La nouvelle donne touristique en Méditerranée
Principale région touristique au monde, la Méditerranée a été frappée de plein fouet par la crise sanitaire de Covid-19. Entre panne et relance, cette séquence offre l’occasion de s’interroger sur le modèle de développement pour l’avenir de ce secteur et des pays qui en vivent (en tout ou partie) : remise en cause de la dépendance vis-à-vis des ressources énergétiques, évolution du tourisme de masse vers de nouvelles offres, promotion d’un tourisme durable et de qualité, etc. De nouvelles perspectives s’ouvrent et offrent des alternatives au tourisme de masse. Sauf que ce dernier se renouvelle aussi, notamment à travers le phénomène des croisières.
Méditerranée : les défis d’un pôle du tourisme mondial
La Méditerranée peut s’enorgueillir d’être la première destination touristique mondiale. La zone représente plus du tiers des recettes touristiques mondiales et la moitié des arrivées internationales. Le secteur est à la source de près de 10% des emplois dans la zone. Il faut dire que sa situation géographique, la beauté de ses paysages et son patrimoine sont autant de qualités attractives… Particulièrement symbolique de la région, le tourisme est une activité qui - même si elle n’est pas récente - a fait florès dans l’ensemble du bassin méditerranéen. Le secteur draine un tiers des flux mondiaux, grâce à une nature, un patrimoine historique, architectural et culturel exceptionnels. La Méditerranée est aujourd’hui la principale région touristique du monde. Le bassin méditerranéen reste en effet la principale destination touristique mondiale. Les activités de services et les emplois liés au secteur pèsent dans la vie économique et sociale des îles et zones/ régions littorales (voir le cas de l’Espagne, de la Grèce ou de la Tunisie). Ce tourisme méditerranéen se caractérise néanmoins par sa très forte concentration autour de quelques sites naturels ou culturels, qui ont bénéficié d’investissements lourds, comme l’atteste le développement d’infrastructures et de complexes hôteliers. Outre les pôles d’activités touristiques traditionnels du pourtour méditerranéen, les Balkans présentent de nouvelles offres/destinations, et ce grâce notamment aux investissements privés de Russes qui tentent d’exploiter l’environnement naturel de la région (littoral et îles de Croatie, mais aussi stations balnéaires bulgares). Cependant, un lent déclin semble se dessiner pour la destination méditerranéenne, sur fond de montée en puissance de nouvelles destinations touristiques (Pacifique, Asie du Sudest, Caraïbes...), de l’instabilité et de l’insécurité sur les rives sud et est (la Tunisie et l’Egypte étaient parmi les destinations les plus prisées des touristes français et européens), sur fond d’impératifs structurels tels que la nécessité de lourds investissements (difficiles à attirer en temps de crise), le renouvellement de l’offre des produits touristiques et surtout du modèle du tourisme balnéaire de masse. De plus, le développement parfois anarchique de l’activité touristique (exemple du littoral bétonné en Espagne et contre-exemple de la sauvegarde du littoral corse) a un coût pour l’environnement en général, et pour les écosystèmes littoraux, en particulier. La perspective d’un changement climatique représente un défi majeur pour ce secteur, confronté à des problèmes aigus en matière de consommation et de gestion de l’eau et de l’énergie. Pays riverains de la Méditerranée, les États du Maghreb comme ceux des rives européennes ont une responsabilité particulière dans la préservation de leur environnement face à la croissance démographique et l’urbanisation côtière, à l’industrialisation de l’agriculture (augmentation des surfaces et des intrants chimiques), au développement du tourisme et du trafic maritime. Ces évolutions ont un coût environnemental et sanitaire non négligeable pour le monde méditerranéen. L’augmentation de la clientèle est synonyme d’augmentation des déchets produits et des eaux usées.
Un renouveau du tourisme méditerranéen ?
Face aux conséquences et limites du tourisme (balnéaire) de masse, le nombre de promoteurs de l’écotourisme se multiplient dans la région, y compris en Tunisie. Or le développement de cette branche demeure trop lent et peu soutenu par l’action publique. Une situation qui contraste avec l’explosion du phénomène des croisières. La Méditerranée est devenue le second bassin de croisières mondial. L’activité n’est pas vraiment nouvelle, mais elle a pris ces dernières années une dimension nouvelle, symbolisée par des « paquebots géants » de grands groupes américains et autres compagnies européennes. Celles-ci ont su capter l’attractivité du patrimoine historique et culturel (villes, sites archéologiques, sites classés) facilement accessible à partir des rives du bassin. Enfin, l'existence de ports situés à proximité de ces sites touristiques est aussi un motif décisif du succès de cette branche d’activité. Les itinéraires des croisières au sein du bassin redessinent la « géopolitique du tourisme » en Méditerranée. Un tourisme de masse d’un nouveau genre, qui semble en contradiction avec les défis du siècle, au regard du coût énergétique et environnemental de ces croisières ■