Le Temps

Marco Chiesa entre à la mairie de Lugano

L’ex-président de l’UDC suisse va cumuler son mandat à Berne et un rôle dans l’exécutif de la seule ville à être gouvernée par la droite parmi les dix plus grandes cités de Suisse

- ANDRÉE-MARIE DUSSAULT, LOCARNO

Marco Chiesa ne sera pas maire de Lugano. Soupir de soulagemen­t pour Michele Foletti, le syndic léguiste sortant de la capitale financière du Tessin. L’enjeu le plus piquant des élections communales tessinoise­s concernait cette mairie. Si l’entrée de l’ex-président de l’UDC suisse à l’exécutif était acquise, la grande inconnue était son classement. Au terme d’une campagne plutôt plate, le suspense est levé: n’ayant pas terminé en tête, Marco Chiesa ne sera pas maire.

Il a néanmoins été brillammen­t élu, obtenant le deuxième meilleur score: 10 484 voix, contre 11 311 pour Michele Foletti. «Avec un conseiller national (Lorenzo Quadri, Lega), un ex-conseiller aux Etats (Filippo Lombardi, Le Centre) et maintenant un conseiller aux Etats, je dirais que Lugano est plutôt bien équipée; c’est un privilège!» a-t-il déclaré, visiblemen­t ému.

Au bar Ul Nin da San Sir, le repère UDC, règne une ambiance électrique au moment des résultats. On lève son verre à la santé du nouvel élu de Lugano. «Auguri Marco!» En tenue décontract­ée, Marco Chiesa, arrivé en fin d’aprèsmidi, s’était attablé à la terrasse avec ses proches, sous un ciel bleu. «Je suis très satisfait. C’est la première fois que j’ai

«Je suis très satisfait. C’est la première fois que j’ai l’opportunit­é de siéger dans un exécutif» MARCO CHIESA, ÉLU À L’EXÉCUTIF COMMUNAL DE LUGANO

l’opportunit­é de siéger dans un exécutif», déclare-t-il, à chaud, après l’annonce des résultats. «Tout au long de la campagne, j’ai soutenu Michele et toute la liste UDC-Lega. Celle-ci a gagné son pari.»

C’est la première fois qu’un candidat UDC est élu (directemen­t, et non comme suppléant) à l’exécutif d’une grande ville au Tessin, fait-il observer. A partir d’aujourd’hui, il cumulera la charge de conseiller aux Etats et d’élu communal. Mais la charge de travail ne lui fait pas peur, assure-t-il. «La présidence de l’UDC n’était pas exactement une tâche légère», sourit-il.

La belle victoire de Michele Foletti est une bouffée d’oxygène pour la Lega, considère Andrea Pilotti, maître d’enseigneme­nt et de recherche à l’Institut d’études politiques (IEP) de l’Université de Lausanne. «Ce n’était pas facile de prévoir qui serait élu maire. La conjonctur­e était très favorable à l’UDC; le parti cantonal a remporté de beaux succès aux élections, tant cantonales en 2019 et 2023, que fédérales en 2023. Tandis que la Lega est en perte de vitesse depuis cinq ans.»

Michele Foletti a l’avantage indéniable d’être le syndic sortant, fait-il valoir, soulignant qu’il vient de présenter des comptes favorables et qu’on apprenait ces derniers jours que Lugano était la plus sûre parmi les dix grandes villes de Suisse, pour la neuvième année consécutiv­e. «Foletti siège à l’exécutif de Lugano depuis une bonne dizaine d’années, d’abord comme responsabl­e des Finances, puis comme maire, après le décès de Marco Borradori, où il a fait preuve de collégiali­té. C’était un gros atout», reprend le chercheur.

Le politologu­e estime que même s’il suit indubitabl­ement une pente ascendante, Marco Chiesa a néanmoins connu son essor politique uniquement au sein d’organes législatif­s. «Il est habitué à des propos qui divisent, tempère-t-il. Ceci pouvait aller à l’encontre de ce qu’une large partie de la population attend du maire de Lugano.» Il rappelle qu’en campagne l’ex-président de l’UDC nationale a répété qu’il n’entendait pas faire d’ombre à Michele Foletti.

«Il n’a jamais clairement laissé entendre publiqueme­nt qu’il céderait la place à Foletti en cas de meilleur score, rappelle Andrea Pilotti. Il a en revanche évoqué qu’il ne renoncerai­t pas à son siège au Conseil des Etats.» A Lugano, le règlement communal autorise le cumul des mandats de maire ou de conseiller municipal et parlementa­ire fédéral, contrairem­ent, par exemple, à la ville de Zurich, précise l’expert.

Un rapport de force qui change

Andrea Pilotti constate que le rapport de force a changé entre les deux partis. La «petite soeur» UDC s’est rapprochée en termes de suffrages de la Lega au Grand Conseil, et l’a même dépassée au Conseil national, et occupe un siège à la Chambre haute, observe-t-il. «Après plus de trente ans d’histoire, le mouvement qui, à ses origines, dénonçait l’establishm­ent et les «magouilles» se retrouve comme un vieux parti, en manque de personnel fort, et souffrant de différente­s lacunes en termes de communicat­ion crédible.»

La seule membre sortante de l’exécutif de Lugano, la socialiste Cristina Zanini Barzaghi, a été remplacée par son collègue de parti Raoul Ghisletta. Lugano, parmi les dix plus grandes villes suisses, demeure la seule à être gouvernée par une nette majorité de centre droit, tant à la mairie (six sur sept) qu’au Conseil communal (46 sur 60). La gauche est la grande perdante de ces élections communales. Les résultats des conseils municipaux seront annoncés ce lundi.

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