A Neuchâtel, un degré de sécurité jugé «bon» par le ministre Alain Ribaux
Le nombre d’infractions au Code pénal augmente plus faiblement à Neuchâtel que dans le reste de la Suisse. Ce sont les problèmes liés au Centre fédéral d’asile de Boudry et la cybercriminalité qui tendent à renforcer le sentiment d’insécurité
Souvent mis sur le devant de la scène au cours de l’année écoulée en raison des questions sécuritaires liées au Centre fédéral d’asile (CFA) de Boudry, Neuchâtel n’est toutefois pas le canton le plus à plaindre en matière d’infractions au Code pénal enregistrées. De manière globale, elles ont augmenté de 7% l’an dernier dans le canton, contre 14% à l’échelle nationale. Sur dix ans, elles affichent un recul de 24% alors même que la cybercriminalité a drastiquement augmenté.
«Le degré de sécurité publique est bon. Nous sommes dans un canton où il fait bon vivre sans crainte particulière», a insisté le ministre de la Sécurité Alain Ribaux, lors de la présentation de ces statistiques hier au Château de Neuchâtel. Tout en rappelant qu’en raison de multiples biais – situation prévalente, organisation du territoire, déploiement des activités de police –, il était délicat de se livrer au jeu des comparaisons intercantonales. «Nous sommes plus dans une statistique de l’annonce que de la criminalité réelle.»
Ce discours contraste avec le sentiment souvent perçu dans le canton, et en particulier sur le littoral, où il n’est pas rare d’entendre des habitants se plaindre d’une insécurité toujours plus palpable. «Quand quelques personnes crient au loup, on a l’impression que rien ne va. Le retentissement d’un épisode comme celui de Cortaillod [un requérant d’asile fragile psychologiquement avait semé la panique aux abords de l’école du village en décembre dernier, ndlr] peut aussi avoir autant d’effet sur le ressenti général que 1000 autres infractions.»
Le ministre ne minimise cependant pas le rôle que joue le CFA dans le nombre d’infractions enregistrées à Boudry (-7%) et en ville de Neuchâtel (+12%). Dans cette dernière, l’augmentation est en partie due à «l’activité des délinquants nord-africains en situation d’asile ou de séjour illégal», précise la police cantonale. Son commandant, Sami Hafsi, note un double défi: «Nous devons d’une part continuer à réduire les risques sécuritaires, et d’autre part rassurer la population.»
«Nous sommes plus dans une statistique de l’annonce que de la criminalité réelle»
ALAIN RIBAUX, CONSEILLER D’ÉTAT NEUCHÂTELOIS CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ
Ces statistiques ont aussi leurs limites, car certaines incivilités – remarques agressives, regards mauvais – ne constituent pas des infractions et ne sont pas recensées. Alain Ribaux et Sami Hafsi ne lancent toutefois pas un appel à davantage de dénonciations. «Les victimes ne doivent le faire que si elles en ressentent le besoin. La situation liée au CFA est connue et si la Confédération veut davantage de données pour prendre des mesures, nous pourrons les lui fournir», appuie le conseiller d’Etat.
Les cyberescrocs dépassent les cambrioleurs
Autre point qui peut renforcer le sentiment d’insécurité dans le canton, celui de la cybercriminalité, qui ne cesse de gagner en importance (+50% en 2023, près de 10% des infractions totales). Dans ce domaine, les forces de l’ordre constatent que les plaintes sont encore trop rares. «Environ 15% des cas sont rapportés. On ne connaît que la pointe de l’iceberg», analyse Simon Baechler, chef de la police judiciaire. Le préjudice lié à des cyberescroqueries (+59%) – dont le nombre a pour la première fois dépassé celui des cambriolages – se monte à près de 7 millions de francs.
Là aussi, des efforts de sensibilisation sont en cours. La police cantonale a mis sur pied l’an dernier une brigade dédiée à la lutte contre la cybercriminalité. Composée de trois personnes, elle a notamment pour tâche de construire des compétences en la matière pour ensuite les diffuser au reste des troupes. «Les policiers de demain devront maîtriser ces technologies pour répondre aux défis qui se posent, mais aussi pour qu’ils se sentent tous impliqués par ces questions. Il serait contre-productif de surcentraliser ces compétences», conclut Sami Hafsi.
Pour le commandant et le conseiller d’Etat, ces deux thématiques sont actuellement celles qui captent le plus l’attention du public. A relever encore que les infractions liées à l’intégrité sexuelle ont diminué de 14% l’an dernier à Neuchâtel, et qu’un recul est aussi observé concernant les violences graves (-15%) et domestiques (-4%).
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