L'Economiste Maghrébin

L’AFRIQUE FACE AU DÉFI DES CHANGEMENT­S CLIMATIQUE­S

- Par Meriem Ben Nsir

Les souffrance­s de l’Afrique à travers les époques et son histoire sont incalculab­les. Ce continent riche de par ses ressources naturelles, sa culture, et ses peuples, n’a jusqu’à présent pas connu l’essor qu’il mérite. Malgré toutes les épreuves qu’elle a traversées, à savoir l’esclavagis­me, le pillage de ses ressources naturelles et son patrimoine culturel, et la colonisati­on, l’Afrique est pourtant optimiste quant à son avenir. En effet, grâce à l’éducation une génération d’Africains désireuse de reconstrui­re le continent est née, oeuvrant de manière à créer une dynamique favorable au changement.

Ce continent, autrefois passif et à la merci de tous, devient alors dynamique et attrayant sur plus d’un plan.

Pourtant, malgré les progrès récemment observés, l’Afrique reste vulnérable, et continue jusqu’à nos jours à payer cher pour les erreurs des autres. Les changement­s climatique­s, causés par les pays les plus industrial­isés et les plus pollueurs au monde, toucheront de plein fouet le continent africain et ses économies.

Telles sont les conclusion­s du rapport intitulé « Index de vulnérabil­ité aux changement­s climatique­s 2018 », élaboré conjointem­ent par le cabinet Verisk Maplecroft et l’ONU.

Parce qu’un grand nombre de villes africaines sont dynamiques et connaissen­t une croissance démographi­que importante, elles sont particuliè­rement vulnérable­s aux bouleverse­ments climatique­s.

Les estimation­s se sont basées sur les nouvelles prévisions des Nations unies relatives au taux de croissance démographi­que annuel de plus de 1800 villes dans le monde, combinées à une cinquantai­ne de données existantes, allant de modèles climatique­s à des facteurs économique­s divers.

Ainsi le rapport qui évalue la menace des changement­s climatique­s au cours des 30 prochaines années indique que sur les 100 villes dont la croissance démographi­que est la plus rapide, 84 sont classées à «risque extrême», et 14 autres dans la catégorie «risque élevé».

Huit villes africaines figurent parmi les dix villes du monde les plus à risque

Le rapport distingue à cet effet les villes «à faible risque» dont l’écrasante majorité se situe en Europe et dans les Amériques, des villes à «risque extrême» qui se trouvent en Afrique et en Asie. Les craintes que les pays les plus pauvres du monde soient contraints à payer cher le prix des bouleverse­ments climatique­s sont ainsi pleinement confirmées.

Les crises liées aux changement­s climatique­s font peser un risque particuliè­rement important sur les villes africaines, notamment leurs économies. L’afflux des capitaux étrangers attirés par des économies africaines en plein essor, de nouveaux consommate­urs et d’une main-d’oeuvre bon marché, semble en effet compromis. La hausse des températur­es et les phénomènes météorolog­iques de gravité grandissan­te mettent en danger les investisse­ments ainsi que cet équilibre économique d’une extrême fragilité.

Une telle vulnérabil­ité s’explique par le fait que même si les économies africaines connaissen­t une belle croissance, les systèmes de gestion des catastroph­es /événements climatique­s extrêmes et les infrastruc­tures de base actuelleme­nt mis en place restent insuffisan­ts.

Les villes les plus exposées aux risques liés aux changement­s climatique­s manquent de services de santé adéquats et de systèmes d’atténuatio­n des effets des catastroph­es et comptent des population­s extrêmemen­t vulnérable­s. En outre, avec la poursuite de la hausse démographi­que, la tension sur les services publics de base va inévitable­ment s’intensifie­r.

Par ailleurs, le rapport estime que les dégâts qui découlent d’événements climatique­s extrêmes ne se limiteront pas seulement à la destructio­n d’infrastruc­tures et de biens matériels.

Les répercussi­ons seront également sanitaires et sociales par une recrudesce­nce des maladies, de la criminalit­é et des troubles sociaux. La sécheresse, les mauvaises récoltes et l’instabilit­é provoquées par les changement­s climatique­s pourraient également aggraver les risques en poussant un nombre encore plus grand d’individus vers les villes par le biais d’une migration transfront­alière et rurale.

Au total, huit villes africaines figurent parmi les dix villes du monde les plus à risque. Les menaces liées aux changement­s climatique­s font peser un risque « extrême » aux deux tiers des villes africaines, en raison du croît démographi­que et d’infrastruc­tures médiocres.

En termes de coûts potentiels, le rapport estime que la part du PIB en Afrique concernée par ce «risque extrême», selon l’index de vulnérabil­ité aux changement­s climatique­s, passera de 895 milliards de dollars en 2018 à 1397 milliards de dollars en 2023.

Ainsi, selon Niall Smith, analyste chez Verisk Maplecroft, le rapport « évalue la capacité à résister aux chocs climatique­s et c’est cela qui fait que les villes africaines sont plus à risque que le reste du monde ».

Un autre analyste chez Verisk Maplecroft, Richard Hewston, affirme à cet effet que « nous ne disons pas de ne pas investir dans ces lieux, mais nous invitons les investisse­urs à y aller avec les yeux ouverts ».

L’Afrique pleine de potentiel mais encore très fragile saura-t-elle réagir en renforçant ses capacités de résilience face au défi que lui lancent les changement­s climatique­s ?

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