Les grenouilles papas poules ont de petits testicules
Plusieurs études ont déjà montré que chez les primates, il y a un lien entre la taille des testicules des mâles et le mode de reproduction. Chez les espèces où les femelles s’accouplent avec un seul partenaire, il a été observé que les mâles ont généralement de petits testicules et produisent donc peu de spermatozoïdes. C’est le cas des gorilles chez lesquels les mâles monopolisent un harem de femelles qu’ils protègent de leurs rivaux grâce à leur grande taille. Inversement au sein d’espèces comme celle des chimpanzés, où les femelles s‘accouplent avec plusieurs partenaires, les mâles ont de grands testicules.
L’explication n’est pas mystérieuse: il s’agit de compétition spermatique. Lorsque les femelles s’accouplent avec plusieurs partenaires, les spermatozoïdes entrent en compétition pour féconder l’ovule, les mâles doivent produire plus de spermatozoïdes pour augmenter leurs chances de féconder les femelles… d’où la taille plus grande de leurs roubignoles.
Tout récemment, c’est aux amphibiens que s’est intéressée une équipe de scientifiques dont des chercheurs de l’Université de Berne. Les biologistes ont étudié le lien entre la taille des testicules et le comportement reproductif des grenouilles de verre. Il s’agit de grenouilles d’Amérique centrale dont le ventre est transparent et laisse voir les organes internes. Comme chez de nombreux amphibiens, leur fécondation est externe: la femelle pond d’abord ses oeufs et ces derniers sont ensuite fécondés par un mâle qui dépose sa semence sur la ponte.
Les chercheurs ont étudié 37 espèces de grenouilles de verre. Ils ont découvert que dans les 11 espèces chez lesquelles les mâles s‘occupent de leur progéniture, les testicules sont plus petits que dans les espèces où les mâles délaissent les oeufs après les avoir fécondés.
Il y aurait donc différentes stratégies de reproduction chez les grenouilles de verre. Certains mâles assurent leur reproduction en restant auprès de leur ponte. Ils empêchent les autres mâles de féconder les oeufs et ils prodiguent des soins parentaux pour favoriser la survie des jeunes. Nul besoin pour eux de grands testicules, ils évitent la compétition spermatique. D’autres mâles ont une tout autre façon de faire: ils fertilisent plusieurs pontes mais ne surveillent pas les oeufs. Des rivaux peuvent à leur tour déposer leur semence. Il faut donc produire de grandes quantités de spermatozoïdes – grâce à de grands testicules – pour espérer gagner la course de la fécondation. Les scientifiques ne précisent pas si les femelles procèdent à une observation méticuleuse des burnes des prétendants avant de décider de pondre leurs oeufs!
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* Valencia-Aguilar et coll., «Evolutionary trade-offs between testes size and parenting in Neotropical glassfrogs», 2024, «Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences».