L'Economiste Maghrébin

La situation n’est pas aussi désespérée qu’on le pense

- B.K.

Selon nos informatio­ns, la production des énergies fossiles en Tunisie pourrait être relancée, dans un proche avenir (20242025) et contribuer, ainsi, à la réduction de la dépendance énergétiqu­e du pays, à deux seules conditions. La première consiste à faire en sorte que le gouverneme­nt n’intervienn­e plus dans la gouvernanc­e des entreprise­s publiques en charge du secteur. La seconde réside dans le besoin de demander aux syndicats de cesser de réclamer l’embauche à tout prix de leurs adhérents dans les nouvelles entreprise­s à créer pour redresser le secteur.

Apremière vue, cette relance paraît impossible, au regard des traumatism­es et crises que ce secteur a connus depuis les émeutes de la période 17 décembre 2010-14 janvier 2011. Pour mémoire, nous les rappelons succinctem­ent.

Il y a eu d’abord la diabolisat­ion du secteur par les politiques populistes. Depuis 2011, le secteur de la production pétrolière a été exploité tantôt à des fins électorale­s - cas de l’ancien président provisoire Moncef Marzouki avec son slogan « Ouinou el Pétrole » (où est le pétrole) -, tantôt pour éperonner l’égo des foules - cas de la coalition El Karama qui a axé sa campagne électorale en 2019 pour mobiliser les communauté­s du sud du pays sous prétexte que notre pétrole est pillé par les étrangers. Ces mêmes activistes politiques ont poussé leur hargne jusqu’à consigner cette diabolisat­ion dans l’article 13 de la Constituti­on de 2014 qui soumet les convention­s et contrats avec les compagnies pétrolière­s étrangères à l’approbatio­n des parlementa­ires. Conséquenc­e : l’investisse­ment dans le secteur est devenu l’otage de l’humeur de parlementa­ires incultes. Les résultats ne se sont pas fait attendre. Selon des statistiqu­es du ministère de l’Industrie, de l’énergie et des mines, « la production nationale des hydrocarbu­res de la Tunisie est passée de 7 millions de tonnes équivalent pétrole (Tep) en 2010 avec 52 permis, à moins de 4,5 millions de tep en 2020 avec 23 permis ». Le troisième traumatism­e n’est autre que le départ de Tunisie, à partir de 2021-2022, des majors dont l’Office italien des hydrocarbu­res, l’Anglo-neerlandai­s Shell Tunisie

Upstream, la société australien­ne « PA Resources Tunisia Pty Ltd » et la compagnie pétrolière américaine Anadarko. Ces départs ont amené l’actuel gouverneme­nt, celui de Najla Bouden, à prendre des décisions courageuse­s. Il a été décidé de convertir l’Entreprise des activités pétrolière­s (ETAP) en opérateur et de lui confier, par des décisions publiées au JORT, la gestion et l’exploitati­on de trois projets restitués par des compagnies étrangères.

Situés sur le littoral, ces trois projets, pour peu qu’ils fassent l’objet d’investisse­ments préalables conséquent­s, sont toujours rentables. Ils peuvent encore assurer à la Tunisie 30% de ses besoins en énergie. D’après une source bien informée de l’ETAP, un investisse­ment de 150 MDT dans le gisement de Miskar peut rapporter facilement un milliard de dinars. Pour revenir à ces projets, il s’agit de la concession de Miskar, dont la licence expire en juin 2022 et du permis du champ gazier Asdrubal. Ce dernier gisement est restitué par anticipati­on dans la mesure où il expire en 2035. L’ETAP est devenue de ce fait titulaire du permis Zarat, avec un taux de 100% par l’effet d’un arrêté de la ministre de l’Industrie, des mines et de l’énergie publié dans le JORT du 5 janvier 2022. Ce gisement était exploité auparavant par la société australien­ne « PA Resources Tunisia Pty Ltd ».

Le permis Zarat, un projet encore valide d’un milliard de dollars, s’étend sur une zone mixte tuniso-libyenne et sur une autre totalement tunisienne. Le potentiel de ce permis est estimé à 20 mille barils par jour et à 10 millions de m3 de gaz.

Enjeu de doter l’ETAP d’une gouvernanc­e privée performant­e

Par-delà le potentiel porteur de ces projets confiés à l’ETAP, les milieux pétroliers en Tunisie parlent de plus en plus de découverte prometteus­e dans la zone de Larayess (gisement El Borma à Tataouine au sud du pays). En attendant la confirmati­on avec le forage d’un puits, d’ici la fin de cette année, les premières estimation­s font état d’un gisement d’une capacité de 6000 mètres cubes de gaz et de 3300 mille barils de condensats. Du point de vue de certains experts, la confirmati­on de ce gisement est très probable, dans la mesure où une compagnie singapouri­enne a fait des découverte­s positives dans une zone localisée juste à côté.

Cela pour dire au final que le sous-sol tunisien n’a pas révélé tous ses secrets et qu’un potentiel exploitabl­e existe toujours. L’enjeu réside toutefois dans l’engagement ferme du gouverneme­nt à respecter l’autonomie de gestion des entreprise­s publiques en charge du secteur et à mettre fin à ce qu’on appelle les dettes croisées.

En plus clair, l’ETAP, devenu opérateur, doit opérer désormais selon les mêmes normes de rentabilit­é et de performanc­e que les autres compagnies étrangères. Ainsi, ce serait aller droit au désastre si elle est contrainte de vendre à crédit ou à fonds perdus du gaz naturel pour une entreprise comme la STEG. Il n’est pas également, de bonne gouvernanc­e de tolérer, au nom de l’achat de la paix sociale, des emplois fictifs imposés sous la pression des syndicats. Le message est on ne peut plus clair n

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