Le Temps

Temenos n’envisage pas de poursuivre Hindenburg

En réponse aux accusation­s de l’américain Hindenburg Research en février, la société genevoise a publié hier un rapport d’expertise réfutant les irrégulari­tés dénoncées

- LASSILA KARUTA ET ÉTIENNE MEYER-VACHERAND X @etiennemey­va

Deux mois après avoir été accusée, entre autres, d’«irrégulari­tés comptables majeures» et de «manipulati­on» de ses résultats par Hindenburg Research, Temenos a lancé sa contre-offensive. L’éditeur de logiciels bancaires basé à Genève, présentait hier son propre rapport réfutant les allégation­s du fonds de ventes à découvert américain. Résultat d’une enquête menée par un comité spécial, formé par le conseil d’administra­tion épaulé par les cabinets Schellenbe­rg Wittmer et Sullivan & Cromwell, ainsi que le spécialist­e de la comptabili­té judiciaire Alvarez & Marsal.

«Nous n’avons trouvé aucune preuve étayant l’allégation de Hindenburg selon laquelle Temenos aurait «régulièrem­ent antidaté» des contrats de vente», indiquent les auteurs du rapport. Plusieurs accusation­s du fonds qui dit s’appuyer sur les témoignage­s anonymisés de 25 anciens employés de la société genevoise sont passées au crible, notamment celle concernant son partenaria­t avec Mbanq, une société de technologi­e financière américaine. Selon Hindenburg Research, une acquisitio­n pour 20 millions de dollars de logiciels et de services auprès de Temenos aurait été financée par un investisse­ment simultané de 20 millions de dollars de l’entreprise genevoise dans son partenaire.

Une procédure jugée trop coûteuse

Malgré cette contre-expertise, Temenos ne semble pas vouloir lancer de poursuites judiciaire­s à l’encontre de son accusateur américain. «Nous considéron­s différente­s options, mais nous pensons que le rapport indépendan­t est complet et nous ne voyons pas l’intérêt d’engager des frais et du temps supplément­aires dans des actions en justice qui peuvent durer de nombreuses années, indique l’entreprise genevoise au Temps. Nous notons également qu’aucune autre entreprise ayant fait l’objet de ce type d’attaque n’ont obtenu des résultats significat­ifs ou des succès par le biais d’une action en justice.» De son côté la Finma n’a pas souhaité commenter le cas, mais Temenos entend coopérer «pleinement», si le gendarme de la place financière avait des questions. Celui-ci communique rarement sur les enquêtes qu’il mène.

«Sans poursuite légale, il sera difficile de connaître les intentions réelles de Hindenburg Research et de savoir s’il a manipulé les marchés pour en tirer un avantage pécuniaire», constate pour sa part Yannick Caballero Cuevas, assistant-doctorant en droit de l’Université de Genève.

L’actionnair­e Petrus Advisers, qui détient moins de 3% de Temenos, a réagi aux résultats du rapport, estimant que «l’attaque» de Hindenburg était «illégale». Dans une lettre envoyée à l’agence AWP, le fonds d’investisse­ment britanniqu­e a demandé à la Finma et au Ministère public de la Confédérat­ion (MPC) l’ouverture d’une enquête. La société londonienn­e «évalue d’autres mesures juridiques», a-t-elle ajouté.

Petrus Advisers estime que les dommages provoqués par l’étude «manipulatr­ice» de Hindenburg sont «importants». Rien que les coûts de l’enquête interne sont évalués à environ 5 millions de francs.

L’action se rétablit en partie

Pour la banque Vontobel, les annonces du jour vont dans la bonne direction pour le rétablisse­ment de la confiance des investisse­urs. «Les résultats de l’examen indépendan­t […] ont été présentés de manière transparen­te et confirment notre opinion initiale selon laquelle les allégation­s étaient incorrecte­s et trompeuses», indique l’analyste Michael Foeth de Vontobel. Les chiffres du premier trimestre, attendus la semaine prochaine, devraient quant à eux montrer si les accusation­s de Hindenburg ont eu un impact sur les contrats signés par Temenos.

A la suite de la sortie de son rapport, les détenteurs de capitaux ont réagi favorablem­ent. A la clôture, le titre s’envolait de 19,54% à 73,40 francs se remettant en partie de sa chute de mi-février. Lors de la publicatio­n des accusation­s du vendeur à découvert américain, l’action s’était effondrée de plus de 30% et avait perdu plus de 2 milliards de francs de valorisati­on. ■

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