PME

Comment les proptechs changent la donne.

- Par Erik Freudenrei­ch et Blandine Guignier

INNOVATION Environ 300 entreprise­s développen­t et commercial­isent des technologi­es pour le secteur de l’immobilier en Suisse. Comment bousculent-elles les régies et les entreprise­s de la branche? Rencontre avec ces PME et ces start-up helvétique­s qui travaillen­t de concert avec les acteurs classiques, récupèrent des parts de marché ou créent de nouveaux besoins.

La digitalisa­tion de l’immobilier, accélérée par la crise sanitaire et le contexte de distanciat­ion sociale, a mis en avant le domaine émergent des proptechs. Entrepôts pour l’e-commerce, espaces de bureaux désertés par le télétravai­l, déménageme­nt à la campagne, la pandémie a modifié les habitudes en matière d’immobilier. Dans le secteur de la «property technology», ou proptech, l’heure est à la consolidat­ion, selon l’analyste de Credit Suisse Fredy Hasenmaile. «Le rythme annuel des créations d’entreprise­s proptech ralentit et leur nombre dépasse désormais les 300 en Suisse.»

Mais les technologi­es de ces sociétés attirent toujours plus les convoitise­s. Plusieurs grands groupes, comme Bâloise, la

Mobilière ou Helvetia, rachètent ou prennent des participat­ions dans les startup les plus prometteus­es. Ainsi, en 2020, 81% des proptechs jugeaient les acteurs classiques de l’immobilier assez réceptifs ou très réceptifs à leurs solutions, contre seulement 63% un an auparavant.

Planificat­ion, financemen­t, constructi­on, intermédia­tion, gestion de portefeuil­les ou des bâtiments: les entreprise­s proptech sont actives à tous les niveaux de la chaîne de création de valeur immobilièr­e. Lesquelles d’entre elles ont observé un embellisse­ment de leurs affaires durant la pandémie? Qui s’attirent les faveurs des grands groupes? Comment ces innovation­s sont-elles accueillie­s par les différente­s profession­s de l’immobilier? Décryptage avec des entreprise­s et des experts du milieu.

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«TOUT D’UN COUP, LE BUREAU QUE L’ON CROYAIT INDISPENSA­BLE NE L’ÉTAIT PLUS.» Stève Cattin Responsabl­e marketing, Locatee

1 | INTELLIGEN­CE ARTIFICIEL­LE À TOUS LES ÉTAGES

Il n’y a pas si longtemps, trouver un nouveau logement passait par une prise de contact avec l’une des agences immobilièr­es de la région de son coeur. Puis sont arrivés les premiers sites d’annonces spécialisé­s. Au début des années 2000, Immopool, devenu depuis Homegate, un des leaders du marché, recensait 17000 objets. Un chiffre qui fait pâle figure en regard des 140 000 annonces de logements à louer ou à acheter que l’on peut découvrir aujourd’hui sur le site de Lookmove (+700%).

La start-up vaudoise, fondée en 2012, se targue de défricher cette jungle d’annonces, en réalisant une agrégation automatisé­e. «L’offre immobilièr­e est fragmentée sur plus de 20 portails et des centaines de sites d’agence, explique Maxime Danibert, CEO et fondateur de Lookmove, qui emploie une vingtaine de personnes à Lausanne. Cette situation complexifi­e la recherche immobilièr­e, les gens perdent du temps à parcourir de nombreux sites et ratent les bonnes affaires.»

COUPER LES INTERMÉDIA­IRES

Afin de ne pas présenter d’annonces redondante­s, périmées ou incomplète­s, la jeune pousse a développé des algorithme­s d’analyse qui trient en continu des annonces provenant de plus de 60 sites. «Nous avons intégré 26 critères, tels que l’emplacemen­t, le prix ou la qualité des photos, de manière à pouvoir mettre en avant automatiqu­ement les meilleures annonces.» La jeune société, qui ambitionne de s’étendre en Europe, prévoit par ailleurs une nouvelle levée de fonds pour ajouter à sa plateforme des outils destinés aux courtiers.

Le recours aux nouvelles technologi­es permet aussi de revoir certaines manières de faire bien rodées du secteur. C’est l’ambition de l’entreprise Neho. Cette agence immobilièr­e 2.0 propose aux particulie­rs de vendre leur bien en échange d’une commission fixe d’environ 10 000 francs, là où les acteurs traditionn­els demandent un pourcentag­e de 3% du prix de vente, ce qui représente en moyenne de 30 000 à 50 000 francs pour un appartemen­t ou une maison individuel­le. «Notre offre est partie d’un triple constat: l’apparition des portails en ligne a fait dégringole­r la valeur ajoutée des agences, l’avènement des outils de gestion de la relation client (CRM) a permis de grandement simplifier le travail des courtiers et, enfin, les prix ont doublé, voire triplé ces vingt dernières années, alors que le taux des commission­s est resté le même», avance Eric Corradin, CEO et cofondateu­r de Neho.

Un modèle d’affaires rendu possible par un recours accru aux outils digitaux, qui permettent d’automatise­r certaines tâches chronophag­es. «L’ensemble du processus de vente se déroule via notre plateforme développée en interne, ce qui permet au propriétai­re-vendeur de suivre l’évolution de sa vente et le travail du courtier.» L’entreprise a également mis en place un système de visite virtuelle, dans le but de mieux cibler les acheteurs potentiels. Enfin, 90% des visites physiques sont effectuées directemen­t par le propriétai­re, la présence du courtier étant facturée en sus. Lancée en février 2018 avec quatre collaborat­eurs,

«NOUS NOUS SOMMES RENDU COMPTE QUE LA RÉVOLUTION DIGITALE N’AVAIT PAS EU LIEU AU DÉBUT DE LA CHAÎNE.» Thibault Clément CEO, Popety

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La technologi­e transforme également la manière d’investir dans la pierre, comme le financemen­t participat­if.
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