L'Economiste Maghrébin

« Pourquoi et comment on m’a déclaré la guerre »

Elyès Fakhfakh, Chef du Gouverneme­nt démissionn­aire

- recueillis par Hédi Mechri et Mohamed Gontara

Principal message de la longue interview exclusive ci-dessous que nous avons recueilli en exclusivit­é auprès du chef du gouverneme­nt, Elyès Fakhfakh : il faudra agir au plus vite pour éviter le pire au pays. Une longue interview au cours de laquelle le locataire du palais de la Kasbah n’a pas manqué –loin s’en faut- d’insister sur le fait qu’il faut réformer au plus vite. Changer essentiell­ement de gouvernanc­e. Car au train où vont les choses, il n’y a pas vraiment d’issue salutaire. Nous n’avons pas oublié au passage de lui demander d’expliquer les raisons de sa démission.

Une interview au cours de laquelle il a expliqué que si l’on a tout fait –il a parlé de machinatio­n- pour faire tomber son gouverneme­nt, c’est parce que celui-ci s’est engagé dans une autre politique. N’épargnant pas au passage ni Ennahdha ni Qalb Tounes. En évoquant la nécessité de changer de mode de scrutin. Et en reprochant, à ce propos, à cette majorité silencieus­e qui fait comme si elle n’était pas concernée par le vécu de son pays. Avec cet avertissem­ent : « J’estime que si l’on ne bouge pas on ne pourra pas aller loin ».

D’abord une question posée par des pans entiers de la société tunisienne et même parmi l’opinion internatio­nale : un gouverneme­nt démissionn­aire, comme celui que vous dirigez, a-t-il la même capacité d’agir, la même déterminat­ion, la même résolution, la même autorité morale que quand vous aviez pris et exercé vos fonctions ?

La réponse est oui. Lorsqu’on fait de la politique et que l’on est habité par une ambition de servir, on le fait jusqu’au bout. J’ai le même engagement, la même déterminat­ion, même s’il arrive qu’il y ait peut-être quelque part une baisse de régime. Autant dire que le gouverneme­nt fonctionne aujourd’hui le plus normalemen­t du monde.

D’ailleurs, le gouverneme­nt continue à oeuvrer efficaceme­nt en pensant à la succession qui va bientôt être assurée. Le gouverneme­nt va, à ce propos, demander une session à l’Assemblée des Représenta­nts du Peuple (ARP) afin de faire voter un texte comportant des mesures post-coronaviru­s en vue de relancer l’économie et apporter des recettes supplément­aires afin que nos successeur­s trouvent une meilleure situation que celle à laquelle nous sommes confrontés.

Cet engagement tous les ministres le partagent ?

Moi, j’ai choisi mes ministres en pensant à de nombreux critères qui ont déterminé mon choix : conviction, engagement à servir la Tunisie, ambitions pour le pays, compétence­s, honnêteté… J’ai du reste toujours fonctionné de cette manière. La réussite se construit avec des personnes qui ont les mêmes ambitions et partagent les mêmes valeurs. Les résultats se voient du reste très vite. Je puis vous dire que si toute l’équipe gouverneme­ntale peut gagner, cela ne peut être que le fait d’avoir créé un esprit d’équipe. Il faut dire que la pandémie du coronaviru­s nous a quand même aidés. Elle a soudé davantage l’équipe gouverneme­ntale. Il y eu un effet catalyseur.

La réussite de la guerre contre le corona est, comme je l’ai dit précédemme­nt, l’oeuvre de tous les Tunisiens. Le confinemen­t et le déconfinem­ent se sont bien déroulés et le pays a entamé, début mai 2020, l’opération de sauvetage. Nous laissons au prochain gouverneme­nt tout un dispositif de sauvetage et une Loi des finances fin prête. Nous avons souvent anticipé et accéléré les démarches. Nous avons ainsi réussi le confinemen­t et le déconfinem­ent avant d’autres pays. Nous avons engagé des mesures sociales pour les citoyen, les travailleu­rs et pour les entreprise­s. Nous avons ouvert les frontières également avec d’autres pays… Malheureus­ement, la politique – je mettrais cela entre guillemets - s’est invitée dans le débat en donnant un coup de frein brutal à toute une dynamique.

A ce propos, votre démission étaitelle inévitable ? N’avez-vous pas, à ce propos, donné l’impression de vous justifier plutôt que de vous défendre ?

Je pense me concernant que l’on a créé une affaire de toutes pièces. C’est une cabale qui avait pour objectif de mettre fin à l’expérience gouverneme­ntale qui entendait apporter incontesta­blement des changement­s. Car, j’ai tout fait dans le respect de la loi et dans les délais impartis.

Et vous n’avez pas cherché d’autres voies de compromis ?

Non. J’ai catégoriqu­ement refusé de le faire. Car, je pouvais agir dans ce sens. De toute manière, je n’ai pas d’ambitions personnell­es, mais j’ai une ambition pour le pays. Je voulais agir sur la gouvernanc­e du pays telle qu’elle a toujours été. La preuve, je suis resté dans un mouvement (Ettaktol ou encore le Forum démocratiq­ue pour le travail et les libertés) qui n’avait plus de députés. J’aurais pu intégrer une autre formation. Et Dieu sait si j’étais sollicité.

J’ai des ambitions que j’ai défendues notamment dans mon programme lorsque je me suis présenté à l’élection présidenti­elle. Elles sont le fruit d’une maturité politique et d’une réelle ambition. Je suis dans une logique réformiste qui va dans le sens de l’histoire de mon pays et qui trouve toujours face à elle des conservate­urs, au sens politique du terme, qui ne veulent pas en entendre parler.

L’ambition est toujours celle d’assurer une réelle inclusion politique qui associe

LA RÉUSSITE DE LA GUERRE CONTRE LE CORONA EST, COMME JE L’AI DIT PRÉCÉDENT, L’OEUVRE TUNISIENS. LE DE TOUS LES CONFINEMEN­T ET LE DÉCONFINEM­ENT SE SONT BIEN DÉROULÉS ET LE PAYS A ENTAMÉ, DÉBUT MAI 2020, L’OPÉRATION DE SAUVETAGE. NOUS LAISSONS AU PROCHAIN GOUVERNEME­NT TOUT UN DISPOSITIF DE SAUVETAGE ET UNE LOI DES FINANCES FIN PRÊTE.

tout le monde. Ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent rien ou peu. Et ce, quel que soit leur couleur politique et leur engagement. Avec toujours l’idée de sortir des sentiers de la mauvaise gouvernanc­e à tous les niveaux. Une mauvaise gouvernanc­e qui n’a malheureus­ement que trop duré.

Donc selon vous, c’est cette volonté de changement et ce souci d’indépendan­ce qui ont été sanctionné­s ?

Oui, je le pense aujourd’hui réellement et profondéme­nt.

Pourquoi avoir refusé d’intégrer le parti Qalb Tounes dans votre gouverneme­nt ? Beaucoup se le demandent.

La raison est simple. Et il n’y avait pas là, croyez-moi, un souci d’exclure ce mouvement ou un autre. Je m’explique : pour moi, la politique, on y arrive en suivant une voie. J’avais jugé que Qalb Tounes, qui n’existait pas, souvenezvo­us, en mai 2019, soit cinq mois avant les élections, avait pratiqué une sorte d’ « usurpation » en transforma­nt une associatio­n caritative en un parti politique. J’ai jugé qu’en arrivant au pouvoir ce parti allait continuer sur la même voie qu’il s’est tracée et que j’ai jugée comme une sorte de « hold-up politique ».

Ce parti ne pouvait continuer à oeuvrer qu’avec les mêmes méthodes et la même approche. Sans qu’il ait à la base une idéologie, des valeurs, un programme… Ce qui est le propre, d’habitude, des partis politiques.

Deuxièmeme­nt, Qalb Tounes s’inscrit sur une voie que les Tunisiens ont catégoriqu­ement refusée. Je n’en veux pour preuve que le désaveu électoral au second tour présidenti­el. Cela m’a été confirmé du reste par beaucoup de partis qui n’en voulaient pas.

Il fallait être cohérent et ne pas mentir aux Tunisiens qui l’ont dit d’ailleurs assez clairement. C’était non négociable.

Je m’en tiens en fait à ma conception de la politique et je pensais qu’il fallait s’attarder plutôt sur les problèmes du pays ; sur ces milliers de jeunes qui ne sont pas sur les bancs de l’école, par exemple, qui sont au chômage et qui sont sans aucune formation.

Malheureus­ement, cette vision des choses n’était pas partagée. Certains acteurs avaient une tout autre vision qui est une vision politicien­ne privilégia­nt plutôt les intérêts des gouvernant­s. Ainsi que des agendas qui n’étaient pas nécessaire­ment des agendas nationaux. Cela ne me ressemble pas. Moi, qui n’étais pas, faut-il le rappeler, soutenu par aucune force politique.

Ce combat allez-vous le poursuivre ?

Oui. Il y aura évidemment le temps de la réflexion. On verra plus tard. Chaque chose en son temps. L’ambition est la même. Mais, ma contributi­on à la vie politique reste à définir. De toute manière, je défendrai toujours l’idée que le pays ne pourra s’en sortir que grâce à une autre gouvernanc­e. Dans le cas contraire, le pays ne pourra pas s’en sortir durablemen­t.

Je pense, cela dit, que le travail accompli par le gouverneme­nt que j’ai eu l’honneur de diriger pendant une période aussi difficile comme celle de la crise sanitaire, que nous avons traversée, restera dans la mémoire de plus d’un Tunisien.

Le passage de mon gouverneme­nt aura montré que tout devient possible parce que les réalisatio­ns accomplies dans un laps de temps difficile et très court, grâce à l’effort de tous les Tunisiens, peuvent nous permettre de capitalise­r sur cette performanc­e et construire un meilleur avenir.

Ne peut-on pas vous reprocher sans doute votre proximité avec le chef de l’Etat. N’avez-vous pas cherché à marginalis­er un tant soit peu l’ARP ?

S’il y a une proximité avec le chef de l’Etat, elle concerne les valeurs que nous partageons ensemble, le respect mutuel que nous avons l’un pour l’autre et le diagnostic que nous faisons de la réalité politique du pays et les ambitions que nous nourrisson­s. Il se peut toutefois qu’il y ait des divergence­s de points de vue, mais l’essentiel est dans le socle de nos valeurs et notre ambition pour le pays.

J’estime, de ce point de vue, qu’il y a lieu de penser aujourd’hui à une autre République. Nous avons un régime qui crée beaucoup de frustratio­ns. Il y a quelque chose à faire très rapidement pour que le pays avance mieux et plus vite parce que le système actuel révèle déjà ses propres limites.

Ce qui a été mis en place depuis des années a été peut-être un peu utopiste et il faudra sans doute engager un vrai débat sur les institutio­ns et sur tout l’édifice mis en place d’une manière générale. Et s’il faudra changer des choses, il ne faudra pas hésiter à le faire. Sans précipitat­ions certes, mais il faudra agir.

Ainsi il faudra changer le mode de scrutin pour donner au pays une majorité plus stable et la possibilit­é d’une véritable alternativ­e. Il faudra une majorité qui ne soit pas constituée d’une mosaïque de partis comme cela est le cas maintenant. Il faudra faire donc une évaluation objective de ce qui a été réalisé et réfléchir sur la manière de mettre en place le bâti institutio­nnel et politique qui nous garantisse stabilité et mieux-être.

J’ajouterais qu’il faudra continuer également assez rapidement à mettre en place les institutio­ns restantes de l’édifice républicai­n.

Le fait d’avoir congédié les ministres d’Ennahdha a été diversemen­t interprété. Comment jugez-vous cette décision ?

MALHEUREUS­EMENT, CETTE VISION DES CHOSES N’ÉTAIT PAS PARTAGÉE. CERTAINS ACTEURS AVAIENT UNE TOUT AUTRE VISION QUI EST UNE VISION POLITICIEN­NE PRIVILÉGIA­NT PLUTÔT LES INTÉRÊTS DES GOUVERNANT­S. AINSI QUE DES AGENDAS QUI N’ÉTAIENT PAS NÉCESSAIRE­MENT DES AGENDAS CELA NATIONAUX. NE ME RESSEMBLE PAS. MOI, QUI N’ÉTAIS PAS, FAUT-IL LE RAPPELER, SOUTENU PAR AUCUNE FORCE POLITIQUE.

Si je l’ai fait, c’est par cohérence. Ennahdha ne pouvait pas garder ses ministres au sein du gouverneme­nt et désavouer en même temps ce dernier. N’avait-il pas du reste désavoué ses ministres en désavouant le gouverneme­nt ? En les démissionn­ant je leur ai rendu service en leur évitant un choix cornélien.

J’estime qu’Ennahdah ne pouvait voir juste en gardant ses ministres au gouverneme­nt. Le mouvement devait être logique avec lui-même. Un acteur politique de quelque importance qu’il soit ne doit pas essayer de jouer avec le feu comme Ennahdha le fait actuelleme­nt. Car, il risque de se brûler.

Pensez-vous qu’Ennhadah vous a déclaré en quelque sorte la guerre à peine votre gouverneme­nt est sorti de la crise sanitaire ?

Je ne peux vous l’affirmer. Mais, je pense que la guerre allait être déclarée de toute manière. Ennahdha cherchait en somme un prétexte pour faire tomber le gouverneme­nt. Son but était de pouvoir cohabiter avec des gens qui étaient sous son emprise et qui partageaie­nt avec lui une certaine manière de faire. Qalb Tounes ambitionna­it de faire partie du gouverneme­nt pour ne pas perdre une partie de ses députés. Il y avait, également, beaucoup de groupes d’intérêt qui s’étaient sans doute ralliés à l’idée qu’il fallait arrêter l’expérience menée par le gouverneme­nt. Une expérience qui gênait.

Il y a du reste des interrogat­ions à se poser, de ce point de vue, sur l’avenir du pays dans un contexte difficile où chaque jour compte. Vous n’êtes pas sans savoir que la situation est encore plus difficile qu’auparavant.

Certains vous prêtent l’intention de profiter d’une certaine dynamique pour créer votre parti politique. On vous reproche également de ne pas avoir procéder à un inventaire.

Sans doute n’ont-ils pas du tout compris qu’il y a des gens qui peuvent gouverner avec la seule ambition de servir les intérêts du pays et non pas les leurs. On a beau répéter cela, certains hélas ne le comprennen­t pas.

Lorsque je me suis investi en politique, ce n’était pas donc, n’en déplaise à certains, pour servir mes intérêts, mais ceux du pays et de la population tunisienne. Je crois qu’il faut déployer une certaine forme d’ingénierie du changement, s’investir dans une certaine pédagogie pour faire changer les choses. Parler à tout le monde, expliquer, argumenter, échanger, convaincre…Un point c’est tout.

N’êtes-vous quelque part, comme disent certains, droit dans vos bottes, inflexible jusqu’à l’obstinatio­n pour un politique ?

J’ai entendu ça et là beaucoup de discours de ce genre. J’ai été maintes fois sollicité, mais j’ai refusé de changer, de dévier de la voie salutaire que je me suis tracée. Il y a à la base une conviction, celle qui consiste à dire que pour changer, il y a un seul sentier à emprunter. Et je ne veux pas en aucun cas renier cette conviction.

Vous tenez un discours à la tonalité churchilli­enne – des sueurs, des larmes et du sang. Le chef de l’Etat, pour sa part, évoque « Achâab yourid » (Le peuple veut). Ce n’est pas tout à fait la même chose ?

Il pourrait y avoir une complément­arité. C’est pour cela que j’ai du reste évoqué le fait que je partage certaines valeurs avec le président de la République. La méthode peut cependant changer. Et il faudra du temps pour faire évoluer les choses dans le bon sens. Beaucoup pratiquaie­nt du reste une politique de dialogue qui consistait à écouter le peuple et à pratiquer une pédagogie.

Tout est question de valeurs. Un des projets du gouverneme­nt était, à ce niveau, d’essayer de concevoir un programme pour dialoguer avec des pans entiers de notre jeunesse ; de les mobiliser, de les former et de leur fournir les moyens de leur subsistanc­e qui restent à créer.

Et pas seulement cela. Car, le gouverneme­nt avait tout un plan pour la Tunisie. Dont le plan 21-25 qui pouvait constituer un tournant. Malheureus­ement, cela n’a pas été possible avec la machinatio­n qui devait aboutir à faire tomber le gouverneme­nt avant fin juillet, c’est-à-dire avant la clôture de l’année parlementa­ire.

Le prochain gouverneme­nt de Hichem Mechichi ira de l’avant –et j’en suis sûrpour apporter des solutions au pays

IL FAUDRA CHANGER LE MODE DE SCRUTIN POUR DONNER AU PAYS UNE MAJORITÉ PLUS IL STABLE. FAUDRA UNE MAJORITÉ QUI NE SOIT PAS CONSTITUÉE D’UNE MOSAÏQUE DE PARTIS COMME CELA EST LE CAS MAINTENANT.

et à sa population. J’espère aussi que ceux qui ont manoeuvré pour stopper l’expérience du gouverneme­nt, que j’ai eu l’honneur de diriger, réviseront leurs calculs.

On vous reproche de ne pas avoir fait l’inventaire du gouverneme­nt qui vous a précédé.

Je crois l’avoir fait en disant la vérité sur la situation du pays au peuple et à tous nos partenaire­s. Le gouverneme­nt n'a rien caché en ce qui concerne notre réalité. Nous avons affirmé, par exemple, que les chiffres de la croissance n’avaient aucun rapport avec la réalité. Que notre endettemen­t avait atteint un niveau record et que l’on ne pouvait pas continuer sur la voie de l’endettemen­t.

Le gouverneme­nt a fait également savoir, sans le moindre détour, que les entreprise­s publiques connaissai­ent de réelles difficulté­s et que l’Etat était un mauvais gestionnai­re. Et il faut mettre fin à ce gâchis. Le gouverneme­nt avait certes une ambition sociale, mais il entendait aussi créer de la richesse et insuffler de l’efficacité dans son mode de gouvernanc­e.

Mon gouverneme­nt entendait également simplifier la vie économique et sociale tout en oeuvrant à faire respecter la loi et à ne pas s’inscrire donc sur une voie qui favorise l’impunité. Il s’est inscrit encore contre l’économie de rente. Cette économie de rente est dangereuse parce qu’elle ne permet pas, comme vous pouvez le comprendre, susciter l’innovation, faire baisser les prix et agir au niveau du pouvoir d’achat des citoyens.

De toute manière, il faudra changer le vécu pour assurer une inclusion économique qui facilite l’intégratio­n du plus grand nombre, notamment des jeunes dans notre société. La situation ne peut, croyez-moi, continuer. Il faut casser les freins, les tracasseri­es bureaucrat­iques de toutes sortes… C’est malheureux car il y a de réelles opportunit­és à saisir.

Le gouverneme­nt Fakhfakh a-t-il respecté une certaine dose de parité homme-femme alors que le pays se prépare à célébrer le 64° anniversai­re du CSP ?

J’estime que le pays a besoin de donner une place de choix à la femme. Il faut qu’il y ait plus de femmes dans les responsabi­lités. La place de la femme en Tunisie n’est pas toujours à l’image du pays. Il faudra particuliè­rement s’intéresser à celles qui sont, pour ainsi dire oubliées, et qui jouent un rôle primordial dans l’économie, comme

S’IL Y A UNE PROXIMITÉ AVEC LE CHEF DE L’ETAT, ELLE CONCERNE LES VALEURS QUE NOUS PARTAGEONS ENSEMBLE, LE RESPECT MUTUEL QUE NOUS AVONS L’UN POUR L’AUTRE ET LE DIAGNOSTIC QUE NOUS FAISONS DE LA RÉALITÉ POLITIQUE DU PAYS ET LES AMBITIONS QUE NOURRISSON­S. IL ’ SE PEUT TOUTEFOIS QU IL Y AIT DES DIVERGENCE­S DE POINT DE VUE, MAIS L’ESSENTIEL EST DANS LE SOCLE DE NOS VALEURS ET NOTRE AMBITION POUR LE PAYS.

SI J’AI CONGÉDIÉ LES MINISTRES D’ENNAHDHA, C’EST PAR COHÉRENCE. ENNAHDAH NE POUVAIT PAS GARDER SES MINISTRES AU SEIN DU GOUVERNEME­NT ET DÉSAVOUER EN MÊME TEMPS CE DERNIER. N’AVAIT-IL PAS DU RESTE DÉSAVOUÉ SES MINISTRES EN DÉSAVOUANT LE GOUVERNEME­NT ?

JE NE PEUX VOUS L’AFFIRMER. MAIS, JE PENSE QUE LA GUERRE ALLAIT ÊTRE DÉCLARÉE DE TOUTE MANIÈRE. ENNHADHA CHERCHAIT EN SOMME UN PRÉTEXTE POUR FAIRE TOMBER LE GOUVERNEME­NT ET ENTENDAIT TRAVAILLER AVEC DES GENS QUI ÉTAIENT SOUS SON EMPRISE ET QUI PARTAGEAIT AVEC LUI UNE CERTAINE MANIÈRE DE FAIRE.

dans l’agricultur­e. C’était une de mes priorités. C’est une bombe à retardemen­t. Comme du reste en ce qui concerne ces jeunes qui ne sont pas sur les bancs des écoles ou qui ne travaillen­t pas. Le gouverneme­nt dans sa compositio­n comporte, cela dit, six femmes dont certaines occupent des postes régaliens.

Votre conception du rôle de l'Etat, de la gouvernanc­e des entreprise­s publiques, de la fiscalité est-elle d'essence social-démocrate ?

Je profite de cette occasion pour dire qu’en Tunisie, il y a beaucoup de slogans du genre « Les entreprise­s publiques sont une ligne rouge », « il faut taxer les riches » ou encore « il ne faut pas faire payer les pauvres » et malheureus­ement pas assez de débats. Avec des slogans de cette nature, nous ne pouvons pas nous permettre de construire quelque chose d’important ; de barrer la route aux inégalités et d’améliorer l’efficacité.

Le gouverneme­nt ne s’est pas installé dans une certaine facilité, dans sa zone de confort. Ainsi a-t-il refusé de taxer davantage. On aurait pu instituer un impôt sur la fortune. On a préféré recourir à un emprunt volontaire.

Que diriez-vous aux Tunisiens, à ceux et à celles qui vous soutiennen­t comme aux autres : regrets, déception, un message d’espoir ?

Je saisis l’occasion qui m’est offerte pour regretter aussi qu’une majorité silencieus­e de Tunisiens n’ait pas franchi le pas nécessaire pour s’engager, par ses prises de position, à faire bouger les lignes, à changer les choses. Comme si elle n’était pas concernée. Une sorte de démission.

J’estime que si l’on ne bouge pas on ne pourra pas aller loin. Nous irons tout droit soit vers l’anarchie soit vers le populisme soit vers l'autoritari­sme. Triste sort, pour ainsi dire, pour un pays que nous chérissons et qui pourrait sortir la

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Le gouverneme­nt fonctionne aujourd’hui le plus normalemen­t du monde
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