Le Temps

S’adapter ou mourir, les magasins n’ont aucun autre choix

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

Franz Carl Weber qui s’efface, Esprit qui ferme ses magasins, Yves Rocher qui a quitté la Suisse… La liste des enseignes qui abaissent leur rideau s’allonge et le mouvement semble s’accélérer. Ce qui se passe a des conséquenc­es brutales: des emplois sont perdus, des clients sont déboussolé­s, du lien social disparaît et les centres urbains perdent petit à petit de leur vie.

Il ne faut pas sous-estimer les dégâts causés, sur la durée, par ces fermetures. Mais il faut aussi, en parallèle, se poser une question centrale: quelle est réellement la valeur ajoutée d’un magasin physique par rapport à un site de vente en ligne?

Prenons l’exemple des jouets. Bien sûr, il y a le plaisir, en magasin, d’admirer, de comparer et de toucher des produits. Mais dans les grandes surfaces et les chaînes spécialisé­es, ce sont évidemment des jouets standardis­és. Ils ne présentent aucune originalit­é et s’achètent en ligne, sur des sites suisses, facilement 20 à 30% moins cher. Avec un brin de cynisme, on peut avancer que les magasins physiques qui proposent ces jouets servent, bien malgré eux, de surfaces d’exposition gratuites à des concurrent­s en ligne vers qui les consommate­urs vont ensuite se tourner…

Cette question de la valeur ajoutée se pose aussi dans le secteur des cosmétique­s, ou des habits. Bien sûr, on veut parfois voir ou essayer un produit et bénéficier des conseils de vendeurs. Mais ensuite, souvent, ces produits, encore une fois standardis­és, s’acquièrent à meilleur compte en ligne.

Et pour assombrir le tableau, il n’y a pas que le prix. Il y a aussi le côté pratique. De nombreuses plateforme­s suisses de vente en ligne proposaien­t déjà la livraison le lendemain. Désormais, la tendance va vers une livraison le jour même – Galaxus, filiale de Migros, étant à la pointe dans ce domaine. La majorité de ses clients qui effectuent une commande avant 11h reçoivent leur colis vers 21h. Et il y a une demande pour ce service: selon les régions, entre 20 et 30% des commandes sont déjà livrées le soir même sur demande du client.

Bien sûr, il peut y avoir un côté absurde à voir un livreur – dont on peut suivre le déplacemen­t en direct sur l’écran de son smartphone… – déposer un paquet de croquettes pour chat le soir devant sa porte. Pourtant, d’après une étude récente de Galaxus, ce sont les jeunes qui plébiscite­nt le plus ce type de livraison éclair.

Les magasins traditionn­els ont donc tout intérêt à se préparer à cette concurrenc­e issue d’acteurs helvétique­s. Bien sûr, il y a aussi des acteurs étrangers tels Temu ou Shein, dont les prix sont si bas qu’ils paraissent aberrants, et dont la qualité des produits est si faible qu’elle est inquiétant­e. Face à cette concurrenc­e jugée déloyale, les représenta­nts des magasins suisses ont raison de se plaindre.

Mais pour tout le reste, ils doivent trouver comment s’adapter aux nouvelles exigences de leur clientèle.■

Quelle est réellement la valeur ajoutée d’un magasin physique?

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland