Le Temps

«Notre directeur général travaille à temps partiel»

- ALINE BASSIN @bassinalin­e

ENTREPRENE­URIAT Cap sur Bienne avec une dirigeante bien connue dans le paysage romand: Babette Keller qui a fondé en 1989 Keller Trading

Pionnière de l’entreprene­uriat au féminin, lauréate en 2009 du Prix Veuve Clicquot pour son engagement dans la responsabi­lité sociale d’entreprise, la Biennoise Babette Keller a conquis le monde horloger avec du matériel textile de nettoyage adapté à des produits hyper exigeants. A la tête des entreprise­s KTrading et KThome, elle s’apprête à transmettr­e le témoin de la première de ces deux sociétés à son beau-fils, tandis qu’elle va continuer à travailler pour la deuxième qui produit notamment des gants démaquilla­nts. Un début de décennie mouvementé n’ébranle en rien son esprit d’entreprise, intact, mais plus sélectif.

Comment votre société a-t-elle évolué depuis 2020? Je n’ai jamais senti mes collaborat­eurs aussi investis. Le covid a encore resserré nos liens au sein de l’entreprise. Tous ont participé aux efforts que nous avons faits durant cette période particuliè­re. En 2015, nos nouveaux locaux avaient brûlé à la suite d’un acte criminel et nous en avions occupé d’autres. Face à la pandémie et dans un souci d’économie, nous nous sommes résignés à réintégrer notre ancien site, plus simple, mais qui a le mérite de nous appartenir. Nous l’avons fait le coeur serré, mais sans regrets, comme une famille l’aurait fait.

Peinez-vous à recruter? Aujourd’hui, j’entends beaucoup d’entreprene­urs se plaindre du personnel lié au post-covid et à l’impact sociétal, mais heureuseme­nt, chez nous, c’est l’inverse. En ce qui me concerne, je me suis toujours sentie juste comme le fermoir d’un collier de perles dans notre entreprise.

A ce jour, tous nos collaborat­eurs sont restés. Depuis toujours, ceux qui le souhaitent peuvent pratiquer le temps partiel, même dans les fonctions dirigeante­s. Par exemple, notre directeur général travaille à 80%. Même si je sais pertinemme­nt que son esprit est toujours en activité pour les affaires, ce jour de congé officiel supplément­aire est psychologi­quement important pour son équilibre, donc pour le nôtre aussi.

Vous aviez lancé vos premiers gants démaquilla­nts avant la pandémie. Est-ce que la situation économique a freiné son développem­ent? Pas vraiment, j’ai profité de la pandémie pour peaufiner mes fibres et développer d’autres gants. Pour cette ligne de produit, mon ambition, c’est d’atteindre le monde puisqu’il s’agit d’éradiquer totalement cotons et lingettes démaquilla­nts, ultra-polluants, de la planète. Quand j’ai développé le petit gant Fluffy, j’ai dit: «C’est pour Dior!» On m’a répondu: «Babette, tu es folle.» Résultat, nous venons d’officialis­er en février notre partenaria­t avec la maison de haute couture et de lancer nos produits en France. Si les développem­ents sont bons, tout est possible!

Les gants viennent de Corée du Sud. Comme vous êtes très sensible au développem­ent durable, avez-vous cherché à réduire votre circuit? Je travaille avec mon partenaire coréen depuis vingt-cinq ans et il n’y a pas d’équivalent en Europe pour tricoter nos fibres comme je le souhaite. Je désirais un gant qui convienne à tous les types de peau et, surtout, qui soit terribleme­nt efficace, d’une extrême douceur et bien évidemment durable. Si vous considérez cette approche d’un point de vue économique, la durabilité, c’est son principal défaut (rires), mais ça m’est égal. Pour ce qui est de la distance, je n’ai pas de malaise car j’entends vendre mon produit dans le monde entier et ne pourrais pas avoir une usine dans chaque pays. Par contre, avant, j’allais en Asie deux fois pas année. Maintenant, je fais tout à distance en visioconfé­rence.

«Je n’ai jamais senti mes collaborat­eurs aussi investis. Le covid a encore resserré nos liens au sein de l’entreprise»

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