Le Simplon expose ses blessures au public
Le bateau et ses dommages se découvrent aux portes ouvertes de la Compagnie générale de navigation, dans le chantier naval d’Ouchy. Pour rappel, il s’était encastré dans un ponton lors du dernier fort épisode de foehn
«C’est le fameux bateau!» entend-on parmi les visiteurs du chantier naval à Ouchy de la CGN, qui organisait des portes ouvertes ce week-end. Le Simplon – un vaisseau de 78 mètres de long et pouvant normalement embarquer 850 personnes – est en effet amarré à côté d’un autre des navires Belle Epoque, fleurons de la compagnie de navigation du Léman. Sur le quai, une femme glisse à un proche: «Le pauvre bateau, cela fait mal au coeur.» Des dégâts sont visibles sur le flanc tribord du navire, dont une partie semble avoir été arrachée.
Le directeur de la CGN, Pierre Imhof, est présent pour répondre aux questions du public. «J’ai été fortement mis en question depuis l’accident», concède-t-il. Un écriteau à côté de lui retrace les événements du 29 mars dernier. Alors qu’il sortait de sa maintenance hivernale, le Simplon a connu une avarie motrice durant un tour d’essai sur le lac au large d’Ouchy.
Dans un premier temps, la CGN a tenté de le ramener en le tractant avec un autre navire, le Ville de Genève. Mais les manoeuvres, notamment en raison du vent fort du sud-ouest et des vagues, se sont avérées trop compliquées. Les deux bateaux dérivaient et sont même entrés en collision.
La compagnie a alors décidé d’amarrer le Simplon à Cully. Le vent, qui avait changé de direction, a poussé le bateau contre un ponton et des rochers.
Pourquoi n’avoir pas ancré le navire?
Une question revient souvent parmi les visiteurs du jour, faisant écho à la polémique sur les décisions prises au moment de l’accident: pourquoi ne pas avoir décidé d’ancrer le Simplon au large du rivage, au lieu de l’amarrer à un ponton? «Le capitaine a décidé de faire autrement, en tenant compte des conditions du moment, défend Pierre Imhof. Avec le vent, le bateau au bout de l’ancre aurait pu dériver avec le risque de s’échouer. Les rivages sont toujours proches. Et il aurait fallu mobiliser un autre navire pour le maintenir constamment en place, ce qui était aussi risqué pour l’équipage.» Le conseil d’administration de la CGN a annoncé le 8 avril avoir mandaté des experts indépendants pour mener une enquête sur cet accident.
Les dégâts sur le Simplon, constatés juste après l’accident, consistaient en deux voies d’eau, une grosse à l’arrière et une plus petite dans la salle des machines (le moteur est resté intact). Une partie du plancher a aussi été déchirée. Pourtant, ce samedi, le Simplon flottait sur les eaux d’Ouchy. «Des plongeurs ont bouché les entrées d’eau avec de la colle dite époxy. Le bateau est sécurisé mais sous constante surveillance», explique le directeur, pour qui il est compliqué de faire le bilan de tous les dommages. «Le bateau aurait dû être mis à sec pour faire le diagnostic complet mais le niveau du lac est trop bas pour l’instant. Il manque quelques centimètres pour pouvoir le glisser sur le dock flottant.» Ce dernier, situé quelques mètres plus loin dans le chantier naval et actuellement vide, pourrait accueillir le Simplon dès le début du mois de mai, au moment de la montée des eaux.
Pour Pierre Imhof, «il n’y a pas de doute que le Simplon pourra fonctionner de nouveau». «Nous devons décider si nous faisons les réparations seules, avec une remise à l’eau jusqu’à la prochaine rénovation qui était déjà programmée pour bientôt. Ou si nous combinons les deux ensemble dès maintenant, précise-t-il. Si nous faisons une rénovation complète, il faut définir le projet et établir les collaborations avec les entreprises, ce qui prend au moins une année. Et il faut le financement: une partie viendra des assurances et nous irons chercher le reste auprès des donateurs et des autorités.» «Avez-vous vu le ponton à Cully? lance un passant qui interpelle le directeur de la CGN. Il est bien abîmé.» Lui aussi devra être réparé.
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