Une PME vaudoise rivalise avec Tesla.
A Colombier-sur-Morges, Freesuns développe des tuiles solaires sur mesure à l’esthétique particulièrement adaptée au patrimoine architectural helvétique.
Lorsqu’il commercialise pour la première fois ses tuiles photovoltaïques en 2016, John Morello n’imagine pas que le géant américain Tesla lancera la même année son «toit solaire» (Solar Roof). «Au début, nous pensions ne pas faire le poids face à cette concurrence, mais l’annonce de Tesla a finalement donné une visibilité inattendue à notre technologie et nous a ouvert le marché», glisse le fondateur de la PME vaudoise Freesuns.
C’est d’autant plus vrai que le Solar Roof de la société d’Elon Musk, régulièrement annoncé, tarde à débarquer en Europe. Les PME locales comme
Freesuns ont donc le champ libre pour développer leurs solutions.
UNE AUBAINE POUR
LES MONUMENTS CLASSÉS
Pour la société vaudoise, tout commence en 2014 lorsque John Morello s’installe à Colombier-sur-Morges. Le toit de sa maison d’architecte n’est alors plus étanche. Originaire d’Australie, l’ingénieur cherche donc à transformer la toiture en une surface produisant de l’électricité sur place. Mais l’esthétique du bâtiment ne permet pas la pose de panneaux solaires rectangulaires. En collaboration avec le centre suisse de recherche sur le photovoltaïque (CSEM), il développe donc une tuile solaire unique en son genre.
Munie de capteurs photovoltaïques invisibles, sa forme est identique à celle d’une tuile en fibrociment classique et sa couleur se rapproche du gris clair de l’ardoise. Cela lui permet de s’insérer avec esthétisme dans le paysage et de s’adapter à toutes les toitures, même celles des bâtiments classés, sur lesquelles il est normalement interdit, protection du patrimoine oblige, d’installer des panneaux solaires classiques.
En 2018, Freesuns a ainsi été mandatée pour équiper le toit de la petite maison du Grand Chalet de Rossinière, l’une des plus célèbres bâtisses
du Pays-d’Enhaut. Les 54 m2 du toit mis à profit génèrent aujourd’hui 4500 kilowattheures par an, permettant d’économiser environ 1500 kg de CO par an.
ÉNORME POTENTIEL
Freesuns travaille sur mesure et réagit rapidement aux demandes du marché et des architectes. Ses tuiles, de petite dimension et de formes variables, permettent de mieux composer avec les géométries rencontrées. «Elles peuvent être posées sur des toits où il aurait été impossible d’installer des panneaux solaires», souligne John Morello. Récemment, la jeune PME a recouvert l’entièreté de la toiture triangulaire d’une résidence privée de Genolier avec des tuiles solaires prédécoupées pour ce type de configuration, «ce qui représente sans doute une première en Suisse». En outre, grâce à la petite dimension des tuiles, la surface de toit couverte est plus importante, et donc l’énergie produite également.
Depuis son lancement, Freesuns a vendu 45 toits en Suisse romande, et une centaine de projets sont actuellement en cours de développement. Avec une croissance annuelle moyenne d’environ 50%, les astres semblent s’aligner pour la PME vaudoise et ses sept collaborateurs. «Le solaire a le vent en poupe, se réjouit Benoît Emery, responsable développement d’entreprise. Cette technologie est aussi favorisée par toute une série de subventions et de réductions fiscales qui la rendent très attractive pour les particuliers.»
Sur les 2 millions de toits que compte la Suisse, seulement 10% fonctionnent avec des énergies renouvelables. C’est dire à quel point le marché recèle du potentiel. Pour l’heure, Freesuns cible principalement les maisons individuelles et les bâtiments classés. Une niche où elle espère conquérir 1 à 2% de parts de marché dans les années à venir. Pour y parvenir, l’entreprise cherche actuellement des financements pour développer ses activités en Suisse alémanique. Elle commercialisera aussi bientôt une nouvelle tuile solaire colorée, imitant l’aspect terre cuite des tuiles que l’on retrouve communément sur les maisons du Plateau.