Télétravail: des employés fragilisés
LA PANDÉMIE A PRÉCIPITÉ LE PASSAGE AU TÉLÉTRAVAIL POUR DE NOMBREUSES ENTREPRISES. MAIS CE CHANGEMENT PRÉSENTE ENCORE DES FAILLES, NOTAMMENT EN MATIÈRE DE HARCÈLEMENT. TROIS QUESTIONS À MARIANNE FAVRE MOREILLON, EXPERTE EN DROIT DU TRAVAIL.
Quel est l’impact du travail à distance sur le risque de harcèlement?
Marianne Favre Moreillon: Dans le contexte du télétravail, les employés peuvent être fragilisés par l’ostracisme que ce mode de fonctionnement implique. Ils peuvent ressentir un sentiment d’isolement social, une perte de repères et sont ainsi encore plus exposés que d’ordinaire à une situation de harcèlement. De plus, la situation de travail à distance implique souvent moins de communication entre les collaborateurs. L’employeur perd aussi la connaissance de ce qu’il se passe.
Quelles seraient des situations typiques de harcèlement en période de télétravail?
Le risque est que le télétravail soit utilisé comme accélérateur de la part des employeurs pour éliminer des employés dont ils sont mécontents. Le supérieur hiérarchique pourrait, par exemple, faire de la rétention d’informations pour pousser à l’erreur un collaborateur en télétravail. Un autre type d’abus qui pourrait naître de la situation de collaboration à distance est la surveillance excessive. Un cadre qui se mettrait à suivre exagérément l’avancée du travail de ses employés en multipliant les e-mails et les coups de téléphone, notamment. Dans ce contexte, on pourrait aussi voir émerger des atteintes détournées à une personne, par exemple, en dévoilant une partie de la vie privée d’un collaborateur ou en faisant circuler des rumeurs au sujet de sa santé.
Quels conseils donneriez-vous aux employeurs pour éviter ce genre de dérives?
Il faut renforcer les mesures de prévention, qui doivent être mises en place contre le harcèlement dans toute entreprise. Le dispositif des personnes de confiance est d’autant plus important durant cette période et doit être disponible même à distance. Il peut également être utile de clarifier de nouveau les directives en matière de lutte contre le harcèlement pour tous les collaborateurs.