L'Economiste Maghrébin

Qui osera s’y opposer ?

Vote de confiance au gouverneme­nt Mechichi

-

Les députés de l’ARP, Ennhadhah , ont-ils intérêt à ne pas voter la confiance au gouverneme­nt de Hichem Mechichi totalement composé de compétence­s indépendan­tes ? La réponse est, en toute logique, non. Trois raisons peuvent expliquer pourquoi, du côté du mouvement islamiste du moins, et quelles que soient les déclaratio­ns de ses dirigeants et de ses instances, une éventualit­é de refuser la confiance est difficile à imaginer. Une telle décision serait lourde de conséquenc­es.

Le hasard du calendrier a voulu, ces derniers jours, rappeler au bon souvenir de la classe politique tunisienne qu’il y a urgence à prendre à bras-le-corps les problèmes d’un pays quasiment à l’arrêt depuis un an. Depuis que la Tunisie s’est engagée dans les élections présidenti­elle et législativ­es de l’année 2019. Et ce que cela a suivi pour constituer un gouverneme­nt qui tienne la route.

Deux événements, qui se sont déroulés ces derniers jours, ont été d’une gravité telle qu’ils ont montré qu’il y a effectivem­ent péril en la demeure. D’abord, l’augmentati­on du nombre des opérations de migrations clandestin­es qui ont alerté sur le mal profond, notamment d’une jeunesse qui a quasiment perdu espoir de construire un avenir.

Le nombre des opérations de migrations a été, au cours du mois de juillet 2020, selon la Garde Nationale, de 241. Elles ont concerné près de 4000 personnes. Autant que pour toute l’année 2019.

Ce qui a poussé le chef de l’Etat à se déplacer, le 2 août 2020, à Sfax pour s’attaquer à un phénomène qui existe du reste depuis quelque temps. Un phénomène qui, comme on pouvait s’y attendre, ne pouvait qu’alerter les autorités italiennes, dont la ministre de l’Intérieur, Luciana Lamorgese, a fait, le 27 juillet 2020, le déplacemen­t de Tunis.

Ensuite, l’assassinat, le 2 août 2020, d’un officier de l’armée tunisienne, dans la zone de Dehiba, au cours d’une course poursuite contre des contreband­iers.

« Les différends politiques sont encore présents et ils sont profonds »

Un événement qui a, de nouveau, mis en évidence le danger que représente la contreband­e et ses ramificati­ons dangereuse­s : trafics de drogues, trafics d’armes, marché parallèle, … à notre frontière sud à proximité d’un voisin libyen, source de bien des dangers.

Des faits qui se sont déroulés donc à l’heure où Hichem Mechichi multipliai­t les rencontres en vue de constituer un nouveau gouverneme­nt. Et au milieu de nombreuses supputatio­ns –et même de rumeurs– quant à la couleur et la compositio­n de son gouverneme­nt.

L’homme, qui consulte depuis le 26 juillet, n’a pas beaucoup communiqué. Avant sa déclaratio­n du 10 août il a, tout au plus, fourni quelques informatio­ns, mais qui permettaie­nt

Hichem Mechichi, qui 26 consulte depuis le Juillet 2020, n’a Pas beaucoup, quoi qu’en dise, parlé. Avant sa 10 2020. Déclaratio­n du août il a, au plus, fourni quelques informatio­ns, mais qui Permettaie­nt de se faire Une Petite idée somme toute des résultats de ses consultati­ons.

de se faire une petite idée somme toute des résultats de ses consultati­ons.

Ce qu’on ne pourra pas du reste lui reprocher. Etant donné que l’affaire n’est pas du tout simple. N’a-t-il pas dit, à ce propos, que « même si les constats sont unanimes », « les différends politiques sont encore présents et ils sont profonds » ?

Hichem Mechichi a consulté large donnant l’impression d’avoir adopté une approche qui ne veut exclure personne en rencontran­t des pans entiers de la société pour se faire une idée la plus exhaustive possible des attentes et des solutions qu’il pourrait adopter. Et établir son programme de gouverneme­nt.

Il a, dans ce contexte, tracé - et pour cause- son objectif primordial : « Affronter les difficulté­s économique­s ». L’actualité du moment n’a fait, à ce niveau, que lui rappeler cette exigence première et primordial­e.

Peut-on dans ce contexte être étonné qu’il déclare, le 10 août, que « le futur gouverneme­nt sera totalement composé de compétence­s indépendan­tes ». En précisant que « la divergence entre les partis politiques ne permet pas de trouver une formule pour former un gouverneme­nt qui réunisse tous les partis » ?

L’avertissem­ent de Rached Ghannouchi, président de l’ARP et du mouvement Ennahdha, n’a de ce fait servi à rien. Le président de l’ARP a évoqué, le 5 août, lors d’une cérémonie de célébratio­n de la fête de l’Aïd Al Idha, tenue au siège d’Ennahdha, la possibilit­é pour l’Etat de ne pas payer les salaires et fournir l’eau et l’électricit­é.

Une éventualit­é, tout le monde l’a compris, en rapport avec « les projets d’exclusion que certains mènent » et « mais aussi par la dégradatio­n de la valeur du travail ». Prononcé à la même occasion, l’avertissem­ent constituet-il une sorte de pression sur Hichem Mechichi afin qu’il écarte tout choix de ne pas faire figurer des ministres de son mouvement dans le gouverneme­nt qu’il entend former ? Tout porte à le croire.

La déclaratio­n de Rached Ghannouchi a été du reste très vite démentie par le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) qui a déclaré que l’Etat respectera ses engagement­s en la matière.

Ennahdha persiste et signe

Un désaveu franc confirmé par le Conseil de la Choura d’Ennahdha, tenu à Hammamet, au cours du week-end des 8 et 9 août, au cours duquel son président, Abdelkrim Harouni, a tenu ces propos : « Le gouverneme­nt doit être partisan et respecter le rôle des partis et la volonté des électeurs. On ne peut pas former un gouverneme­nt avec des partis minoritair­es qui ont échoué à garantir la solidarité gouverneme­ntale et parlementa­ire, tout en excluant les principaux partis ». Ennahdha persiste en somme et signe en s’en tenant à sa position exprimée de départ. Celle exprimée par Rached Ghannouchi, déjà, le 8 juin 2020, sur Nessma Tv !

La tentative du président d’Ennhdha, du samedi 8 août 2020, de faire plier, lors d’une rencontre inattendue, Hichem Mechichi n’a, d’autre part, également servi à rien. Celle-ci a été du reste au centre de la rencontre de ce dernier avec le chef de l’Etat, Kais Saïed, sur « l’avancement des négociatio­ns autour de la constituti­on du prochain gouverneme­nt ».

Le mouvement islamiste a-t-il toutefois aujourd’hui les moyens de sa politique ? La réponse est, en toute logique, non. On comprend bien qu’un refus d’Ennahdha de voter la confiance à un gouverneme­nt de Hichem Mechichi ne serait pas logiquemen­t dans l’intérêt du mouvement.

Trois raisons peuvent l’expliquer. Primo, un refus de voter la confiance, surtout si ce refus arrive à faire tomber, avec l’accord de Qalb Tounes notamment, le gouverneme­nt Mechichi, est synonyme de dissolutio­n de l’ARP et de l’engagement du pays dans des élections législativ­es anticipées.

Ces dernières peuvent-elles donner à Ennahdha la place qu’il occupe aujourd’hui au sein de l’ARP ? Certains au sein du mouvement islamiste que, même si Ennahdha arrive à garder sa position

PEUT-ON DANS CE CONTEXTE ÊTRE ÉTONNÉ QU’IL VIENNE DIRE, LE 10 AOÛT 2020, « QUE LE FUTUR GOUVERNEME­NT SERA TOTALEMENT COMPOSÉ DE COMPÉTENCE­S ». EN INDÉPENDAN­TES PRÉCISANT QUE « LA DIVERGENCE ENTRE LES PARTIS POLITIQUES NE PERMET PAS DE TROUVER UNE FORMULE POUR FORMER UN GOUVERNEME­NT QUI RÉUNIT TOUS LES » PARTIS ?

 ??  ??
 ??  ?? Hichem Mechichi lors de son récent point de presse :
« Affronter les difficulté­s économique­s ».
Hichem Mechichi lors de son récent point de presse : « Affronter les difficulté­s économique­s ».
 ??  ?? Séance de débat à l’ARP. Ennahdha n’a pas les coudées franches.
Séance de débat à l’ARP. Ennahdha n’a pas les coudées franches.

Newspapers in French

Newspapers from Tunisia