Le Temps

Après l’attaque de l’Iran sur Israël, Joe Biden sur une ligne de faille

- ALINE JACCOTTET X @AlineJacco­ttet

Dans la nuit de samedi à dimanche, le Moyen-Orient a vécu un tournant: celui de la perspectiv­e concrète d’une guerre entre l’Iran et Israël. L’attaque menée par Téhéran, qui a lancé sur l’«entité sioniste» plus de 300 drones, missiles de croisière et balistique­s avec l’aide du Hezbollah et des houthis yéménites, n’a rien d’étonnant.

Ennemis jurés, les deux pays sont prêts à un affronteme­nt depuis des années. Et le bombardeme­nt du consulat iranien le 1er avril à Damas a mis le feu aux poudres. Non qu’Israël en soit à son coup d’essai: l’Etat hébreu mène régulièrem­ent des frappes plus ou moins médiatisée­s sur territoire syrien. Mais, cette fois, un bâtiment diplomatiq­ue considéré comme territoire national a été touché. Surtout, l’opération a provoqué la mort d’un membre éminent du régime iranien: Mohammad Reza Zahedi, point de contact de Téhéran avec le Hezbollah et figure des Gardiens de la révolution. Pour l’Iran, une ligne rouge a été franchie. Et, n’en déplaise à ceux qui croyaient que ce pays finirait par se mobiliser militairem­ent pour contrer les Israéliens dans Gaza, sa réaction n’a pas à voir directemen­t avec la cause palestinie­nne.

Certes, l’offensive nocturne des Iraniens n’est à ce stade rien d’autre qu’un coup de semonce. Les armes utilisées ont permis à l’armée israélienn­e de limiter largement les dégâts, les frappes visaient principale­ment des installati­ons militaires et Téhéran a annoncé, une fois la salve tirée, qu’il n’y en aurait pour l’instant pas d’autre. Le coup d’éclat était si circonscri­t que l’aéroport de TelAviv a rouvert à peine l’attaque passée.

Cette brève et spectacula­ire mise en garde brise un tabou

Mais cette brève et spectacula­ire mise en garde brise un tabou: oui, attaquer directemen­t Israël est possible. Ensuite, il s’agit d’une claque pour le président Joe Biden qui, vendredi encore, mettait Téhéran en garde contre des représaill­es envers l’Etat hébreu. Les Iraniens montrent ainsi à Washington qu’ils sont prêts à aller plus loin s’il le faut. Voici désormais le démocrate face à une tâche plus que délicate: convaincre son embarrassa­nt allié Netanyahou qu’il ne faut pas surenchéri­r et calmer les esprits dans cette région toujours plus agitée. S’il n’y parvient pas, le chef du Hamas, Yahya Sinwar, pourrait, depuis sa cachette dans Gaza, voir son voeu exaucé, lui qui espère comme beaucoup d’ennemis d’Israël voir l’Iran entrer en guerre. Nul ne sait quel destin embrassera­it alors le Moyen-Orient et, par répercussi­on, tout le reste du monde.

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