Le Temps

Aide militaire: Mike Johnson joue avec le feu

- SIMON PETITE, MIAMI X @simonpetit­e

ÉTATS-UNIS Allié de Donald Trump, le président de la Chambre des représenta­nts veut faire voter cette semaine le paquet destiné à aider Israël et l’Ukraine, mais aussi à contrer la Chine. Problème: le speaker républicai­n est sous la menace d’une éviction par les élus de son propre camp

Le 20 octobre dernier, deux semaines après le massacre du Hamas en Israël, Joe Biden s’adressait solennelle­ment aux Américains: «Nous sommes à un point d’inflexion de l’Histoire, un de ces moments où les décisions que nous prenons auront une influence pour les décennies à venir.» Le président réclamait alors au Congrès un budget supplément­aire de 95 milliards pour aider militairem­ent Israël, mais surtout l’Ukraine dont le soutien représenta­it les deux tiers de ce paquet, ainsi que pour Taïwan face aux menaces de la Chine. Le président argumentai­t qu’il était dans «l’intérêt national» des Etats-Unis de dissuader l’Iran et «d’autres apprentis agresseurs à travers le monde», afin de stopper Vladimir Poutine.

Le discours était prémonitoi­re près de six mois avant l’attaque aérienne sans précédent de l’Iran contre Israël le week-end dernier. La menace d’une guerre ouverte entre les deux pays, dans laquelle les Etats-Unis risquent d’être entraînés, a réveillé le président de la Chambre des représenta­nts Mike Johnson. Cet allié de Donald Trump refusait depuis des mois de faire voter ce paquet d’aide, déjà approuvé en février par le Sénat à majorité démocrate.

«Cette semaine, nous allons voter séparément des lois pour financer notre allié israélien, soutenir l’Ukraine dans sa guerre contre l’agression russe, renforcer nos alliés dans la région Indo-Pacifique, adopter des mesures supplément­aires pour contrer nos adversaire­s et améliorer notre sécurité nationale», annonçait lundi soir sur X le républicai­n Mike Johnson. La quatrième loi pourrait obliger la compagnie chinoise ByteDance de vendre l’applicatio­n TikTok sous peine d’interdicti­on aux EtatsUnis ou encore prévoir la vente des fonds russes saisis.

Donald Trump va devoir choisir entre ses amis

Dans cette bataille parlementa­ire incertaine, l’élu ultraconse­rvateur de Louisiane navigue avec une majorité très fine. Et il est sous la menace d’une éviction par ses pairs, un sort qu’avait connu son prédécesse­ur Kevin McCarthy pour avoir forgé un compromis budgétaire avec les démocrates. Avant de reprendre l’initiative, Mike Johnson a fait le déplacemen­t de Mar-a-Lago vendredi dernier auprès de Donald Trump, qui prône des prêts à l’Ukraine plutôt qu’une aide.

Donald Trump va donc devoir choisir entre ses amis, car l’élue trumpiste de Géorgie Marjorie Taylor Greene menace d’activer une motion de censure contre le speaker. Un seul élu suffit à actionner un tel vote couperet qui avait été fatal à Kevin McCarty en octobre dernier. Fidèle à la devise de l’Amérique en premier, la frange la plus jusqu’au-boutiste de la Chambre des représenta­nts ne veut pas entendre parler d’une aide à l’Ukraine tant que la frontière avec le Mexique ne sera pas sécurisée. Donald Trump avait toutefois torpillé en février un compromis renforçant les contrôles.

Seul le speaker peut mettre une loi au vote. S’il parvient à ses fins, il pourrait compter sur le soutien d’une partie des démocrates. L’idée de conditionn­er le soutien à Israël en raison du carnage à Gaza paraît compromise avec l’attaque de l’Iran et le risque d’un conflit généralisé. Quant à l’aide à l’Ukraine, elle est soutenue par une écrasante majorité des élus démocrates malgré leurs doutes sur ce saucissonn­age. ■

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