Qui semble chercher à travers ce film, captivant, moins une raison de briller que de donner du sens à son existence. On se prend à lui souhaiter un happy ending.■ «Pamela: A Love Story», 1h52, disponible sur Netflix.

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