«On constate un bond en avant dans l’acceptation des solutions proptech»
LE DIRECTEUR DE SWISSPROPTECH, RÉSEAU D’INNOVATION DE L’INDUSTRIE SUISSE DE L’IMMOBILIER ET DE LA CONSTRUCTION, ANALYSE LA FORTE CROISSANCE DU SECTEUR.
Quel est l’état des lieux de la proptech en Suisse?
Le nombre d’entreprises actives continue à croître. Notre dernière étude, réalisée l’an dernier avec Credit Suisse, a recensé plus de 300 solutions proptech en Suisse. Le secteur se trouve désormais dans une phase de croissance et devrait bientôt entamer une période de consolidation. On en voit d’ailleurs déjà les premiers signes, comme par exemple l’investissement de la Mobilière dans Buildigo.
Quels sont les segments les plus prometteurs?
Il existe plusieurs tendances transversales qui vont s’imposer ces prochaines années. Cela concerne en premier lieu le développement de véritables écosystèmes numériques, à savoir des plateformes qui couvrent l’ensemble des besoins des clients, plutôt que de se focaliser sur une seule problématique. Autre tendance très forte: l’intérêt accru portant sur l’intégration des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Cela concerne d’abord l’aspect environnemental, avec l’intégration de principes de «smart building» en matière de nouvelles constructions. Enfin, notre cartographie du secteur montre une croissance du nombre d’entreprises proptech dans le domaine des ventes.
Selon votre dernière étude, un petit nombre seulement des entreprises immobilières traditionnelles se montrent très réceptives à l’offre des start-up proptech. Pourquoi?
On peut établir un parallèle avec l’ascension d’Uber ou d’Airbnb, qui ont bouleversé l’industrie du transport et de l’hôtellerie. Les solutions développées par les start-up proptech sont innovantes et basées sur le numérique, cela crée un fossé générationnel avec les dirigeants d’entreprises traditionnelles, et évidemment aussi un rapport de concurrence. Mais on voit que la crise sanitaire a fait bouger les lignes. Il y a une année, les courtiers se sont retrouvés dans l’impossibilité de proposer des visites de leurs biens, et beaucoup se sont rapidement rabattus sur des visites virtuelles. Je constate que la situation a provoqué un bond en avant dans l’acceptation des solutions proptech. C’est une des raisons qui nous amènent à penser que les collaborations entre jeunes pousses et sociétés établies vont aller en s’intensifiant.
Comment la Suisse est-elle positionnée en comparaison internationale?
On peut citer deux chiffres parlants à cet égard: la Suisse compte, comme déjà dit, plus de 300 proptechs, ce qui représente une densité très forte par rapport à sa population. On y recense aussi plus de 50 investisseurs. A titre de comparaison, c’est trois fois plus qu’en Autriche.
Cette situation tient sûrement au fait que la Suisse occupe les premières places dans les classements mondiaux en matière d’innovation. La présence d’écoles de premier plan comme l’ETHZ ou l’EPFL joue aussi un rôle. On remarque d’ailleurs que les fondateurs issus de ces institutions intègrent les principes ESG dans l’ADN même de leurs projets entrepreneuriaux.