Le Temps

UBS l’emporte contre l’éditeur de l’app électorale de Trump

- SÉBASTIEN RUCHE @sebruche

Phunware Inc est spécialisé­e dans le ciblage publicitai­re personnali­sé. La société texane a ainsi construit l’applicatio­n utilisée par le camp Trump lors de la campagne de réélection de l’ex-président américain en 2020. Mais en juillet 2023, c’est UBS que Phunware a ciblé, et pas pour de la publicité, même personnali­sée. L’éditeur de logiciel estimait que le cours de ses actions avait été manipulé par une entité américaine de la grande banque, entre janvier 2021 et mars 2023. L’opération aurait poussé la valeur de ces titres à la baisse et occasionné des pertes à Phunware, selon la plainte qui a été classée jeudi passé, a révélé Bloomberg.

Phunware reprochait à UBS d’avoir fait du spoofing, c’est-à-dire d’avoir passé des ordres boursiers et de les avoir annulés avant qu’ils ne soient exécutés. Cette technique bien connue permet d’influencer le marché. Lorsqu’un grand investisse­ur place un grand nombre d’ordres de vente sur un titre, par exemple, les algorithme­s de trading des concurrent­s se positionne­nt immédiatem­ent pour profiter de ce signal baissier. Ils vendent à leur tour l’action concernée, dont le prix part à la cave. Mais le spoofer (l’entité à l’origine de la combine), lui, a entre-temps annulé ses propres ordres. Il peut ensuite, dans cet exemple, acheter l’action en question à un cours inférieur.

Il faut calculer le dommage

C’est exactement ce que Phunware reprochait à UBS. Une telle manipulati­on est bien entendu interdite, depuis 2010, à la suite de l’avènement du trading à haute vitesse effectué par des robots. L’éditeur d’app basé à Austin affirmait avoir vendu 34 millions de ses actions à un prix poussé à la baisse de manière artificiel­le, selon la plainte.

Le juge new-yorkais l’a balayée car il a estimé que Phunware a fait le travail juridique à moitié. La société a bien décrit comment elle a perdu de l’argent en vendant ses actions à des prix bas. En revanche, elle n’a pas établi combien elle avait perdu. Elle n’a pas démontré l’étendue du dommage qu’elle affirme avoir subi. Or, c’est une nécessité pour un plaignant dans une affaire de ce genre. Ce n’est peut-être que partie remise. Le juge du district sud de New York précise aussi que Phunware pourra déposer une nouvelle plainte, un peu plus étoffée cette fois.

Monétiser UBS

Ce que Phunware devrait également étoffer, ce sont ses résultats. En pleine restructur­ation depuis l’an dernier, l’entreprise a perdu 52,8 millions de dollars l’an dernier (48 millions de francs), pour un chiffre d’affaires de 4,8 millions de dollars, selon des résultats publiés le 12 mars. L’action cotée au Nasdaq a perdu près de 77% sur un an, même si elle a retrouvé des couleurs depuis le début de l’année (+88%, à 7,82 dollars). Ce rally vient probableme­nt de son associatio­n avec Donald Trump, puisque les actions liées à l’ex-président ont connu un bond en début d’année. L’ex-homme d’affaires a introduit en bourse son réseau Truth Social le 25 mars.

Dans sa plainte contre UBS, Phunware a voulu faire honneur à sa mission, qui consiste à permettre aux marques «de créer des liens et de monétiser n’importe qui, n’importe où». La société a voulu monétiser UBS, sans succès jusque-là.

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