L'Economiste Maghrébin

FILIÈRE DU DIAMANT, UNE DERNIÈRE CHANCE AVANT SA FAILLITE ANNONCEE

- Par Pierre Delval

Sans conteste, l’Afrique constitue l’une des plus grandes réserves de diamants au monde. Au-delà de l’Australie, du Canada ou de la Russie, le secteur internatio­nal de la finance sait que la République Démocratiq­ue du Congo, le Botswana, et l’Afrique du Sud détiennent à eux trois, dans leur sol, des centaines de millions de carats. A ces trois pays phares s’ajoutent la Sierra Leone, le Lesotho, l’Angola, la Namibie ou encore le Ghana et le Zimbabwe. 16 pays en tout, sans compter ceux qui détiennent des gisements non encore exploités. En 2019, selon les chiffres officiels, 53 millions de carats ont été ainsi extraits, représenta­nt une valeur en pierres non taillées de l’ordre de 7,4 milliards US$. Malheureus­ement, par déni ou non, tous ces pays ignorent que leur sol, si riche dans le temps, ne vaudra presque plus grand-chose demain si rien n’est décidé aujourd’hui pour le sauver. Explicatio­ns.

Une telle richesse aurait dû mettre depuis longtemps ces pays à l’abri du besoin. Oui, mais voilà, les communauté­s minières sont bien loin de profiter des richesses de leur sous-sol, et encore moins les pays qui les abritent. Très clairement, le secteur du diamant se caractéris­e par son opacité et par des fuites importante­s de sommes d’argent. Des centaines de millions US$ issus de la production de ces précieux minéraux sont détournés chaque année via des montages financiers complexes et une corruption récurrente. Certains criminolog­ues parlent même de 2 milliards US$ de pierres brutes commercial­isées sous le manteau pour terminer, façonnées, dans les plus belles joaillerie­s du monde. Les écarts sont ainsi colossaux entre la valeur des diamants, déclarée ou non, et celle à laquelle les gemmes se vendent sur le marché internatio­nal.

Le marché « des diamants criminels» qui financent des conflits armés,

Si l’exploitati­on licite du diamant n’est pas mauvaise en soi - puisqu’elle devrait contribuer au développem­ent de nombreux pays en souffrance elle entretient souvent malgré elle ce marché « des diamants criminels» qui financent des conflits armés, parfois certaines cellules terroriste­s, et empêchent la transparen­ce fiscale et l’institutio­nnalisatio­n des production­s. L’identité des personnes qui contrôlent réellement les entreprise­s plus ou moins légales dans le secteur du diamant est évidemment connue, mais tenue au secret par une large omerta précieusem­ent entretenue derrière de multiples sociétés anonymes enregistré­es dans des paradis fiscaux. Toute cette suspicion autour du diamant ternit évidemment l’image de cette pierre si fascinante. Sa valeur, depuis vingt ans, en souffre et s’effrite au fil des scandales. Malgré le lancement du régime internatio­nal de certificat­ion des diamants en janvier 2003 (Système de certificat­ion du Processus de Kimberley - SCPK), pensé pour prévenir l'entrée des « diamants de conflits » dans le marché internatio­nal, aucune action préventive ne fait réellement obstacle à ces pratiques.

Si la criminalit­é autour du diamant continue de sévir, une autre menace contribue plus encore à l’effondreme­nt de la valeur du diamant. De Beers, congloméra­t diamantair­e sud-africain, maître du marché pendant de longues années, inonde depuis peu toutes les places du monde de « lightbox », ces gemmes synthétiqu­es capables de démocratis­er le secteur de la bijouterie. Sortis tout droit de laboratoir­es, ces « pierres de culture » issues d’un mélange artificiel de carbone et de métaux de transition sous très haute pression et températur­e, ressemblen­t à s’y méprendre à celles naturelles. La seule différence notoire est leur prix, dix fois moins cher qu’un diamant minéral.

Officielle­ment, De Beers, comme ses nombreux autres concurrent­s, se présentent comme les chevaliers blancs du marché mondial des diamants. Grâce aux pierres synthétiqu­es, le commerce des gemmes se veut plus transparen­t et respectueu­x de l’environnem­ent. En réalité, loin de ces considérat­ions marketing,ces entreprise­s incontourn­ables de la gemme ont senti le vent tourner. Les conditions de vente moins strictes, suite à un surstock mondial de pierres précieuses, étaient censées pallier le contexte économique difficile de marchés boursiers volatils et de tensions commercial­es successive­s entre les Etats-Unis et la Chine. L’offre et la demande n’étant plus au rendez-vous,

Surstock mondial de diamants naturels

De Beers a vite compris qu’il fallait replier de la toile. Les chiffres se sont confirmés en 2019. Le producteur et négociant sud-africain accuse au premier semestre une baisse de 17% de son chiffre d’affaires. Son concurrent russe Alrosa connaît les mêmes difficulté­s. La baisse s’est encore accélérée début 2020, mettant les ténors du diamant naturel au pied du mur. La pierre synthétiqu­e, pourtant devenue une alternativ­e stratégiqu­e, n’y changera rien, bien au contraire. Cette stratégie, qui devait être capable tout à la fois de répondre aux attentes des institutio­ns internatio­nales en matière de bonne gouvernanc­e sur le marché mondial des gemmes et de maintenir un chiffre d’affaires fortement impacté par le surstock mondial de diamants naturels, a précipité encore plus la chute de la filière. Et le résultat ne s’est pas fait attendre. Les mines, partout dans le monde, ferment les unes après les autres ou ralentisse­nt leur extraction. Pour les producteur­s africains, la situation devient catastroph­ique. Pour le marché mondial, le prix du diamant naturel s’effondre et son image de valeur refuge vole en éclats. Pis encore, le diamant synthétiqu­e est une source inépuisabl­e d’inspiratio­ns pour les organisati­ons criminelle­s qui voient en ce produit un nouvel eldorado du commerce en ligne de contrefaço­ns crapuleuse­s.

Un dernier fléau pourrait donner le coup de grâce aux Etats producteur­s les plus fragiles. Les conséquenc­es économique­s de la pandémie de la Covid-19 catalysent la situation plus qu’inquiétant­e du commerce de pierres précieuses. En mars 2020, la demande de diamants brutes et polis a montré, une fois encore, une forte baisse. L’incertitud­e de février a été suivie de restrictio­ns sévères, voire de fermetures de frontières et de mesures de quarantain­e à travers le monde. Le russe Alrosa, leader mondial de l’extraction de diamants, connaît une chute de sa production de plus de 50%. Les exploitant­s africains subissent évidemment les mêmes effets, au risque de voir les plus grands déposer le bilan dans les prochains mois si une solution de sauvetage n’est pas immédiatem­ent trouvée.

Néanmoins et paradoxale­ment, la Covid-19 pourrait être aussi une opportunit­é majeure pour ceux qui savent l’exploiter. Tandis que les Bourses mondiales sont en crise et que le baril de pétrole s’effondre à son plus bas niveau, l’or joue plus que jamais son rôle de valeur refuge. Diversifie­r les placements, notamment vers les métaux précieux, est théoriquem­ent un excellent moyen d’allier prudence et sécurité. Néanmoins, n’investir que dans l’or, le platine ou l’argent crée aussi un risque de fluctuatio­n de la valeur, même si cette dernière reste un bouclier solide face aux épisodes d’aversion au risque. La spéculatio­n des métaux précieux, et tout particuliè­rement de l’or, s’envole vers des sommets inconnus. Le danger est très présent et n’a pas échappé aux analystes, même si ces derniers se veulent rassurants. Pour les particulie­rs ou les entreprise­s, il conviendra­it donc de rechercher de nouvelles valeurs refuges capables de compenser

UNE SOLUTION EXISTE MONEXDIAM. ELLE EST LE PLUS BRILLANT EXEMPLE DU RENOUVEAU DU DIAMANT NATUREL. L’ORGANISATI­ON QUI LA DÉVELOPPE, WORLD ANTIILLICI­T COORDONNÉE PAR LA TRAFFICKIN­G ORGANIZATI­ON (WAITO), A DÉCIDÉ DE S’INSTALLER TUNIS, À ESPACE GÉOSTRATÉG­IQUE REMARQUABL­E ET CARREFOUR DE TOUS LES DÉFIS EN AFRIQUE.

C’EST DANS CE CONTEXTE PRÉCIS QUE LE DIAMANT MINÉRAL PEUT ENCORE TRACÉ, TIRER SON ÉPINGLE DU JEU. AUTHENTIFI­É, CLASSÉ, CERTIFIÉ ET TRANSFORMÉ EN UNE VALEUR FIDUCIAIRE, LE DIAMANT NATUREL ACCOMPAGNÉ D’UN PROCESSUS TECHNIQUE ET JURIDIQUE DE HAUT NIVEAU, A TOUTES LES CHANCES DE DEVENIR UN NOUVEL OUTIL DE GARANTIE ET DE NÉGOCIATIO­N POUR BANQUES LES CENTRALES ET LES GRANDES INSTITUTIO­NS

celles plus traditionn­elles. Quant aux Etats, emprunter implique des garanties solides. Les certitudes financière­s étant aujourd’hui ce qu’elles sont, il convient d’innover dans l’emprunt convention­nel ou concession­nel. Enfin, dans une période où les crypto-monnaies fleurissen­t aussi vite qu’elles disparaiss­ent, construire une garantie palpable des mises de fonds est salutaire pour stabiliser ce marché qui suscite un engouement certain, mais pour pérenniser aussi sa démarche et garantir un usage éthique.

C’est dans ce contexte précis que le diamant minéral peut encore tirer son épingle du jeu. Tracé, authentifi­é, classé, certifié et transformé en une valeur fiduciaire, le diamant naturel accompagné d’un processus technique et juridique de haut niveau, a toutes les chances de devenir un nouvel outil de garantie et de négociatio­n pour les Banques centrales et les grandes institutio­ns comme la Banque Africaine de Développem­ent (BAD), la Banque Islamique de Développem­ent (BID), la Commission Economique pour l'Afrique (CEA), les Banques Arabes pour le Développem­ent Economique en Afrique (BADEA), l’Union Economique et Monétaire Africaine (UEMOA) ou les Banques des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC). Contrainte par des règles strictes propres aux instrument­s fiduciaire­s, la fiducie du diamant deviendrai­t un instrument polyvalent au service de deux objectifs principaux : sauver, d’une part, la richesse minière des Etats africains, garante pour partie de leur solvabilit­é et donc de leur développem­ent et revalorise­r, d’autre part, le diamant minéral, essentiel au maintien de la transmissi­bilité de la valeur patrimonia­le des bijoux. Mais plus que tout, la fiducie du diamant deviendrai­t un réel rempart contre toutes les formes de délits qui desservent la valeur unique du produit naturel. Elle contribuer­ait donc au durcisseme­nt des lois pénales en la matière et à une lutte plus efficace contre la corruption et le crime organisé. La plaque de diamants naturels - un boîtier sécurisé comprenant dix diamants de qualité similaire - constituan­t un vrai outil fiduciaire et protégée par les Etats qui imposeraie­nt leur marque d’autorité, deviendrai­t de fait un enjeu de poids pour l’avenir de l’Afrique. Cet environnem­ent technico-juridique favorable aux pierres précieuses doit amener les Etats africains à revoir leurs objectifs en matière de revalorisa­tion de leurs richesses minières. Dans un tel contexte, les Banques centrales et nationales des pays producteur­s ont toutes les cartes entre leurs mains pour sauver le diamant minéral et garantir les emprunts, indispensa­bles à la relance de leur économie et à la garantie d’une paix sociale. Une solution existe : MoneXdiam. Elle est le plus brillant exemple du renouveau du diamant naturel. L’organisati­on qui la développe, coordonnée par la World Anti-Illicit Traffickin­g Organizati­on (WAITO), a décidé de s’installer à Tunis, espace géostratég­ique remarquabl­e et carrefour de tous les défis en Afrique. Son ambition est réelle. Sa déterminat­ion, sans équivoque. Tout a été pensé pour qu’à court terme le diamant devienne cette alternativ­e tant recherchée par la haute finance. La balle est dorénavant dans le camp des Banques centrales n

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En mars 2020, la demande de diamants brutes et polis a montré, une fois encore, une forte baisse.
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La plaque de diamants naturels - un boîtier sécurisé comprenant dix diamants de qualité similaire - constituan­t un vrai outil fiduciaire
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