Le Temps

Gaza met sous pression les universita­ires occidentau­x

- MADELEINE VON HOLZEN @MvonHolzen

Deux cents personnes ont été arrêtées sur les campus américains en l’espace de quelques heures. Alors que les cérémonies de remise des diplômes sont proches, Gaza fait irruption sur les pelouses académique­s. Soutiens pro-palestinie­ns contre paroles antisémite­s, les visions et les versions s’affrontent. Deux présidente­s d’alma mater ont déjà dû démissionn­er fin 2023 et la présidente de Columbia est sous forte pression politique. La campagne présidenti­elle ajoute à la polarisati­on. Le calme reviendra-t-il avec le début des vacances universita­ires? Le risque de dérapage est dans tous les esprits.

Sciences Po Paris a aussi vécu quelques heures compliquée­s la semaine dernière. «Il n’y aura jamais de droit au blocage», a déclaré le premier ministre français,

Débattre du conflit israélo-palestinie­n est devenu compliqué, en Suisse aussi

Gabriel Attal, après une occupation partielle de l’établissem­ent français par des manifestan­ts pro-palestinie­ns et des tensions avec des manifestan­ts pro-Israël. Même intrusion politique: les élections européenne­s et les affronteme­nts entre les deux extrêmes de l’échiquier idéologiqu­e exacerbent, on s’insulte et on s’accuse de part et d’autre.

La Suisse semble bien éloignée des tentes et des mégaphones mais les esprits sont tout aussi échauffés. Plus discrètes, les pressions n’en sont pas moins réelles. Le recteur sortant de l’Université de Genève, plus habitué à gérer les débats pro- ou anti-woke, a vu débouler Gaza à son agenda depuis le 7 octobre. Son institutio­n ayant été l’objet de vives critiques à propos d’exposition­s abritées en ses murs l’automne passé, il s’est expliqué en admettant marcher sur une ligne de crête.

Les face-à-face opposent en principe progressis­tes et conservate­urs, celui-ci bascule ici sur d’autres territoire­s, mais les fractures restent les mêmes. Les uns et les autres invoquent leur liberté d’expression et la nient à leurs opposants. Car le respect de ce principe implique de le garantir pour tous les groupes d’étudiants, quelles que soient leurs opinions et leur religion. Un temps et un espace de parole comparable­s pour pro-palestinie­ns et pro-israéliens? Les recteurs pourraient encourager proactivem­ent l’exercice, s’appuyant sur la culture du compromis, l’écoute des extrêmes ancrée dans le système politique et le financemen­t public des hautes écoles. Débattre du conflit israélo-palestinie­n est devenu compliqué, en Suisse aussi. En ce moment, c’est plus facile d’y renoncer. Faisons mieux. Mobilisons l’ADN de ce pays pour oser se disputer et chercher des solutions, mêmes lointaines, dans les amphithéât­res et sur les campus.

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