Modifier ses messages sur l’application WhatsApp? Attention aux risques cachés
Il sera bientôt possible d’éditer des messages quinze minutes après leur envoi. Une bonne nouvelle qui risque cependant de favoriser le cyberharcèlement. Voici quelques conseils pratiques
C’est en apparence une nouvelle fonction innocente et bien pratique. Mais en réalité, la future possibilité de modifier des messages sur WhatsApp pourrait poser des problèmes, notamment dans les cas d’abus en ligne. Les utilisateurs de cette messagerie, comme de toutes celles, concurrentes, qui offrent la même option, feraient bien de se montrer prudents.
WhatsApp a annoncé dans la nuit de lundi à mardi qu’il serait bientôt possible, ces prochaines semaines, d’éditer des messages. «Vous avez fait une erreur? Vous avez changé d’avis? Pas de problème: vous pouvez désormais modifier les messages que vous avez envoyés», affirme la société qui appartient, comme Instagram et Facebook, à Meta. WhatsApp précise sur son blog qu’il suffira d’appuyer longuement sur un message et de sélectionner «Modifier» dans le menu dans les quinze minutes qui suivent son envoi.
Les plus de 2 milliards d’utilisateurs de ce service n’auront ainsi plus besoin d’effacer un message après son envoi. Les messages ainsi édités s’accompagneront de la mention «modifié», visible par l’expéditeur et le destinataire.
On l’a vu, WhatsApp a mis en place deux garde-fous pour éviter de trafiquer totalement des conversations après coup: le délai de quinze minutes et la mention «modifié». Le destinataire sait donc qu’un message a été édité, mais il ne peut pas avoir accès à la version antérieure, voire aux multiples versions antérieures. Libre à l’expéditeur de maquiller la conversation.
Apple interpellé
Ces modifications peuvent poser problème: l’expéditeur peut écrire des propos problématiques à son correspondant, puis effacer ses traces en prétendant par la suite n’avoir rien envoyé de litigieux. Ce souci avait déjà été mis en lumière en 2022, lorsque Apple avait annoncé en juin la même fonction d’édition, lancée en septembre avec la version 16 de son système iOS pour iPhone. Une avocate basée au Texas, Michelle Simpson Tuegel, avait écrit à Tim Cook, directeur d’Apple, pour l’alerter, comme l’avait rapporté le site spécialisé 9to5Mac.
L’experte en droit avait notamment écrit ceci: «En tant que défenseuse des victimes de harcèlement sexuel et d’agression sexuelle, je pense que cette nouvelle fonctionnalité – en particulier le délai important accordé pour modifier ou supprimer les messages – exposera les victimes de violence à un harcèlement et à des brimades supplémentaires, car l’auteur des faits profitera de ces outils pour envoyer des contenus préjudiciables en sachant qu’il peut détruire les preuves de son mauvais comportement.»
Michelle Simpson Tuegel avait demandé à Apple de réduire de quinze à deux minutes le temps pour éditer un message. Mais la multinationale n’avait pas donné suite et maintenu à un quart d’heure ce délai, tout comme WhatsApp, donc. A noter que WhatsApp permet de supprimer totalement un message jusqu’à soixante heures après son envoi (le destinataire étant juste notifié de la suppression). Apple a quant à lui fixé ce délai à deux minutes.
«Récoltez des preuves»
Que faire en cas de cyberharcèlement? Sur son site internet, la Prévention suisse de la criminalité (PSC), un service intercantonal, donne notamment ces conseils: «Récoltez des preuves qu’une attaque de cyberharcèlement est en cours. Faites des captures d’écran de sites internet, sauvegardez les fils de discussion dans les chats et les SMS, enregistrez les noms d’utilisateur, etc.»
De son côté, le site valaisan spécialisé ICT-VS affiche ces recommandations: «Bloquer la personne ou la dénoncer au réseau social est une idée, mais pas tout de suite! Il est nécessaire de récolter des preuves: imprimer les pages internet, enregistrer des conversations de chat, garder des traces des messages ou faire des captures d’écran de TOUT ce qui porte atteinte. […] Cela permettra de constituer une base de données primordiale pour permettre à la police de faire son travail en cas de dépôt de plainte recevable.»
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