Le Temps

«L’éclipse a été une expérience collective»

Du Mexique au Canada, des millions de personnes ont assisté lundi à ce rare alignement des corps célestes. Le Musée des sciences de Miami a reçu des milliers d’enthousias­tes, au grand bonheur de son directeur, Alec Warren

- PROPOS RECUEILLIS PAR SIMON PETITE, MIAMI X @simonpetit­e

L’engouement pour l’éclipse solaire a dépassé de loin la diagonale d’obscurité qui a traversé les Etats-Unis de la frontière mexicaine jusqu’au Canada. Le Musée des sciences Frost à Miami a reçu lundi bien plus de visiteurs qu’à l’accoutumée, quand la Lune y a caché 45% du Soleil. C’est plusieurs fois l’affluence normale pour le premier jour de la semaine. Responsabl­e du planétariu­m du musée, Alec Warren explique cet engouement et l’intérêt scientifiq­ue d’étudier ce phénomène.

«Les nouvelles observatio­ns permettent d’encore mieux appréhende­r les interactio­ns avec le Soleil»

Quelle est la particular­ité de cette éclipse? Il s’agissait de la dernière éclipse solaire totale visible depuis Miami avant le 12 août 2045, pour être précis [il s’agira alors d’une longue éclipse totale; une première, en 2044, ne sera pas visible de la côte est des Etats-Unis]. C’est très long, car nous avons eu des éclipses en 2017 et en 2023. Voilà pourquoi nous en faisons toute une histoire.

Qu’est-ce qu’il y a encore à apprendre d’un tel phénomène? Les éclipses sont de rares occasions d’avoir une expérience scientifiq­ue commune. Des millions de personnes font le trajet puis se rassemblen­t. Depuis des millénaire­s, les différente­s cultures ont observé les éclipses, les ont répertorié­es et ont créé des mythes. Les Mayas, qui avaient réussi à les prédire avec une grande précision, voyaient un signe de la fin du monde, d’autres peuples craignaien­t des désastres naturels. Plus récemment, les éclipses ont servi aux scientifiq­ues pour étudier le Système solaire et les relations entre le Soleil, la Terre et la Lune, dont la danse forme parfois une éclipse.

De très nombreux projets de recherches ont été menés le lundi 8 avril. Y en a-t-il qui sortent du lot? La NASA, l’agence spatiale américaine, encouragea­it les particulie­rs situés sur le parcours de l’éclipse totale – mais aussi partielle – à envoyer leurs photos et leurs vidéos. Le but était de créer une carte complète de cette éclipse, qui aidera à affiner la connaissan­ce à la fois de la surface de la Lune et du Soleil.

En quoi ces connaissan­ces peuvent-elles être utiles dans notre vie de tous les jours, ou pour affronter les grands défis de notre temps? Même si nous avons désormais une bonne compréhens­ion des éclipses, les nouvelles observatio­ns permettent d’encore mieux appréhende­r les interactio­ns avec le Soleil. Cette éclipse avait aussi ceci d’unique que toutes les planètes de notre Système solaire étaient visibles lorsque l’obscurité était totale, mais aussi la comète du diable – il fallait toutefois avoir un bon télescope.

Un autre projet de recherche de la NASA a consisté à envoyer plusieurs fusées depuis la Virginie durant l’éclipse pour étudier les perturbati­ons électromag­nétiques causées par le Soleil. De quoi s’agit-il? Le Soleil produit des vents solaires très puissants, qui peuvent parfois perturber les satellites et nos ondes, et avoir ainsi une influence sur la réception de nos appareils. La Lune a sa propre protection électromag­nétique et elle influence aussi les courants solaires vers la Terre. Durant une éclipse, ces interactio­ns sont brièvement différente­s. La NASA a donc mis à profit cette opportunit­é pour tester différente­s hypothèses. Car il est très difficile de prédire assez tôt ces éruptions solaires et leur intensité.

 ?? (MARTIN, OHIO, 8 AVRIL 2024/GREGORY SHAMUS/GETTY IMAGES/AFP) ?? Pour observer une éclipse vraiment complète, des millions de Nord-Américains ont convergé vers la «bande de totalité», la zone la plus plongée dans l’obscurité, large d’un peu moins de 200 kilomètres.
(MARTIN, OHIO, 8 AVRIL 2024/GREGORY SHAMUS/GETTY IMAGES/AFP) Pour observer une éclipse vraiment complète, des millions de Nord-Américains ont convergé vers la «bande de totalité», la zone la plus plongée dans l’obscurité, large d’un peu moins de 200 kilomètres.
 ?? (NEW YORK, 8 AVRIL 2024/SPENCER PLATT/GETTY IMAGES/AFP) ?? Lunettes protectric­es sur le nez, des milliers de New-Yorkais se sont rassemblés lundi sur les toits de gratte-ciel.
(NEW YORK, 8 AVRIL 2024/SPENCER PLATT/GETTY IMAGES/AFP) Lunettes protectric­es sur le nez, des milliers de New-Yorkais se sont rassemblés lundi sur les toits de gratte-ciel.
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