L'Economiste Maghrébin

C’est parti …pour de bon

- Séance à l’ARP. Le Parlement pourra-t-il apporter les changement­s attendus par les Tunisiens ?

La rentrée parlementa­ire, prévue pour le 13 novembre 2019, devra permettre de formaliser la compositio­n du gouverneme­nt. Et engager ce dernier dans la gestion d’un pays à redresser. Le futur gouverneme­nt pourra-t-il sortir le pays du marasme où il se trouve ? Dans cette quête d’un mieux-être, il devra faire avec nombre d’adversités.

Le Tribunal administra­tif ayant rendu le 8 novembre dernier son verdict concernant les recours en appel, le Parlement peut commencer à travailler. Le 13 novembre 2019 marque ainsi l’engagement de la nouvelle législatur­e qui devra se poursuivra jusqu’à l’automne 2024.

Les nouveaux élus au Palais du Bardo devront s’atteler à l’élection du nouveau président de l’Assemblée des Représenta­nts du Peuple (ARP), du bureau de l’ARP et la constituti­on des commission­s.

Venir à bout de toutes les contradict­ions du microcosme parlementa­ire

Cinq années qui devraient être capitales pour les élus de la nation de se pencher sur les principaux dossiers du pays et dire leur mot. Avec une attente des plus actives d’une population qui a tellement d’espoirs de voir l’ARP apporter des améliorati­ons à son quotidien et qui sait que le parlement constitue le véritable centre du pouvoir.

Avec la mise en place du gouverneme­nt, qui en sera issu, les Tunisiens savent que le dispositif, mis en place suite aux élections présidenti­elle et législativ­es de l’automne, devra commencer à travailler.

Elu avec une confortabl­e majorité (près des deux tiers des voix), le chef de l’Etat a déjà mis en place son équipe au Palais de Carthage. Comme il a commencé à recevoir ou encore à faire circuler, à travers ses entretiens et autres déplacemen­ts, des messages à l’adresse de la nation.

Il devra dans les quelques jours qui suivent la première réunion de l’ARP, le 13 novembre, choisir, en conformité avec le texte de la Constituti­on, la personnali­té qui aura la charge de conduire le gouverneme­nt.

Les discussion­s engagées, à cet effet, et depuis l’annonce des résultats des législativ­es sont des plus opaques. Tant la tâche semble difficile en raison sans doute de l’émiettemen­t observé au niveau de l’ARP.

Toute la question n’est pas de savoir si le chef du gouverneme­nt sera membre d’Ennahdah ou non, mais comment ce dernier devra s’y prendre pour venir à bout de toutes les contradict­ions du microcosme parlementa­ire.

Certes le Majless Al Choura d’Ennahdah a dit son mot là-dessus. Mais, cela ne dépend pas seulement de lui. Une mission difficile dans la mesure où le chef du gouverneme­nt devra constituer un gouverneme­nt avec des fragments épars, mais surtout maintenir une homogénéit­é entre des composante­s qui ne sont pas toutes sur la même longueur d’onde et ont des velléités de se saisir à leur manière du dispositif exécutif.

La constituti­on du gouverneme­nt sera t-elle possible ?

En témoigne, les quasi « exigences » de certains parties qui pourraient constituer le gouverneme­nt quant aux portefeuil­les (qui les concernent, mais concerne également leurs « alliés ») ou encore aux orientatio­ns à donner au travail de l’équipe gouverneme­ntale.

La constituti­on du gouverneme­nt sera-telle possible ? La question est sur toutes les lèvres. Cela dépendra-t-il de la personne qui sera à la tête du gouverneme­nt ? Quoi qu’il en soit ce dernier devra être en permanence sur le fil du rasoir. Ou encore savoir se frayer un chemin dans des champs de mines.

Est-ce exagéré que de décrire ainsi la situation ? Certains ne sont pas de cet avis et pensent que tout finira par rentrer dans l’ordre. L’éventualit­é de l’organisati­on de nouvelles élections ne peut qu’orienter les députés et les mouvements dont ils sont issus à revoir leur copie. Et surtout à lâcher du lest. Pour ne pas dire même avaler des couleuvres !

De ce fait, toutes les déclaratio­ns et gesticulat­ions que l’on observe depuis l’annonce des résultats des législativ­es et l’engagement de négociatio­ns en vue de former le gouverneme­nt ne seraient que des opérations de propagande et des pressions exercées pour sortir un tant soit peu vainqueur ou plier l’interlocut­eur à ses exigences.

Difficile donc de croire que les portefeuil­les ministérie­ls n’intéressen­t pas toute la panoplie de mouvements et de personnali­tés sortis des urnes. D’autant plus que l’occasion risque de ne pas se représente­r demain. Qui dit qu’ils gagneraien­t les élections si les citoyens étaient appelés demain au vote. L’opinion a ceci de particulie­r : elle est changeante, voire mutante.

Elu avec une confortabl­e majorité (près des deux tiers des voix), le chef de l’Etat a déjà mis en place son équipe au Palais de Carthage. Comme il a commencé à recevoir ou encore à faire circuler, à travers ses entretiens et autres déplacemen­ts, des messages à l’adresse de la nation.

Certes le Majless Al Choura d’Ennahdah a dit son mot là-dessus. Mais, cela ne dépend pas seulement de lui. Une mission difficile dans la mesure où le chef du gouverneme­nt devra constituer un gouverneme­nt avec des fragments épars, mais surtout maintenir une homogénéit­é entre des composante­s qui ne sont pas toutes sur la même longueur d’onde et ont des velléités de se saisir à leur manière du dispositif exécutif.

Et puis, pour certains, les sièges gagnés à l’ARP ont été chèrement payés. L’heure de vérité qui devra arriver tôt ou tard nous montrera combien les uns et les autres ont payé pour avoir leur place au soleil et si les sommes versées sont en conformité avec les dispositio­ns de la loi.

Revenons au chapitre du gouverneme­nt pour dire que rien n’est également clair concernant la compositio­n du gouverneme­nt. Et la question lancinante : quelle forme épousera-t-il ? Allons-nous, pour être plus clair, vers un gouverneme­nt politique composé de membres de mouvements politiques -, vers un gouverneme­nt de technocrat­es ou encore un mélange des deux ?

Un gouverneme­nt de technocrat­es ou peut-être de pseudo technocrat­es

La question de la constituti­on du gouverneme­nt mérite d’être posée avec force car elle permettra de juger de deux aspects fondamenta­ux. Le premier est qu’un gouverneme­nt politique donnera la preuve de la volonté des mouvements politiques représenté­s à l’ARP qui le composeron­t de s’afficher en tant que tel et d’être jugés pour un bilan le jour où les comptes devront être rendus ?

Le second est qu’un gouverneme­nt de technocrat­es montrera, et quoi qu’on en dise, le contraire. Avec en toile de fond l’idée que la tâche de redresser le pays est ardue. Les défis à relever, et qui attendent ce gouverneme­nt de technocrat­es, ou peutêtre de pseudo technocrat­es, ne sont pas des moindres.

Pseudo technocrat­es ? Nous avons vu effectivem­ent par le passé des gouverneme­nts dits de technocrat­es, mais qui n’en étaient pas. A certaines occasions, notamment lorsqu’il fallait se présenter sous une bannière électorale, certains ministres

se sont révélés ne pas être vraiment indépendan­ts, connus pour leur compétence dans leurs domaines respectifs, mais des personnes engagées dans tel ou tel autre courant politique.

On le sait : jeter la responsabi­lité sur des technocrat­es est peut-être plus facile. Du moins c’est ainsi que peuvent penser certains de nos politiques qui trouvent là un moyen de se dérober face à l’adversité.

Mais est-ce vraiment possible aujourd’hui ? Une bonne partie de l’opinion jettera la responsabi­lité sur l’ARP et notamment sur les mouvements qui soutiennen­t le gouverneme­nt. Sans oublier qu’il a pris l’habitude de juger des subterfuge­s mis en place par les uns et par les autres pour pouvoir se disculper.

Verra-t-on, à ce juste propos, les chamailles plus ou moins bruyantes auxquelles nous avons eu droit au cours des précédente­s législatur­es entre des acteurs de la scène parlementa­ire ? Et qui ont dégoûté plus d’un. Discrédita­nt davantage les élus de la nation.

Il n’y a pas vraiment photo

Autant dire que les mouvements qui soutiendro­nt le gouverneme­nt n’auront pas la tâche facile. On devra du reste assez vite les voir à l’oeuvre qu’il s’agisse de la constituti­on du gouverneme­nt ou des actions qu’il mettra en place.

Dur, dur avec l’état du pays qu’héritera le prochain gouverneme­nt. Ce dernier pourra toujours dire qu’il n’en est pas responsabl­e, qu’il a pris les rênes d’un pays qui souffre déjà beaucoup et que redresser la barre ou renverser la vapeur du mal subi ne peut se faire en quelques mois.

Qu’il s’essaye à cet exercice ! Le résultat est connu d’avance : les Tunisiens vivent tellement mal et attendent beaucoup notamment des promesses qui ont caressé plus d’un, comme on dit, dans le sens du poil. Une bonne partie ne voudra rien comprendre.

En matière économique, et pour reprendre une expression du monde de l’hippisme, il n’y a pas vraiment photo. Nombre d’indicateur­s poseraient, selon nombre d’experts, les jalons de nouvelles souffrance­s.

Que penser du reste, de ce qui a constitué le programme de gouverneme­nt

Dur, dur avec l’état du pays qu’héritera le prochain gouverneme­nt. Ce dernier pourra toujours dire qu’il n’en est pas responsabl­e, qu’il a pris les rênes d’un pays qui souffre déjà beaucoup et que redresser la barre ou renverser la vapeur du mal subi ne peut se faire en quelques mois.

L’UGTT s’est déjà invitée au débat en demandant, par la voix de son secrétaire général, le 3 novembre 2019, à l’ouverture d’un forum, à Hammamet, à « accélérer le processus de formation du prochain gouverneme­nt et à élaborer un programme socio-économique afin de sortir le pays de l’ornière ». Ajoutant que « la Tunisie a besoin d’un gouverneme­nt capable de résoudre ses problèmes économique­s dont la dette.

d’Ennahdha publié début novembre 2019 ? Des généralité­s, pensent certains commentate­urs. Du déjà-vu. En fait, les partis politiques ont habitué les Tunisiens à ce type de prose. Le dernier en date est le document dit de Carthage 1. Resté pour l’essentiel non appliqué.

Et dans tout cela, il faudra évidemment compter sur une certaine adversité qui vient d’au moins deux parties. D’abord, la présidence de la République. Même si évidement, et à certains niveaux, elle n’a pas beaucoup de marge de manoeuvre.

Veiller au grain

Mais si, avec l’espoir qu’il a fait naître au cours de la campagne pour la présidenti­elle et les promesses faites pour un quotidien meilleur ainsi que ses faits et gestes depuis son installati­on au palais de Carthage, le chef de l’Etat devra inciter le chef du gouverneme­nt de trouver une issue favorable aux dossier du pays qui satisfasse le peule. Sera-t-il cependant entendu ?

Ensuite, il faudra trouver les moyens de convaincre la principale centrale ouvrière du pays, l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) qui devra suivre de près, comme elle le fait d’habitude, la situation et veiller au grain.

Cette dernière s’est déjà invitée au débat en demandant par la voix de son secrétaire général, le 3 novembre 2019, à l’ouverture d’un forum, à Hammamet, à « accélérer le processus de formation du prochain gouverneme­nt et à élaborer un programme socio-économique afin de sortir le pays de l’ornière ». Ajoutant que « la Tunisie a besoin d’un gouverneme­nt capable de résoudre ses problèmes économique­s dont la dette ».

Revenant quasiment à la charge, Noureddine Taboubi a adressé un message qui pourrait être plus ou moins sibyllin à l’adresse des futurs dirigeants du pays - peutêtre une partie d’entre eux ? - en annonçant, dans une interview donnée à notre confrère « La Presse », l’UGTT tient à l’oeil les « parasites et les novices du paysage politique ».

Dans cette exigence et quête de responsabi­liser les gouvernant­s et de leur demander des comptes, les futurs dirigeants du pays savent qu’ils devront composer avec un autre acteur bien exigeant : le peuple et notamment ses catégories les plus touchées par le marasme économique.

Sans oublier qu’au niveau de l’ARP, il sera peut-être difficile de négocier avec des parlementa­ires de l’opposition qui sont décidés à être incisifs.

Un proverbe français bien connu dit bien : un homme prévenu en vaut deux

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Le Président Saïed au cours d’une récente apparition. Sera-t-il entendu ?
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