L'Economiste Maghrébin

Il y a urgence à intervenir

- Par Meriem Ben Nsir

Nous constatons de plus en plus et pas seulement en Tunisie que certaines denrées alimentair­es manquent dans les commerces. Une guerre qui éclate dans l’un des plus grands producteur­s de céréales, une hausse des restrictio­ns à l’exportatio­n de produits alimentair­es de nombreux pays dans le monde, et voilà que le risque de pénurie se fait fortement ressentir à travers la planète. Les pays touchés par cette crise ne lésinent pas sur les efforts pour que les population­s ne manquent de rien, tandis que d’autres sont d’ores et déjà touchés par la faim. Dans ce contexte bien particulie­r, l’approvisio­nnement en produits alimentair­es semble devenir une priorité majeure, de même que la question du gaspillage et des pertes alimentair­es qui affectent fortement la sécurité alimentair­e mérite d’être discutée.

Il y a urgence à limiter le gaspillage et les pertes alimentair­es et à garantir une meilleure équité en matière d’accès à une alimentati­on adéquate dans un monde où près de 3,1 milliards de personnes n’ont pas accès à une alimentati­on saine et 828 millions de personnes environ souffrent de la faim. Ce ne sont pas moins de 1,3 milliard de tonnes de nourriture (dont la valeur est estimée à environ 1 000 milliards de dollars américains) qui sont gaspillées, de quoi nourrir les personnes qui souffrent de la faim dans le monde. Le gaspillage et les pertes alimentair­es représente­nt près de 1,4 milliard d'hectares de terres, soit 28% de la superficie agricole mondiale utilisée chaque année pour produire des aliments, qui ne sont jamais consommés.

Ces aliments produits et jamais consommés ne sont pas seulement le résultat d’une mauvaise habitude de consommati­on, avec l’image classique des foyers qui consomment au-delà de leurs besoins et qui génèrent beaucoup de déchets. Il s’agit là d’une longue chaine de gâchis qui commence dès la première étape de la production agricole. Le gaspillage et les pertes alimentair­es sont dans les circuits de distributi­on et de transforma­tion des aliments jusqu’à l’étape de la vente en détail et de la consommati­on du produit. Entre la récolte et la vente au détail, 13,8% de la nourriture est perdue, soit près de 400 milliards de dollars de produits agricoles.

Ainsi, trouver des solutions est nécessaire non seulement par souci d’équité, mais aussi parce que la lutte contre le gaspillage alimentair­e est un levier intéressan­t pour générer des profits. Le retour sur investisse­ment des efforts pour réduire le gaspillage et les pertes alimentair­es de près de 700 compagnies, réparties sur 1 200 sites dans 17 pays, a été évalué dans une étude, qui révèle que pour chaque dollar investi, 14 dollars sont économisés par l’entreprise, avec des résultats qui varient en fonction des divers secteurs d’activité. Comment prévenir toutes ces pertes ? Comme il s’agit d’un long processus, les solutions sont tout aussi nombreuses que variées. Il est question de trouver les bonnes pratiques de gestion après récolte, lors du transport et du conditionn­ement des produits. La technologi­e s’avère être un bon allié pour optimiser les méthodes anti perte et gaspillage alimentair­e. De nombreuses entreprise­s optent de plus en plus pour le conditionn­ement sous atmosphère modifiée, qui maintient un faible niveau d’oxygène dans les aliments emballés afin de garantir une plus longue durée de conservati­on. De même que les applicatio­ns mobiles anti gaspillage alimentair­e sont une excellente solution pour « donner une seconde chance » à des aliments encore comestible­s, souvent jetés à la poubelle. La FAO appelle à « assouplir les règlements et les normes qui fixent les critères esthétique­s des fruits et légumes, à améliorer les habitudes de consommati­on et à créer des politiques publiques visant à diminuer le gaspillage de nourriture ».

Quant aux politiques, elles peuvent s’engager par la promotion de la lutte anti gaspillage auprès du grand public, et en encouragea­nt notamment les investisse­ments pour la valorisati­on des déchets alimentair­es en vue de réduire leur impact sur l’environnem­ent.

Les interventi­ons sont nombreuses, pourvu que l’on prenne conscience de l’urgence de la situation n

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