Le Temps

Régulation de l’IA: vers un choc entre les Etats-Unis et l’Europe

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

Un accord mondial pour une régulation de l’intelligen­ce artificiel­le (IA) est-il possible? A priori, c’est l’impression donnée ces derniers jours lors du sommet du G7 qui s’est tenu à Hiroshima. Les représenta­nts de l’Allemagne, du Canada, des Etats-Unis, de la France, de l’Italie, du Japon, du Royaume-Uni et de l’Union européenne se sont ainsi mis d’accord pour appeler à la formulatio­n de garde-fous autour du développem­ent ultra-rapide de l’IA.

Ces déclaratio­ns suivent l’accord de base trouvé il y a un mois par les ministres spécialisé­s dans le numérique qui préparaien­t ce sommet. On pouvait ainsi lire dans ce texte la volonté que «les politiques et les réglementa­tions en matière d’IA soient centrées sur l’être humain et fondées sur neuf valeurs démocratiq­ues». L’accord prévoyait également que la régulation soit «fondée sur les risques», tout en permettant de développer une IA profitant à tous.

Il y a bien sûr du positif derrière ces mots. D’abord, le fait que le G7 se soit emparé de ce dossier si rapidement, quelques mois seulement après l’émergence de ChatGPT. Ensuite, les principes semblent en adéquation avec le projet européen de réglementa­tion, le plus complet au niveau mondial.

Mais attention: il ne s’agit pour l’heure que de vagues intentions, et l’on est très loin d’une régulation mondiale. On voit mal la Chine, qui ne fait pas partie du G7, se plier à des règles internatio­nales, du moins au niveau domestique, alors qu’elle édicte ses propres lois. De plus, il semble pour l’heure irréaliste que les Etats-Unis, qui abritent tant de géants de la tech, alignent leur législatio­n future (et hypothétiq­ue) sur les règlements européens. Les intérêts commerciau­x et géopolitiq­ues sont si importants dans le domaine de l’IA que tout accord mondial approfondi – qui nous semble pourtant si important – paraît encore illusoire.

A ce titre, il est intéressan­t de constater que Google n’a récemment pas ouvert son système d’IA, appelé «Bard», en Europe. Le géant affirme qu’il doit d’abord examiner si Bard respecte les règles actuelleme­nt en vigueur dans l’Union européenne. Mais c’est peut-être aussi un moyen de faire pression sur l’Europe pour lui montrer que sa régulation freine l’innovation…

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