Un parfum de Pâques en février
Plus de la moitié des écoliers suisses étaient en vacances cette semaine. Les stations de ski n’ont pas été saturées mais ont connu une forte affluence. Témoignages à Villars-sur-Ollon
«Vous n’avez pas réservé? On va vous trouver une table à l’intérieur», accueille d’une voix qui porte le tenancier du restaurant Bretaye 1808, sur les pistes de Villars-Gryon-Les Diablerets. L’affluence des 11 000 visiteurs sur le domaine skiable en moyenne par jour durant les relâches n’a rien d’oppressant, la station ayant dépassé la barre des 16 000 deux ou trois jours durant les vacances de Noël. Les commerces saluent une bonne semaine en termes de chiffres d’affaires, mais auraient «pu faire mieux».
Théo, gérant de la boutique Dätwyler au col de Bretaye, nous sort le planning des vacances de février. «Cette semaine, nous accueillons les Parisiens, les Vaudois, les Fribourgeois, les Valaisans, une partie des Jurassiens et des Zurichois, pointe-t-il. La semaine prochaine, nous aurons les Genevois, une partie des Zurichois, des Parisiens encore, des Belges et des Hollandais. Une partie des skieurs des stations les plus basses comme Les Mosses ou les stations fribourgeoises montent skier ici, faute de neige.» Tout en fartant le snowboard d’un client, il nous désigne les rayons vides des chaussures de ski en location. «Il nous manque certaines tailles adultes, on les fera monter de la boutique du village, c’est le signe d’une forte affluence. Mais honnêtement, on s’attendait à plus de monde. Ce sont les pendulaires qui montent à la journée qui font défaut», analyse-t-il.
Un air de paradis
Au sommet du Grand Chamossaire, à 2112 mètres, la réverbération du soleil sur l’or blanc donne à la vue panoramique des Alpes vaudoises un petit air de perfection.
Le plaisir pris à tailler des larges courbes dans la neige ferme ravit petits et grands. Vingt pistes sur 28 sont ouvertes, on peut encore rejoindre la station lattes au pied grâce à l’enneigement artificiel, mais les pistes de luge, elles, manquent à l’appel. «Nous avons loué à Gruyères cette année», raconte Lena, venue de Zurich avec sa famille de trois jeunes enfants. «Malheureusement, là-bas c’est tout vert. Nous montons donc à la journée pour skier ici à Villars. Il y a un peu de monde sur les pistes, mais au moins, on a de la neige», dit-elle, ravie. Aux installations, les employés pressent les skieurs de remplir les télésièges pour limiter l’attente: elle ne durera jamais plus de cinq minutes. Vestes ouvertes, têtes nues et parfois sans gants, les skieurs se dévêtent au fur et à mesure que les températures grimpent au fil de la journée, pour atteindre 10 °C sur les pistes. C’est Pâques en février. Guillaume, photographe chez Studio Patrick, véritable institution de la station qui immortalise les souvenirs de vacances depuis cinquante ans à Villars, arpente les pistes et les terrasses pour proposer ses services. «C’est une belle semaine, les retours que j’ai des familles sont très positifs. Le train pour monter à Bretaye est généralement bondé mais c’est la seule installation qui souffre de l’affluence, le reste, ça roule. Les équipes qui s’occupent des pistes font un super boulot, donc bien qu’il fasse chaud, la neige reste agréable pour skier», dépeint-il.
C’est la plus grosse semaine de l’année pour l’école suisse de ski de Villars. «On a dû limiter, et refuser du monde, ce qui ne nous arrive pas souvent», admet son directeur Marc-Henri Duc, dans son bureau sur les pistes. «Nous avons 330 élèves à faire manger tous les jours, au restaurant de Bretaye ou au Jardin des neiges, c’est ce qui nous limite. Sinon, on a 220 profs qui travaillent cette semaine, tout est rempli: c’est ce
«Le surplus journalier qu’on aurait pu avoir de la part des pendulaires de la région n’est pas optimal» SERGEI ASCHWANDEN, DIRECTEUR DE LA STATION DE VILLARS-SUR-OLLON
que l’on recherche, on est ravis.» Celui qui est aussi président de la Fondation des écoles suisses de ski livre son analyse quant à la fréquentation de la station. «On n’est jamais aussi nombreux à Villars que lorsque toutes les stations sont ouvertes. Quand il fait chaud en plaine comme cette semaine, et que les petites stations vaudoises et fribourgeoises sont fermées, ça n’incite pas les gens à monter. Les pendulaires partent du principe que la neige ne sera pas assez bonne à Villars». Selon Marc-Henri Duc, l’année est particulière, à cause des fortes chaleurs: «On a les conditions des vacances de Pâques en février!»
Le directeur de la station, Sergei Aschwanden, confirme ces impressions. «Au niveau de l’hébergement, les réservations qu’on a sont celles d’une très bonne semaine de relâches. Le surplus journalier qu’on aurait pu avoir sur les pistes, de la part des pendulaires de la région n’est pas optimal, sans doute lié aux températures élevées qu’on connaît en plaine.» Il envisage la suite de la saison de façon sereine: «On continuera à skier sans aucun problème à Bretaye (1800 mètres) et au-dessus grâce à un manteau neigeux suffisamment solide pour tenir, c’est la descente en station qui reste incertaine, s’il n’y a pas de précipitations suffisantes, il faudra peut-être songer à fermer cette dernière piste». La surconcentration des vacanciers romands tel qu’on le craignait ici sur le domaine skiable n’a pas altéré les bonnes conditions d’une semaine de sports d’hiver à la montagne. ■