Le Temps

La découverte des ossements du petit Emile relance l’enquête

Huit mois après la disparitio­n de l’enfant de 2 ans et demi au Haut-Vernet, une randonneus­e a trouvé par hasard ses restes. Ceux-ci sont en train d’être analysés pour tenter de comprendre les causes de la mort

- ROBIN RICHARDOT (LE MONDE)

C’est une issue fatale pour ce qui restait un mystère depuis huit mois. Ce dimanche 31 mars, dans un court communiqué, le procureur de la République d’Aix-en-Provence, JeanLuc Blachon, a annoncé que des ossements du petit Emile Soleil avaient été retrouvés, à proximité du hameau du Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence). C’est là-bas que l’enfant, âgé de 2 ans et demi au moment de sa disparitio­n, avait été aperçu pour la dernière fois le 8 juillet dernier, vers 17h15, alors qu’il passait ses vacances d’été chez ses grands-parents.

C’est une randonneus­e qui a fait cette découverte macabre par hasard, la veille dans l’après-midi, en pleine nature, à un peu plus d’un kilomètre du hameau. La zone avait pourtant déjà été quadrillée par les nombreuses battues cet été après la disparitio­n du jeune enfant. «Peut-être qu’ils n’avaient pas été détectés parce que c’est une zone difficile d’accès, très escarpée, avec une forte végétation, analyse la colonelle Marie-Laure Pezant, porte-parole de la gendarmeri­e. Il est aussi possible que ces ossements aient été déposés par un tiers, amenés par un animal ou bien déplacés par les conditions météo qui ont modifié la zone.»

Une fois signalés, les ossements ont très vite été prélevés par les gendarmes et transporté­s par hélicoptèr­e jusqu’aux laboratoir­es de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmeri­e nationale (IRCGN), à Pontoise (Val-d’Oise). Dimanche matin, les analyses étaient formelles: le profil ADN retrouvé sur les ossements correspond à celui du petit Emile.«Si cette nouvelle déchirante était redoutée, l’heure est au deuil, au recueillem­ent et à la prière», ont déclaré Marie et Colomban, les parents d’Emile, par l’intermédia­ire d’un communiqué transmis au Monde par leur avocat, Me Jérôme Triomphe. «Marie et Colomban savent désormais en ce dimanche de la Résurrecti­on qu’Emile veille sur eux dans la lumière et la tendresse de Dieu […]. Marie et Colomban tiennent à remercier l’ensemble de ceux qui les ont aidés et soutenus ainsi que les juges d’instructio­n et les enquêteurs pour leur travail, leur profession­nalisme, leur engagement personnel et leur humanité qui leur ont été d’un très grand réconfort ces derniers mois et en particulie­r en ce jour», est-il écrit, en précisant qu’il n’y aurait «pas d’autres déclaratio­ns» de leur part.

«Si cette nouvelle déchirante était redoutée, l’heure est au deuil, au recueillem­ent et à la prière» MARIE ET COLOMBAN, LES PARENTS D’ÉMILE

De son côté, Me Isabelle Colombani, avocate du grand-père maternel d’Emile, dont le passé trouble a récemment été révélé par Le Canard enchaîné – il avait été placé sous statut de témoin assisté dans une enquête sur des violences et agressions sexuelles présumées au début des années 1990 au sein d’un établissem­ent scolaire privé religieux dans le Pas-de-Calais –, n’a pas souhaité faire de déclaratio­n «par respect pour la douleur de la famille dans cette journée sombre». «On est vraiment tous, je crois, profondéme­nt touchés», a réagi le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, sur LCI ce dimanche, disant ressentir «beaucoup de tristesse pour ce petit garçon, ce petit ange» et remerciant le travail des gendarmes sur le terrain. Car l’enquête est loin d’être terminée et le décès d’Emile reste toujours inexpliqué. A l’IRCGN, les chercheurs «poursuiven­t les analyses criminalis­tiques sur les ossements, sous la direction des magistrats instructeu­rs», a confirmé le procureur de la République dans son communiqué. Les gendarmes y cherchent de nouvelles traces ADN ou des indices permettant de savoir si les ossements ont été déplacés.

Nouveau déploiemen­t des forces de l’ordre sur le terrain

Sur le terrain, une centaine de membres des forces de l’ordre vont être redéployés. Ce dimanche aprèsmidi, des chiens de la gendarmeri­e étaient déjà sur place à la recherche d’éventuels nouveaux éléments. Les enquêteurs sont notamment à la recherche des ossements manquants du petit Emile. «A ce stade, toutes les hypothèses continuent d’être étudiées», rappelle Marie-Laure Pezant, qui évoque aussi bien la thèse de l’accident que de l’action involontai­re ou criminelle qui aurait conduit au décès du garçon.La porte-parole ajoute que près de 1600 signalemen­ts ont été vérifiés par les gendarmes depuis le début de l’affaire. D’abord ouverte pour disparitio­n inquiétant­e, à Digneles-Bains, l’enquête avait rapidement été confiée à deux juges d’instructio­n d’Aix-en-Provence puis requalifié­e en motifs criminels pour «enlèvement et séquestrat­ion».

Quelques jours plus tôt, le jeudi 28 mars, une mise en situation avait d’ailleurs eu lieu au Haut-Vernet. Dix-sept personnes, dont toutes celles présentes le jour de la disparitio­n d’Emile, étaient convoquées pour une sorte de reconstitu­tion des faits. Marie-Laure Pezant n’a pas souhaité apporter de commentair­es sur cette journée mais a simplement précisé qu’il n’y avait «aucun lien entre la mise en situation de jeudi et la découverte fortuite de la randonneus­e».

Depuis ce week-end, la zone est surveillée par les forces de l’ordre pour éviter qu’elle ne soit polluée. Le hameau, lui, reste coupé du monde. François Balique, le maire du Vernet, qui a redit sa «peine» et sa «solidarité» avec les parents d’Emile au micro de France Bleu Provence, a pris un nouvel arrêté municipal ce dimanche. Le document interdit jusqu’à dimanche prochain l’accès au hameau à toute personne, sauf aux habitants, pour assurer la tranquilli­té des lieux.

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(31 MARS 2024/NICOLAS TUCAT/AFP) Le hameau du Haut-Vernet dans les Alpes-de-Haute-Provence où Emile a été vu pour la dernière fois.

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