Des microplastiques présents dans le sang humain
Il y a des catastrophes imminentes bien plus visibles que d’autres. Tandis que la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine ne cessent de faire la une des journaux et concentrent l’attention de tous, d’autres évènements tout aussi inquiétants sont malheureusement passés sous silence. C’est le cas d’un certain nombre de problématiques environnementales : bien qu’urgentes, elles ne suscitent pas l’intérêt qu’elles méritent.
Les rapports d’experts se succèdent et tentent tant bien que mal d’alerter sur la nécessité d’agir en urgence, notamment sur la question du changement climatique. De même pour la question des plastiques, qui reste encore en suspens malgré les nombreux appels des spécialistes à réduire leur production et à améliorer la gestion des déchets qui en découlent. Ceux-ci s’invitent partout où nous sommes, dans l’environnement qui nous entoure, nos espaces de vie, voire même nos assiettes. Les plastiques sont bien plus proches de nous qu’on ne le pense. Pour la première fois, des microplastiques ont été retrouvés dans des échantillons de sang humain. Cette découverte a été réalisée par une équipe de chercheurs néerlandaise de l’Université libre d’Amsterdam, qui a déterminé avec précision la concentration de plastique présent dans la circulation sanguine. L’analyse a été faite sur un échantillon de 22 volontaires en bonne santé, des microplastiques ayant été découverts chez 17 d’entre eux (soit 77% des cas).
« C'est la preuve que nous avons des plastiques dans notre corps - et nous ne devrions pas », a affirmé Dick Vethaak, écotoxicologue de l'université libre d'Amsterdam et auteur principal de l’étude. Cette découverte soulève certaines interrogations, notamment sur les conséquences de ces microplastiques sur la santé humaine. « Où cela se retrouvet-il (le plastique) dans notre corps ? Est-ce que cela peut être éliminé ? Évacué ? Ou est-ce retenu dans certains organes, peut-être en s'accumulant, voire est-ce que cela peut passer la barrière hématoencéphalique ? Et ces niveaux sont-ils suffisamment élevés pour déclencher des maladies », s'est interrogé Dick Vethaak, s’accordant avec d’autres experts sur l’importance de réaliser d'autres recherches sur l'impact possible sur la santé. « Cette étude contribue à prouver que les particules plastiques ne se sont pas seulement répandues dans l'environnement, mais également dans nos corps. Les conséquences à long terme ne sont pas encore connues », a commenté à cet effet Alice Horton, une spécialiste des contaminants anthropiques du centre britannique d'océanographie auprès du Science Media Centre. L’exemple des microplastiques n’est pas sans rappeler les particules en suspension dans l’air pollué qui s’accumulent dans les tissus humains et qui causent des millions de décès chaque année. Une étude antérieure a également montré que les microplastiques s’accumulent sur la membrane des globules rouges, ce qui limite leur capacité à transporter de l’oxygène. Malgré ces signaux d’alarmes, cela semble être sans conséquences sur les producteurs de plastique qui n’auront pas à s’inquiéter. L’industrie du plastique a de beaux jours devant elle, sa production étant sans cesse en augmentation. Le rythme de production s’accélère même dangereusement : sur les 9.2 milliards de tonnes de plastiques produits depuis les années 50, plus de la moitié ont été fabriqués depuis 2000 ; et le phénomène ne fait que s’aggraver puisque, d'après les estimations, plus de 600 millions de tonnes pourraient être produites en 2025. Les plastiques sont produits avec une croissance exponentielle : les projections indiquent que la production devrait être multipliée par deux dans les vingt ans à venir et par quatre d'ici à 2050. Les images d’animaux martyrisés par la présence des plastiques dans leur environnement n’ont pas apporté les résultats escomptés. Peut-être qu’un possible danger sur la santé humaine pourrait faire prendre conscience qu’il est urgent de repenser l’utilisation de cette matière n