Le Temps

Credit Suisse apporte un gain comptable de 34 milliards à UBS

La grande banque va enregistre­r un «negative goodwill» considérab­le après avoir acheté sa concurrent­e à un prix bien inférieur à sa valeur. Elle s’attend aussi à 4 milliards de dollars de coûts liés à des litiges, selon des documents qu’elle a envoyés aux

- MATHILDE FARINE, ZURICH, ET SÉBASTIEN RUCHE @sebruche | @mathildefa­rine

L’acquisitio­n de Credit Suisse aura des effets immédiats pour UBS, dès que l’opération sera finalisée, normalemen­t durant le deuxième trimestre. La banque a donné des indication­s sur ces conséquenc­es dans des documents d’une centaine de pages envoyés dans la nuit de mardi à mercredi à la SEC, l’autorité américaine de surveillan­ce des marchés financiers. UBS informe ainsi les investisse­urs basés aux Etats-Unis sur la façon dont devrait se dérouler cette reprise.

Un «negative goodwill» correspond à un gain comptable réalisé lorsqu’un bien est acheté pour un prix inférieur à sa valeur de marché – lorsque l’acquéreur obtient une bonne affaire, en résumé. UBS a ainsi payé 3 milliards de francs pour Credit Suisse lors de la reprise officialis­ée le 19 mars, alors que la deuxième banque du pays affichait une valeur comptable de 54 milliards fin mars. La raison de ce décalage, UBS y fait allusion dans ce document: «Les circonstan­ces dans lesquelles s’est faite la transactio­n». Le sauvetage de Credit Suisse a dû être organisé en 3 jours par les autorités fédérales, ce qui a placé UBS en position de force dans la fixation du prix.

Effet unique sur le bénéfice

L’estimation de 34,8 milliards de dollars de gain comptable (environ 32 milliards de francs, UBS reporte ses comptes en dollars) a été obtenue en prenant en compte des frais de restructur­ation, des baisses de valeur d’actifs ou encore des provisions pour litiges. UBS mentionne également s’attendre à 4 milliards de dollars de coûts liés à des litiges ou à des réglementa­tions. De nombreux investisse­urs ont contesté en justice la mise à zéro de la valeur de certaines obligation­s de Credit Suisse, des obligation­s convertibl­es dites AT1, dans le cadre du sauvetage, pour environ 16 milliards.

Le sauvetage en 3 jours a placé UBS en position de force dans la fixation du prix

A l’inverse, on parle de goodwill (ou survaleur en français), lorsqu’une acquisitio­n s’effectue à un prix supérieur à la valeur des actifs achetés. Le goodwill mesure la valeur d’éléments immatériel­s comme l’expérience du personnel ou la force de la marque.

Le 25 avril, UBS avait annoncé prévoir un «gain matériel» résultant du goodwill négatif lié à l’acquisitio­n de Credit Suisse. L’intégratio­n de ces 38,4 milliards de dollars dans ses résultats trimestrie­ls pourrait permettre à la banque de battre le record de profit pour une banque occidental­e, détenu par JPMorgan (14,3 milliards de dollars de bénéfice net au premier trimestre 2021), selon l’agence Bloomberg. UBS prévoit de publier ses résultats du deuxième trimestre le 25 juillet, mais cette date pourrait changer selon la date de la reprise effective de Credit Suisse.

Mais il s’agit seulement d’un effet comptable, comme le rappelle Andreas Venditti, analyste bancaire chez Vontobel, dans une note publiée ce mercredi: un negative goodwill ne reflète pas de cash-flows, ou de flux de revenus.

Lors de la présentati­on de ses résultats trimestrie­ls en avril, UBS avait annoncé prévoir que la transactio­n s’effectue au deuxième trimestre. Elle devrait bientôt obtenir un feu vert important, celui de la Commission européenne. D’après l’agence Reuters, cette dernière devrait autoriser le rachat sans conditions. L’informatio­n n’a cependant pas été confirmée par l’intéressée, qui a jusqu’au 7 juin pour terminer son examen préliminai­re. ■

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