Le Temps

Foie gras et fourrure, même combat pour éviter leur interdicti­on totale

SCRUTINS Les deux initiative­s ont abouti en décembre dernier. Le Conseil fédéral rejette les deux projets, tout en reconnaiss­ant la souffrance animale. Un contre-projet indirect est à prévoir d’ici à 2025

- ANNICK CHEVILLOT, BERNE @chevillot_a

Mangera-t-on encore du foie gras à l’avenir en Suisse et pourra-t-on encore porter de la fourrure? Le débat agite le parlement depuis plusieurs années, avec une scission marquée entre élus romands et alémanique­s sur le foie gras. Face à l’incapacité de l’Assemblée fédérale à proscrire ces produits, l’associatio­n

Wildtiersc­hutz Schweiz [protection des animaux sauvage, ndlr] a lancé deux initiative­s pour en interdire l’importatio­n dans le pays.

Leurs textes ayant abouti, les Suisses devront se prononcer. Le Conseil fédéral a pris position hier: «Du point de vue de la protection des animaux, le Conseil fédéral considère que les objectifs des initiative­s sont compréhens­ibles et souhaite les concrétise­r sur deux fronts. Il propose ainsi un contre-projet indirect à l’initiative fourrure et une déclaratio­n obligatoir­e pour les produits issus du gavage des volailles.»

En d’autres termes, il rejette les deux initiative­s pour des raisons différente­s et avec des propositio­ns différenci­ées.

Le foie gras est le sujet le plus clivant. Honnie en Suisse alémanique et appréciée en Suisse romande, la spécialité n’est plus produite en Suisse depuis plus de quarante ans. Les défenseurs des animaux désirent désormais en

Honni côté alémanique et apprécié côté romand, le foie gras est le sujet le plus clivant

interdire l’importatio­n. Raison évoquée: la maltraitan­ce subie par les volailles lors du gavage.

Une telle interdicti­on, si elle est acceptée par le peuple, serait en contradict­ion avec les accords commerciau­x internatio­naux conclus par le pays. C’est la raison principale avancée par l’exécutif pour proposer une déclaratio­n obligatoir­e plutôt qu’une interdicti­on: «Les consommate­urs doivent être conscients qu’ils achètent un produit obtenu par des méthodes interdites en Suisse.»

Pour ce qui est des fourrures, la position du gouverneme­nt peut paraître ambivalent­e. D’un côté, il «souhaite inscrire rapidement dans la loi fédérale sur la protection des animaux l’interdicti­on d’importer des produits de la pelleterie provenant d’animaux ayant subi des mauvais traitement­s». De l’autre, il estime nécessaire de «contrôler un commerce», qu’il désire interdire.

«La fourrure ne respecte pas la réglementa­tion»

En fait, le Conseil fédéral partage l’avis des initiants, mais ne souhaite pas inscrire cette interdicti­on dans la Constituti­on. Il préfère proposer un contre-projet indirect – d’ici à l’été 2025 – qui permettra d’inscrire ce bannisseme­nt dans la loi fédérale sur la protection des animaux. Cela doit passer par une adaptation de la réglementa­tion des ordonnance­s réglant les échanges d’importatio­n, de transit et d’exportatio­n d’animaux et de produits animaux. Un projet qui ne concerne que les fourrures issues d’animaux maltraités.

Dans le même temps, le gouverneme­nt entend notamment durcir les contrôles: «Bien que la fourrure soit soumise à une déclaratio­n obligatoir­e depuis une dizaine d’années, le secteur de la fourrure et le commerce de détail ne respectent pas toujours la réglementa­tion. Rien qu’en 2023, la Confédérat­ion a contesté des étiquetage­s dans environ 70% des points de vente contrôlés.»

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland