Microfinance et système financier
Le système bancaire et financier tunisien se caractérise aujourd’hui par la multiplicité des intervenants et une compartimentation rigide. Le secteur a toujours été très segmenté. L’ancienne loi bancaire, en instaurant plusieurs types d’agréments, a abouti au cloisonnement du système financier et bancaire.
Tous les observateurs avertis considèrent que notre secteur financier est en retard en termes de maturité et de compétitivité à l’international par rapport aux autres secteurs de l’économie tunisienne. Les besoins de financement des entreprises et les micro-entrepreneurs restent insuffisamment couverts. Ainsi les petites entreprises (moins de 50 employés) et les micro-entreprises (moins de 5 employés) qui représentent les 2/3 de la production et les 2/3 des emplois du secteur privé ne bénéficient que de 15% des concours bancaires alloués aux entreprises du secteur privé, en raison du manque d’intérêt des banques et de l’inexistence de produits et services adaptés aux besoins de ces entreprises. Pour combler cette carence, il convient donc de revoir en profondeur le cadre réglementaire et institutionnel de la sphère financière dans son ensemble et de se donner de nouvelles ambitions.
En dépit du fait que le système bancaire est parvenu à mettre en place, dans le pays, un réseau important de représentations et d’agences sur l’ensemble du territoire le rapport annuel sur l’inclusion bancaire et financière en Tunisie de l’année 2016 indique que le taux d’inclusion bancaire des adultes de plus de quinze ans est de 27 %, les femmes souffrant davantage d’exclusion financière que les hommes.
Au niveau régional, 10 gouvernorats sur 24 présentent un faible taux d’inclusion financière. Le potentiel de la Tunisie est considérable en opportunités en matière d’inclusion financière. Le pays doit encore surmonter des obstacles d’ordre structurel, moderniser l’usage des moyens et services de paiements et lever les contraintes majeures d’accès des entreprises aux sources de financement.
Le système bancaire classique tunisien est lui-même défaillant étant donné qu’il n’arrive pas à offrir des services financiers adaptés à toutes les catégories de la population - *73% de la population est non bancarisé et est exclu du système bancaire classique selon le dernier rapport de l’IACE sur l’inclusion financière.
A ce jour, le système financier tunisien n’a donc pas su tirer profit du développement exponentiel des nouvelles technologies dans l’amélioration du rendement et de la qualité des services bancaires.
Deux axes d’amélioration restent possibles
• Décloisonnement total des services financiers : il s’agit de permettre sur le plan réglementaire à une institution financière de distribuer tous les services financiers nécessaires augmentant le niveau de commodité au consommateur final tout en favorisant la compétition entre les institutions financières leur permettant à leur tour de bénéficier d’économie d’échelle que le mobile banking peut offrir.
• Digitalisation des transactions : amélioration de la qualité des services bancaires, l’utilisation des nouvelles technologies de la communication et le développement des services à distance par la téléphonie mobile qui permettra le decashing.
Pour ce faire, l’ensemble du secteur financier se doit de se préparer aux métiers de demain.
• Dans une banque, une IMF (Institution de Microfinance) ou même une assurance le système qui pourrait être proposé est le système expert. Ce dernier se basant sur une approche qualitative, en déterminant des règles de décisionnaires de manière empirique, en interrogeant des experts/responsables crédits sur leurs pratiques permettant ainsi de générer un ensemble de règles assorties de pondérations servira à décrire les caractéristiques de risque de l’emprunteur et à lui attribuer une note. Les principaux systèmes experts sont : 1) La méthode des ratios fondée sur l’analyse financière ; 2) La méthode des 5 C : capital de l’activité, caractère du bénéficiaire, collatéral ou garanties, capacité de remboursement et conditions du crédit et du marché.
Cette méthode est plus efficiente dans le sens où elle permet d’évaluer le risque dans toute sa globalité, même quand le client n’est pas bancarisé et n’est pas inclus dans la sphère financière classique.
Et dans une approche plus globale, destinée essentiellement aux IMF, il serait souhaitable que l’Etat puisse les encourager en créant des caisses de garanties pour limiter le risque.
• Mais également innover en matière de paiement en offrant des services financiers
digitaux, virements en temps réel, ou paiements instantanés à même de chambouler l’ensemble des pratiques du secteur financier dans les années à venir. Le process est déjà mis en place dans plusieurs pays dont, pour ne citer qu’un seul, le Kenya.
Une opération de modernisation du système financier est donc nécessaire pour garantir sa stabilité en se focalisant sur l’inclusion financière, la souplesse du cadre législatif et réglementaire, la bonne gouvernance et surtout la conformité aux standards internationaux.
On parle de plus en plus des Fintech dans le marché africain. Une émergence favorisée par le manque d’innovation du secteur financier classique, couplée à une forte adoption du mobile de la part des consommateurs africains, qui en font presque un assistant, que ce soit pour se renseigner ou faire des achats.
La finance digitale vient aujourd’hui concurrencer les acteurs traditionnels, essentiellement les banques et les assurances, en profitant des nouvelles habitudes du consommateur, pour leur proposer des services