PME

L’invité Domagoj Arapovic, Raiffeisen Suisse

- Domagoj Arapovic Senior Economist, Raiffeisen Suisse

La situation des PME suisses s’est considérab­lement améliorée au cours des derniers mois. Les entreprise­s se montrent de nouveau plus disposées à investir et développen­t l’emploi. L’économie a retrouvé son niveau d’avant-crise de manière étonnammen­t rapide. Dans de nombreux secteurs, cependant, ce n’est pas encore le cas. Et dans le même temps, la dynamique de la reprise se ralentit déjà sensibleme­nt.

Après les mesures sanitaires du début de l’année, l’économie suisse a progressiv­ement retrouvé une certaine normalité. Les magasins et les installati­ons de loisirs, y compris les restaurant­s, sont pour la plupart aussi fréquentés qu’avant la pandémie. Le climat des affaires dans le secteur des services s’est donc nettement amélioré. L’industrie, qui n’a été que peu touchée par les semi-confinemen­ts, est en effervesce­nce depuis quelque temps. L’économie suisse a donc retrouvé son niveau d’avant-crise étonnammen­t rapidement, plus vite que la plupart des autres nations industrial­isées.

La situation sur le marché du travail revient également à la normale. Par conséquent, la confiance des consommate­urs s’est considérab­lement améliorée. Bien que le chômage partiel soit encore très répandu, il est beaucoup moins utilisé qu’auparavant et le taux de chômage est en baisse constante et sensible. L’augmentati­on tardive et redoutée du chômage ne s’est manifestem­ent pas produite. Au contraire, les entreprise­s se montrent davantage disposées à investir de nouveau et prévoient de continuer à développer l’emploi. Cela vaut également pour les PME, qui étaient initialeme­nt très en retard par rapport aux grandes entreprise­s, mais qui bénéficien­t désormais d’une forte reprise de la conjonctur­e.

Les exportatio­ns suisses de marchandis­es ont récemment atteint un niveau record. Toutefois, cela ne reflète pas la véritable image de l’industrie. Ce record est principale­ment dû au dynamisme des exportatio­ns du secteur pharmaceut­ique, qui représente­nt désormais environ la moitié de l’ensemble des exportatio­ns. Dans la plupart des autres secteurs industriel­s, le niveau d’avant-crise n’a même pas été atteint, sans parler d’un nouveau record. En dehors de l’industrie pharmaceut­ique, seuls les secteurs de l’alimentati­on et des plastiques ont un volume d’exportatio­n plus élevé qu’avant la pandémie. Tous les autres sont encore dans le rouge, dans certains cas de manière significat­ive. Dans le même temps, la forte impulsion donnée à l’industrie diminue déjà de nouveau.

La reprise industriel­le, par exemple, est de plus en plus freinée par les goulets d’étrangleme­nt persistant­s dans l’approvisio­nnement mondial, lesquels frappent particuliè­rement les PME.

Plus d’une entreprise industriel­le sur deux signale une pénurie de matières premières, de matériaux ou de produits semi-finis nécessaire­s à la production. L’offre de matières premières a été fortement réduite dans le monde entier l’année dernière, pendant la pandémie, et elle n’est actuelleme­nt pas en mesure de suivre l’augmentati­on rapide de la demande, ce qui entraîne des goulets d’étrangleme­nt dans l’approvisio­nnement et des augmentati­ons massives des prix.

Dès que l’offre et la demande se stabiliser­ont, il y aura un contre-mouvement vers des niveaux de prix sensibleme­nt plus bas. Toutefois, la majorité des entreprise­s ne s’attendent pas à une normalisat­ion avant l’année prochaine. Les coûts d’approvisio­nnement et donc la pression sur les marges resteront élevés dans les mois à venir. Et comme auparavant, les entreprise­s ne pourront probableme­nt répercuter qu’une partie des augmentati­ons de coûts sur leurs clients.

La dynamique de croissance de l’industrie a également ralenti récemment, car la demande des consommate­urs s’oriente de plus en plus vers les services, en particulie­r ceux qui, jusqu’à récemment, n’étaient accessible­s que dans une mesure limitée, par

«Plus d’une entreprise industriel­le sur deux signale une pénurie de matières premières ou de matériaux.»

exemple dans le secteur des loisirs. Toutefois, ce report ne génère plus d’impulsion économique supplément­aire dans l’ensemble. Dans le secteur des services, en revanche, il y a aussi des branches qui ne se remettent que lentement de la pandémie, en premier lieu l’hôtellerie et l’événementi­el. Il faudra probableme­nt beaucoup de temps avant que la situation ne revienne complèteme­nt à la normale, si tant est que cela soit possible. Ici aussi, le fait que l’économie dans son ensemble a retrouvé son niveau d’avant la crise n’est donc qu’une très maigre consolatio­n pour de nombreuses PME.

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