Le rachat du gérant zurichois GAM tourne au conflit
En difficulté depuis 2018, la société zurichoise a accepté d’être reprise par le britannique Liontrust. Mais un groupe d’investisseurs conteste l’accord donné par la Commission des OPA
L’affaire semblait bouclée. Elle ne l’est pas. En difficulté depuis 2018, la société de gestion GAM a fait l’objet d’une offre de reprise par le gérant britannique Liontrust il y a une semaine. La société zurichoise a recommandé à ses actionnaires d’accepter ce rachat même si le prix proposé est en dessous du cours affiché (67,23 centimes, contre 80 centimes). Ensemble, ces deux entités géreraient 110 milliards de francs.
La proposition a immédiatement suscité les critiques de la part d’un groupe d’investisseurs. Réunissant 8,4% du capital de GAM, NewGAMe, contrôlé par le milliardaire français Xavier Niel, et le gérant de fortune genevois Bruellan ont estimé que l’offre ne reflétait pas le potentiel d’un redressement réussi de GAM.
Une condition de rachat considérée comme «injuste»
Ces derniers avaient fait une proposition alternative. Mais lors d’une conférence téléphonique jeudi dernier, Peter Sanderson, directeur général de GAM, expliquait qu’il n’y avait pas eu de contact avec NewGAMe et Bruellan.
Ce mercredi, ce même groupe d’investisseurs a décidé de contester la décision de la Commission des OPA d’accepter l’offre d’échange de Liontrust sur GAM. La raison de leur opposition? Ils souhaitent que soit supprimée une condition qu’ils considèrent comme «injuste pour les actionnaires de GAM, favorisant inutilement l’offrant et contraire aux principes du droit suisse des offres publiques d’acquisition». Cette clause permet à Liontrust de retirer son offre si une sortie proposée de l’activité de services de gestion de fonds de GAM n’est pas réalisée.
NewGAMe et Bruellan ont estimé que l’offre de Liontrust ne reflétait pas le potentiel d’un redressement réussi de GAM
Pour le groupe, cette condition «permettrait à Liontrust de profiter des avantages d’une vente potentielle sans subir aucune des conséquences d’une cession ratée, que les actionnaires de GAM supporteraient intégralement». D’où sa demande à la Commission des OPA de supprimer cette condition. Il s’inquiète également du calendrier de la reprise: «Les actionnaires de GAM auraient jusqu’au 11 août 2023 pour accepter l’offre de Liontrust, mais pourraient ne pas recevoir les actions de Liontrust offertes en échange avant la fin de 2023 ou au-delà.» Ils réclament enfin que «Liontrust inclue l’activité de trading dans GAM dans ses documents d’offre afin que les actionnaires puissent évaluer pleinement si l’offre est conforme à l’exigence de prix minimum suisse ainsi qu’aux règles concernant les alternatives en numéraire.»
La semaine dernière, GAM a publié une perte de 290 millions de francs pour l’exercice 2022. Ses avoirs sous gestion ont encore fondu, même si c’est surtout le fait des turbulences sur les marchés que des retraits de fonds. Ces derniers sont les plus faibles depuis que sa crise a éclaté à l’été 2018. Elle avait alors suspendu un gérant vedette et gelé plusieurs fonds après avoir découvert des pratiques douteuses. Tim Haywood était lié à la société Greensill, qui a fait faillite début 2021 et provoqué des turbulences chez Credit Suisse. Plus grande société de gestion indépendante de Suisse, GAM n’a pas réussi à se remettre totalement de cette affaire, peinant toujours à convaincre les clients de rester. Sa masse sous gestion est passée de 150 milliards il y a cinq ans à 23,2 milliards à fin 2022. ■