Le Jura pleure, Neuchâtel rit
Robert Sandoz quitte le Théâtre du Jura, lieu emblématique qu’il a inauguré en octobre 2021, pour reprendre les rênes du Théâtre du Passage. Le Conseil de fondation delémontain dit «ses regrets»
En juillet 2002, Robert Sandoz a orchestré, au Théâtre du Passage, une opération qui restera comme un des grands moments de la vie théâtrale romande: la mise en scène intégrale, d'une durée de vingt-quatre heures, de La Servante d'Olivier Py. On était une poignée à l'arrivée, mais une poignée ravie d'avoir traversé cette épopée.
Vingt-trois ans plus tard, à la suite d'une mise au concours qu'il a remportée, le même Robert Sandoz reprend les rênes de l'institution neuchâteloise fondée et dirigée depuis son inauguration, en novembre 2000, par Robert Bouvier. Une jolie succession, donc, si ce n'est cette ombre au tableau: pour rejoindre ce lieu doté de deux salles de 541 et 118 places où le texte côtoie la danse, l'humour, l'opéra et la chanson, Robert Sandoz doit quitter le Théâtre du Jura, à Delémont, après seulement cinq ans de direction.
Un crève-coeur pour le concerné et pour le Conseil de fondation qui, par deux fois, dit «ses regrets» dans le communiqué.
Une grande maturité scénique
On comprend la tristesse des Jurassiens. Robert Sandoz, fringant metteur en scène qui, dans chacune de ses propositions, marie à merveille tous les arts du plateau (texte, musique, décor et costumes, une fête!) a excellé à la tête de ce lieu tant attendu par le Jura. Car, oui, si le benjamin des cantons suisses a été le premier à proposer une maturité théâtrale, il a mis plus de trente ans, au bas mot, à construire une scène cantonale.
Inaugurée le 8 octobre 2021, cette embarcation qui comprend une salle de 444 places et une petite salle modulable de 100 places a pris sa revanche, puisqu'elle a affiché régulièrement complet. Mieux, «près d'un tiers des spectateurs ont fait le déplacement de l'extérieur des frontières cantonales», salue le Conseil de fondation emmené par Geneviève Bugnon.
Un départ pour mieux concilier vie professionnelle et vie privée
De plus, grâce au programme de médiation, près de 3600 élèves et écoliers des trois districts (Delémont, Franches-Montagnes et Porrentruy) ont pu se familiariser avec les arts de la scène, note encore le Conseil. Carton plein, donc, pour Robert Sandoz, à la direction de ce lieu qui a coûté 27 millions de francs pour sa construction, dont 14 millions alloués par le canton. Pourquoi partir alors et quitter tant de bonheur? Pour de simples raisons pratiques. Vivant à Neuchâtel, l'intéressé pourra ainsi mieux concilier vie professionnelle et vie privée. Triste, mais pas inactif, le Conseil de fondation du Théâtre du Jura annonce que le poste de direction «sera mis au concours très prochainement».
«Poursuivre le travail de Robert Bouvier»
A Neuchâtel, à l'inverse, on se réjouit. Le comité de direction du Syndicat intercommunal du Théâtre régional de Neuchâtel (SITRN), présidé par le conseiller communal de la ville de Neuchâtel, Thomas Facchinetti, s'est prononcé à l'unanimité en faveur de «cette candidature de très grande qualité, qui permettra de poursuivre le remarquable travail entrepris ces dernières années par Robert Bouvier, tout en insufflant une énergie nouvelle et une vision novatrice à l'institution».
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