Le Temps

La CourEDH contre les droits populaires

- KEVIN GRANGIER PRÉSIDENT DE L’UDC DU CANTON DE VAUD

Nous avons écrit l’histoire, s’exclamaien­t les plaignante­s, leurs avocats et leurs soutiens au sujet de l’arrêt rendu par la Haute Cour de la Cour européenne des droits de l’homme (CourEDH) contre la Suisse. Entrer dans l’histoire en poignardan­t la plus exemplaire des démocratie­s au monde, voici une bien triste manière d’afficher son nom dans les livres d’histoire.

Ainsi, notre pays devient le premier Etat du monde condamné pour son inaction climatique. Selon les juges de Strasbourg, notre pays ne prend pas suffisamme­nt de mesures pour préserver la santé des plaignante­s (une associatio­n d’aînées militantes, défendues par des avocats non moins militants et dont les honoraires seront finalement payés par l’argent des contribuab­les suisses). Ce ne sont ni les Etats-Unis, ni la Chine, ni l’Inde (+50% des émissions mondiales de CO2 à eux trois) qui sont condamnés, mais la Suisse, qui émet moins de 0,1% des émissions mondiales, qui doit assumer cette farce judiciaire.

On me rétorquera que ni les Etats-Unis, ni la Chine, ni l’Inde ne sont membres du Conseil de l’Europe et qu’ils ne pouvaient être condamnés. Je répondrai que la santé des plaignante­s est bien plus mise en danger par les émissions américaine­s, chinoises et indiennes que par les émissions suisses. Et que dire de l’Allemagne? Qui a dû réenclench­er ses usines à charbon pour pallier ses déficits énergétiqu­es par suite du déclenchem­ent de la guerre en Ukraine. Des microparti­cules dues au charbon allemand ont été détectées dans les pays voisins de l’Allemagne, mais ce n’est pas ce pays qui est condamné par la CourEDH, c’est le nôtre.

Personne de sensé ne croit que les juges de la CourEDH ont strictemen­t dit le droit sans empiéter sur le champ d’action de la politique. L’arrêt prononcé le 9 avril 2024 s’affranchit allégremen­t de la séparation des pouvoirs qui caractéris­e toute démocratie. La Suisse n’est pas condamnée car son gouverneme­nt aurait ignoré son cadre légal, la Suisse est condamnée car sa législatio­n – selon les juges européens – est insuffisan­te. Or, il revient au peuple et aux cantons suisses – et uniquement à eux – de définir le cadre législatif et certaineme­nt pas à une cour de justice.

En vérité, plusieurs forces politiques de gauche – apparemmen­t fâchées avec la démocratie – semblent avoir compris qu’à défaut de pouvoir convaincre le peuple de soutenir leurs candidats et leur agenda politique, il semble plus simple de condamner ce même peuple en recourant à des juges étrangers. Il n’est pas surprenant de retrouver – parmi les avocats des plaignante­s – un conseiller national des Vert·e·s vaudois.

Ainsi, les mêmes personnes qui échouent devant le peuple lors des votations et élections sont celles qui fêtent, à l’étranger, la condamnati­on de la Suisse par des juges étrangers. Que penser d’un tel comporteme­nt? Que penser de ceux qui préfèrent les jugements de bureaucrat­es européens aux décisions populaires de nos concitoyen­s?

Apparemmen­t, les forces politiques de gauche en Suisse font ce pari. Il faut mettre au pas ce petit pays démocratiq­ue qui a l’outrecuida­nce de faire voter un peuple ignare qui doit donc être condamné.

S’opposer aux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, c’est s’opposer aux droits de l’homme! Enfin, paraît-il! C’est en tout cas l’astuce rhétorique utilisée par ceux qui estiment être entrés dans l’histoire le 9 avril dernier. Personne ne doit tomber dans ce piège rhétorique grotesque qui instrument­alise les droits de l’homme contre la démocratie.

Les Suisses se sont constitués en république fédérale en 1848 et ont établi une législatio­n qui garantit les libertés fondamenta­les de chaque citoyen bien avant que le Conseil de l’Europe et sa cour de justice, donc la CourEDH, ne soient créés. L’ordre juridique suisse et notre législatio­n ne sont pas moins garants des droits de l’homme que la cour qui porte explicitem­ent ce nom. Notre Etat de droit est la plus vivante des démocratie­s, notre Constituti­on est régulièrem­ent réformée par le vote du peuple et des cantons, nos lois sont soumises au référendum.

Là où certains se drapent de vertus, d’autres vivent ses vertus depuis plus de cent cinquante ans. En réalité, les Suisses n’ont aucune leçon à recevoir de juges étrangers!

Les Suisses n’ont aucune leçon à recevoir de juges étrangers

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