Une opportunité pour doter le secteur d’une vision
L’Organisation mondiale du tourisme (OMT) a prévenu que, selon le moment auquel interviendra la levée des restrictions sur les voyages, les arrivées de touristes internationaux pourraient chuter dans des proportions comprises entre 60 et 80%. Autrement dit, entre 100 à 120 millions d’emplois sont menacés, et des pertes de 910 à 1 200 milliards de dollars au niveau des exportations, estime l’Agence spécialisée de l’ONU.
La Tunisie, destination touristique confirmée, n’a pas échappé à la règle. Elle va pâtir de la crise. Il y a lieu de signaler que depuis la fermeture, le 18 mars 2020 de toutes les frontières du pays, les recettes touristiques - après avoir connu un trend haussier depuis 2017 - ont amorcé un trend baissier. Ainsi, selon les statistiques de la Banque centrale de Tunisie (BCT), les recettes touristiques cumulées ont atteint, au 10 avril 2020, 963 millions de dinars (MDT) contre plus d’un milliard de dinars une année auparavant. Pour mémoire, l’année 2019 a été une année record avec l’entrée de plus de 9 millions de touristes et la réalisation de recettes de plus de 5,6 milliards de dinars.
Par sous-secteur, le président de la Fédération des Agences de voyages et de tourisme (FTAV), Jaber Ben Attouch avait indiqué dans une interview accordée à l’Agence TAP que l’impact de la pandémie du Covid-19 sur l’activité des agences de voyages sera énorme avec des pertes pouvant atteindre les 300 millions de dinars (MDT), sans compter le manque à gagner qui sera enregistré durant la haute saison.
Khaled Fakhfakh, président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), a affirmé, sur la chaîne TV privée Ettessaa, que «les quatre marchés classiques du tourisme tunisien, en l’occurrence l’Europe de l’Ouest, la Russie et l’Algérie, seront défaillants par l’effet du Covid-19». Il a été plus loin dans son pessimisme en minimisant un éventuel apport du tourisme intérieur lequel, au cas où il se manifesterait, ne représenterait que 10% du marché global (chiffre de 2019).
Deux lignes de crédit de 800 MDT pour soutenir la profession
Pour venir en aide aux hôteliers impactés par le coronavirus, le gouvernement a mis à leur disposition une ligne de crédit de 500 MDT. Cette enveloppe, annoncée le 20 mai 2020 par le ministre du Tourisme et de l’Artisanat, Mohamed Ali Toumi, a été débloquée pour permettre aux établissements hôteliers touchés par la pandémie de la Covid-19 de payer les salaires de leurs employés. Les entreprises qui vont bénéficier de ces crédits sont celles dont le chiffre d’affaires a enregistré une baisse de 25% au mois de mars 2020 par rapport à 2019, et un recul de 40% au mois d’avril 2020. En plus, cette mesure concerne uniquement les établissements hôteliers classés de 1 à 3 étoiles. Pour les hôtels 4 étoiles, le ministère va examiner leur situations au cas par cas (excepté les hôtels 5 étoiles).
Cette ligne de crédit, qui peut être assimilée à un fonds de garantie, sera accordée moyennant un taux d’intérêt bonifié
de 2%, sur une période de remboursement de 7 ans, et deux ans de période de grâce. En outre, elle est ouverte jusqu’au mois de mars 2021 et aucune saisie ne sera faite.
Concernant les sociétés opérant dans le secteur touristique, le gouvernement a mis en place une ligne de crédit de 300 MDT. Il s’agit de consacrer 50 MDT au profit des agences de voyages et 10 MDT à la disposition du secteur de l’artisanat pour fournir la liquidité aux artisans en leur permettant de payer les salaires au cours de la période mars 2020 – mars 2021.
Les professionnels réclament des mesures professionnelles
Les professionnels, en l’occurrence la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH) et la Fédération tunisienne des agences de voyages (FTAV) estiment, pour leur part, que les mesures prises par le gouvernement tunisien à ce jour sont insuffisantes pour sauver ce secteur, précisant que le secteur touristique mérite des mesures de soutien exceptionnelles.
Dans des communiqués rendus publics, ils affirment que « ces mesures ne répondent guère aux attentes et besoins immédiats des entreprises touristiques sinistrées ». La FTH a même parlé « de cadeau empoisonné ». Globalement, ils reprochent à l’aide financière de l’Etat quatre éléments :
Un, ils considèrent que « les conditions d’octroi de la ligne de crédit de 500 MDT mise à la disposition des hôteliers et leur éventuelle exécution par les banques sont compliquées et prendront du temps, ce qui ne résoudra pas immédiatement les problèmes de trésorerie urgents des entreprises touristiques ».
Deux, ils regrettent qu’ “aucune mesure n’a été prise pour reporter le paiement des cotisations sociales malgré un chiffre d’affaires à l’arrêt depuis janvier, février ou mars 2020, selon les cas.
Trois, ils relèvent que “le gouvernement a exigé le paiement immédiat de la totalité
EProtocole Sanitaire Anti-Covid 19 :
mode d’emploi
laboré par l’Office National du Tourisme Tunisien (ONTT), le “Protocole Sanitaire pour le Tourisme Tunisien Anti-Covid 19 ”, un ensemble de procédures sanitaires, prévoit une série de mesures qui se rapportent essentiellement au respect des règles d’hygiène et de sécurité sanitaire, afin de prévenir toute possibilité de propagation du Covid-19 dans le secteur touristique.
Ce manuel souligne l’impératif de ne pas dépasser 50% de la capacité maximale d’accueil de clients dans les hôtels, les restaurants, les salles de séminaires et de congrès, et dans les véhicules de transport touristique.
Il note, aussi, que la température de tous les clients sera contrôlée, moyennant un thermomètre infrarouge frontal, sans contact. En cas de fièvre persistante (plus de 38°), le client ne sera pas admis à l’hôtel et le service sanitaire sera contacté.
Par ailleurs, les bagages seront désinfectés à l’arrivée à l’hôtel, et chaque chambre sera nettoyée, désinfectée et des échéances fiscales et sociales comme condition pour pouvoir profiter des crédits d’exploitation, ce qui va alourdir selon eux les conséquences économiques et amener un grand nombre d’entreprises touristiques à mettre la clé sous la porte”. aérée, durant trois heures avant la remise des clés au client.
Le protocole exige, aussi, le port du masque pour le personnel hôtelier et les touristes à l’intérieur des véhicules de transport touristique, ainsi que la mise en place de distributeurs de gel hydroalcoolique dans chaque espace commun, ainsi qu’au sein des véhicules touristiques.
En ce qui concerne la distanciation physique, elle a été fixée à un mètre dans les espaces publics, les espaces communs de l’établissement touristique et dans les véhicules de transport touristique, et à 2,5 mètres entre les tables dans les restaurants, bars et cafés.
Pour ce qui est des piscines, le nombre de baigneurs a été fixé selon le ratio strict d’un baigneur par trois mètres carrés de piscine. Et avant d’accéder à la piscine, les baigneurs devront impérativement se laver au gel douche dans l’une des cabines extérieures mises à leur disposition n
Au moment où les professionnels tunisiens, frappés de plein fouet par la Covid-19 et désespérés de toute chance de relance, des voix se sont élevées à l’étranger pour leur donner espoir et les rassurer qu’ils ont les moyens de reprendre en toute quiétude leur activité. A cette fin, les Tunisiens sont appelés à faire prévaloir deux argumentaires, la qualité de la Tunisie en tant que destination confirmée et sa maîtrise de l’épidémie, deux atouts à même d’attirer les touristes les plus méfiants et les plus soucieux de préserver leur santé.
Les premiers à avoir émis de tels messages ont été, indéniablement, les Allemends. En pleine crise et à une période où des Européens tombaient par milliers par l’effet de la crise (marsavril 2020), le ministre allemand du Développement, Gerd Müller, avait déclaré que «des vacances en Afrique du Nord (Tunisie, Maroc, Egypte…) pourraient être envisagées cette année, à la seule condition de s’assurer du respect de règles d’hygiène». Cette condition n’est pas du reste nouvelle. Elle a toujours été exigée par les TO et les touristes allemands.
Avec cette déclaration optimiste, le ministre allemand apporte de l’eau au moulin des responsables des TO allemands qui ne veulent pas baisser les bras devant le coronavirus. Parmi ces responsables, figurent les prises de position du président de l’Association de voyage DRV, Norbert Fiebig. Ce dernier a notamment critiqué des déclarations des politiciens selon lesquelles “les vacances d’été devraient être annulées ou que cela n’était possible qu’en Allemagne”.
Vient ensuite un article de presse paru le 31 mai dernier, dans le célèbre magazine américain Forbes. Le magazine a dressé la liste des 7 pays qui ont « un potentiel de devenir une destination touristique majeure après la crise du Covid-19 ». La Tunisie fait partie de cette liste qui comprend l’Ethiopie, l’Iran, la Géorgie, la Birmanie, les Philippines et la Slovénie.
Deux jours après la publication de cet article, lors d’un entretien téléphonique avec le ministre du Tourisme et de l’Artisanat Zurab Pololikashvili, le secrétaire général de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) a salué les accomplissements de la Tunisie en matière de lutte contre la Covid-19, ajoutant qu’il s’agit d’un message rassurant adressé au monde prouvant que la Tunisie est une destination sécurisée.
Pour sa part, Saïd Boukhlifa, président de la Fédération nationale algérienne des agences de voyages et expert international en tourisme, a déclaré, le 2 juin dernier, sur les ondes de Radio Express FM, que les mesures prises par le gouvernement tunisien dont le « Protocole Sanitaire pour le Tourisme Tunisien anti-Covid 19 » sont rassurantes pour les touristes algériens. Il a estimé, au cours du même entretien, à 1,5 million le nombre d’Algériens qui pourraient passer leurs vacances, cet été, en Tunisie n