La GAIF, un moteur de développement de l’assurance dans le monde arabe
A Jhina, la solidarité franco-tunisienne est à l’oeuvre
Créer un pôle au sein de la GAIF dédié à l’assurance des catastrophes naturelles est l’objectif en ligne de mire du nouveau président de l’organisation, Youssef Benmicia, assureur de premier rang de son état. Digitaliser des produits et services d’assurance et développer l’inclusion financière font de même partie de la to-do list du chef des assureurs arabes, des actions qui ne pourront être entreprises que par la coordination et le concours de tous les adhérents de la GAIF.
GAIF : Un président nouvellement élu et des réalisations
Fraîchement nommé à la tête de la société algérienne d’assurance, leader sur le marché algérien de l’assurance, Youssef Benmicia a débuté sa carrière dans les années 80 au sein de la société CAT. Il est également membre du Conseil national politique économique et social et devient le président de l’Union générale arabe des assurances (General Arab Insurance Federation, GAIF) pour un mandat de deux ans et ce, à l’issue de la tenue de la 33ème édition du congrès de la GAIF. L’Algérie succède ainsi à la Tunisie à la tête de cette organisation d'envergure internationale réunissant les sociétés d’assurance et de réassurance du monde arabe. L’organisation regroupe actuellement environ 350 adhérents de 20 pays arabes et se charge d’établir des relations de coordination et de collaboration entre les différents membres. Le développement du métier de l’assurance et de la réassurance se place au coeur de la mission de la GAIF. Youssef Benmicia a expliqué d’ailleurs que l’organisation a à son actif plusieurs réalisations, dont la première consiste en la carte interarabe ou carte orange dédiée à l’assurance automobile. En effet, il s’agit de l’éligibilité d’un citoyen à une assurance automobile lorsqu’il se déplace d’un pays arabe à un autre faisant partie de la GAIF. Soucieux de s’aligner à l’ère du numérique, les pays membres de l’organisation ont procédé à la digitalisation de la carte interarabe au cours de l’année écoulée.
Youssef Benmicia évoque aussi la création de la société arabe de réassurance. Côté réalisations, c’est le pôle formation qui décroche le plus grand lot. En effet, le président de la GAIF explique qu’il s’agit même d’un des plus importants acquis de l’organisation, à savoir les cours d’assurance et de réassurance prodigués au sein des pays membres. Par ailleurs, une revue qui traite des thèmes de l’assurance a été éditée dans le cadre de la GAIF au même titre qu’un livre. Le président de l’organisation évoque également la création de l’Institut arabe de l’assurance, qui assure la formation des agents dans le domaine.
L’assurance : une question de maturité !
Mais qu’en est-il de la maturité des différents pays arabes en matière d’assurance et de réassurance? A cette question, Youssef Benmicia indique qu’elle varie d’un pays à l’autre et se mesure selon deux indicateurs : le taux de pénétration de l’assureur, la part de l’assurance dans le PIB et la densité de l’assurance. En se fiant aux deux premiers indicateurs, il en ressort que l’Algérie et l’Egypte sont à la traîne, selon les dires de Youssef Benmicia. La situation s’explique par l’importante population et l’important PIB des deux pays qui déclinent un taux de pénétration de l’ordre de 1%, soit en-dessous de la moyenne de tous les pays arabes qui est de 1,5%. Sur ce terrain, la Tunisie réalise une petite perfor
mance avec un 2% de taux de pénétration, tandis que le Maroc se place en pole position avec une belle performance de 4%. Du côté des pays du Golfe, il existe également une certaine diversité qui se remarque entre les pays producteurs de pétrole et ceux qui ne le sont pas. « Ces pays connaissent sur les dernières années un réel développement de l’activité de l’assurance et de la réassurance », souligne Youssef Benmicia. S’agissant du dernier indicateur, à savoir la densité d’assurance, il est question de mesurer le budget consacré par une personne pour l’assurance. Un indicateur qui est très facile à calculer. Dans le monde, le taux mondial est de 7%, et en Afrique, il est de l'ordre de 2,6%. Selon cet indicateur, les pays les plus avancés sont le Maroc avec une densité de 143 dollars, la Tunisie avec une densité de 83 dollars. A contrario, en Egypte, la densité n’est que de 27 dollars.
Et l’inclusion financière des pays membres de la GAIF, on en parle ?
L’on serait en droit de s’interroger sur la capacité de la GAIF à booster l’inclusion financière de ses pays membres. Et Youssef Benmicia d’expliquer qu’il faut s’engager dans un travail de haut vol fait par les assureurs et qui consiste à sensibiliser et convaincre les particuliers et les professionnels de l’importance de souscrire à une assurance. Les indicateurs cités plus haut doivent être améliorés pour témoigner ainsi de l’inclusion financière à juste titre. « Il faut informer, vulgariser et montrer les bienfaits de l’assurance de manière à ce que les produits et services puissent bénéficier à un plus grand nombre », appuie le président de la GAIF. Cela passe certes par la case communication, mais il est également indispensable de mettre en place des produits qui répondent aux attentes et besoins des futurs assurés. Et le rôle de la GAIF dans cette entreprise ? Youssef Benmicia parle de l’importance de transposer les expériences réussies dans certains pays, comme ce fut le cas dans les micro-assurances dans d’autres pays. Il est en outre question de partage d’expériences entre les différents membres de l’organisation. Des études de marchés, une coopération accrue permettent aussi l'élargissement des expériences et une meilleure couverture des marchés par l’assurance.
Les mutuelles d’assurance : une question d’héritage
Dans les pays d’Afrique du Nord, les mutuelles d'assurance s'avèrent être une question d’héritage. D’ailleurs, jusqu’à présent, il existe de très grandes sociétés mutuelles d’assurance, aussi bien en Tunisie qu’en Algérie par exemple, où elles ont une part de marché de 10%. L'Arabie saoudite pour sa part décline un marché composé pour l’essentiel de mutuelles. Idem pour le Soudan où il n'y a quasiment pas d’autres formes de sociétés d’assurance que les mutuelles. Aujourd’hui, il existe des formes modernes de mutuelles: Takaful ou assurance islamique. « Mutuelle ou islamique, ces assurances se basent sur le même principe, à savoir : la solidarité. Le système de répartition de primes ainsi que le bénéfice au profit sont touchés par un mauvais sort », explique Youssef Benmicia, avant d’ajouter que ces systèmes existent dans les pays où les valeurs sociales existent en plus de l'esprit de partage. Des valeurs qui n’ont pas forcément un lien avec la relation, mais davantage avec le social. Ces formes d’assurance pèsent aujourd’hui dans le monde arabe 44 milliards de dollars et projettent d’atteindre les 67 milliards de dollars à horizon 2030. Question avenir, la GAIF entend miser beaucoup sur les nouvelles technologies, en plus de la mise à la disposition des marchés de bases de données concernant tout ce qui a trait au secteur de l’assurance dans les différents pays arabes. Un autre axe de développement entrepris par la GAIF porte sur l’organisation de séminaires dans les pays membres, afin de partager des expériences et de réfléchir sur les moyens de développer le secteur dans toute la région n
Question avenir, la GAIF entend miser beaucoup sur les nouvelles technologies, en plus de la mise à la disposition des marchés de bases de données concernant tout ce qui a trait au secteur de l’assurance dans les différents pays arabes.
La douceur légendaire de Jerba, du moins depuis Homère, n’est plus à démontrer. Sauf qu’elle n’a pas toujours été douce pour le Jerbien (gère bien), du moins ces derniers mois, en pleine canicule, avec les coupures d’eau permanentes et sans préavis, et parce que l’eau de la mer censée être dessalinée par la toute nouvelle station de dessalement arrive dans les cuisines avec un taux de sel assez élevé, quand bien sûr l’eau coule dans les robinets, et donc pas douce du tout. La Sonede, malgré les protestations des habitants, non seulement ne donne aucune explication, mais semble crier à la face de ses clients : « Buvez l’eau de mer », comme le veut le proverbe tunisien. Beaucoup de Jerbiens se sont mis à construire des «fasqia», sorte d’énormes cuvettes pour récupérer l’eau de pluie, comme dans le bon vieux temps. Il semble qu’on a oublié d’acheter les filtres pour les algues, bien qu’ils figurent dans le cahier des charges, mais aucun communiqué officiel n’est venu démentir ces rumeurs.
A quelques semaines du sommet mondial de la Francophonie qui se tiendra sur l’île, il faut avouer que c’est inquiétant, car même les hôtels 4 et 5 étoiles sont servis par la même source. Que feront nos illustres hôtes pour se doucher ?
Le paisible village de Shaykh Yahya, à six km d’Ajim, vient d’être secoué par un horrible crime. Un célèbre moniteur de ski français, qui louait une maison de vacances, fut trouvé mort dans sa piscine. Avec une efficacité rassurante, la police a rapidement arrêté les présumés assassins. Il s’agit d’une jeune fille qui a avoué être la fiancée de la victime et de deux autres hommes qui l’ont aidée à tuer le moniteur. Des traces et des blessures ont été trouvées sur le corps de la victime et de la jeune fille. Les coupables ont été déférés devant le parquet et la police a choisi de communiquer brièvement, sans doute à cause du sommet et pour ne pas inquiéter les 3500 personnes de nationalité étrangère qui résident en permanence sur l’île.
Ce crime crapuleux a renforcé le sentiment d’insécurité chez les habitants qui n’ont pas l’habitude de ce genre de criminalité et de méfiance à l’égard des non insulaires qui s’installent pour travailler à Jerba. Il nourrit aussi une attitude de rejet qui frise le racisme. Un des insulaires m’a expliqué, sans rire, qu’il faut empêcher les non Jerbiens et néanmoins Tunisiens d’élire domicile dans l’île, ou du moins, d’établir un contrôle sévère « aux frontières », c’est-àdire à al-Qantra et au Jurf. Il m’a même affirmé qu’il était contre la construction d’un pont qui faciliterait, selon lui, « l’invasion par les continentaux » de l’île des Lotophages. Cela peut certainement s’expliquer par les fantasmes ancestraux des insulaires, qui craignent toujours d’êtres envahis, non sans raison d’ailleurs, et l’histoire de Jerba le prouve.
Il est vrai cependant qu’à quelques semaines du sommet, la présence policière n’a pas été renforcée sur l’île, contrairement à celle qui précède le pèlerinage de la « Ghriba ». Mais en dehors des traditionnels vols de mobylettes, la situation sécuritaire est stable et le sentiment d’insécurité est plus dû à la fantasmagorie populaire. Par rapport à d’autres régions de la République, Jerba apparaît comme un havre de paix et de sécurité. Faut-il rappeler que, selon certaines sources, l’île, durant les mois de juillet et d’août, a accueilli presqu’un million de personnes à la fois, surtout des Tunisiens. Officiellement, la majorité des touristes dans les hôtels étaient des Tunisiens. Passer ses vacances à Jerba est devenu un must pour la bourgeoisie tunisienne. Jerba fait tendance et au mois d’août, aucune chambre d’hôtel, aucune maison d’hôte, aucune maison de location ne sont disponibles. Les commerçants, les restaurateurs, les taxistes et autres métiers qui vivent du tourisme n’ont jamais gagné autant d’argent que ces derniers mois. Pourtant, très peu d’actes délinquants ont été enregistrés et la sécurité était totale. Francophonie et traditions jerbiennes. Jerba se prépare fébrilement à accueillir le 18ème sommet de la Francophonie, du moins du côté des officiels locaux et nationaux. Le théâtre de plein air a été transformé en un grand chapiteau luxueux et pimpant pour accueillir plus de 80 chefs d’Etat et de gouvernement. Situé à côté du mythique fort Ghazi Mustapha, ou fort espagnol, datant du Moyen Age, lieu où se sont affrontés continuellement les musulmans et les chrétiens, et notamment le fameux corsaire Kheireddine Barberousse, contre les Espagnols, le théâtre, qui accueillera les délégations, fait comme un pied de nez à l’histoire tumultueuse de l’île. Contrairement à une idée reçue, Jerba n’est devenue un havre de paix qu’à la fin du 19ème siècle. En raison de sa situation stratégique en Méditerranée, elle était, d’une façon permanente, depuis la haute anti
quité, objet de convoitise des puissances maritimes qui contrôlaient la mare nostrum. Elle a souvent été le théâtre de batailles navales et terrestres sanglantes, notamment quand elle a été envahie par les Espagnols, faisant des milliers de morts parmi les Jerbiens. C’est le corsaire Barberousse, qui travaillait pour la sublime porte, comme son frère Arouj à Alger, qui délivra l’île de l’occupation des croisés espagnols.
Haut le fanion de la tolérance et de l’amitié entre les peuples ?
En organisant le sommet de la Francophonie sur ce lieu mythique et hautement riche en symboles, les autorités tunisiennes ont-elles voulu livrer un message fort, sachant qu’aussi bien l’île - que toute la Tunisie - porte actuellement haut le fanion de la tolérance et de l’amitié entre les peuples ? Il y a fort à craindre que le choix du lieu ait été fait au hasard ou pour des raisons purement sécuritaires. La preuve : aucune communication officielle n’a été livrée sur ce choix. En dehors d’un film publicitaire, produit à grands frais par une simple agence de publicité, avec un contenu qui ne reflète nullement la richesse historique de l’île et encore moins celle de la Tunisie, rien n’est encore fait. Il y a fort à parier qu’on va vers un ratage complet de ce côté-là. Pourtant, des centaines de journalistes qui accompagneraient les 80 délégations sont attendus. C’est une formidable occasion pour faire la promotion politique, économique, culturelle et touristique de la Tunisie. Mais Jerba n’a pas besoin de campagne publicitaire. Elle a toujours communiqué grâce à ses atouts naturels, dont son patrimoine culturel plusieurs fois millénaire. Elle n’a pas besoin de se préparer à l’évènement, car elle vit continuellement l’évènement, en accueillant chaque année des millions de touristes de toutes nationalités et de toutes religions, sans rien perdre de son authenticité culturelle. Les Jerbiens, pour la plupart, ne considèrent ce sommet que comme une opportunité économique, sans plus. Alors, ils s’y préparent en espérant que cela profitera surtout à leurs commerces, restaurants, boites de nuit, à leur artisanat… La politique et les relations internationales, ils s’en foutent ! Seules les autorités régionales et locales semblent donner de l’importance à l’évènement, du moins sur le plan politique.
Les discours sont loin de la réalité
Rappelons que ce sommet a été reporté à deux reprises et que jusqu’à une date très récente, il aurait pu ne pas avoir lieu en Tunisie, à cause de l’opposition du Canada qui prétend que la Tunisie de Kaïs Saïed n’est pas assez démocratique à ses yeux. Hypocrisie d’Etat, car la majorité des pays francophones ne peuvent pas prétendre être plus démocratiques que notre pays, et puis le Canada est un pays essentiellement anglophone. De toute façon, la France a besoin que ce sommet se tienne en Tunisie, en terre africaine, au moment où elle perd chaque mois du terrain, comme au Mali ou au Burkina Faso. Le Président Macron prononcera certainement un grand discours lors de ce sommet, juste sur le lieu où se sont déroulées d’âpres batailles entre musulmans et croisés. Cela pourrait l’inspirer ! Autre chose, rien n’indique que les jeunes jerbiens feront partie de la fête francophone. Pourtant, jamais, dans l’histoire de l’île, l’immigration vers la France, « terre d’accueil », n’a été aussi forte, clandestinement il va de soi, via Lampedusa ou la Serbie, selon les moyens de chacun, à tel point que l’île manque terriblement de main-d’oeuvre. Ces « harraguas » n’ont jamais entendu parler de la Francophonie, mais ils vont participer à diffuser la culture française malgré eux. Sur l’île, des milliers de pavillons luxueux ont été construits par ces « clandestins », grâce à l’argent gagné au noir sur le sol français. Les transferts effectués ces derniers mois par les Tunisiens de France ont battu le record. Moins la France délivrera de visas pour les jeunes tunisiens, et plus ils seront nombreux à y immigrer clandestinement. C’est dire combien les discours sont loin de la réalité. Le prochain sommet de la Francophonie ne dérogera pas à cette règle n
La Méditerranée n’est pas sortie de l’Histoire. Si le début du XXIe siècle est marqué par l’affirmation de pôles de puissance eurasiatiques et surtout transpacifiques, la Méditerranée garde une importance géostratégique. L’intérêt de son espace maritime pour le commerce des hydrocarbures est conforté par la Convention de Montego Bay et la 3e conférence des Nations unies sur le droit de la mer, qui ne prescrivent pas de restrictions à la liberté de navigation en Méditerranée. L’absence de zones économiques exclusives préserve dans le bassin un espace de haute mer, une donnée fondamentale pour les grandes puissances
Soleil levant, un matin de cet automne, des oliveraies à perte de vue et, parfois, entre les ordonnancements des rangées d’oliviers, des cultures de poivrons, d’orangers sur des parcelles à part, ou, plus rarement, de mûriers : c’est Jhina, commune de la délégation de Bou Hajla, au sein du gouvernorat de Kairouan, sur une terre essentiellement productrice d’olives.
Le premier rendez-vous fixé est à la mairie, une de celles qui ont été créées après la révolution du 14 janvier 2011. L’objet de l’entretien : faire connaissance entre le maire, Fathi Douzi et deux Français, André Couitti et Serge Jourdan, venus pour étudier l’approfondissement, en particulier en matière d’énergie solaire, d’une solidarité déjà entamée avec un petit agriculteur du cru : Farid Ben Farhat, cinquante-huit ans, marié à Saïda et père de cinq enfants dont l’aîné, Sayf, étudiant à Sfax, a vingt ans. La benjamine Siwar, petite soeur également de Kossay, Adam et Ayoub, a six ans. M. Ben Farhat est le seul de sa fratrie, composée en outre de quatre femmes et d’un autre homme, à s’être installé dans sa région natale.
A l’hôtel du village, le contact franco-tunisien est très rapidement établi. Et pour cause, lui-même grand producteur d’huile d’olive certifiée bio par l’un des plus grands certificateurs au monde, Ecocert, dont le siège social est situé dans la région d’origine de ses visiteurs, l’édile est au fait des préoccupations énergétiques de ses interlocuteurs. Dans sa bourgade, M. Douzi, qui a fait installer des panneaux solaires, distribue ainsi gratuitement de l’électricité, notamment à la municipalité, à la mosquée, au dispensaire local et offre un éclairage public des rues aux frais de l’astre solaire.
Dans un environnement où la Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (SONEDE) est littéralement inexistante, cette énergie sert également à tirer l’eau d’un puits réaménagé sur le terrain jouxtant la municipalité, notamment pour alimenter de superbes jets d’eau placés au centre de l’agglomération, juste en face d’une aire de jeux pour enfants, que l’on observe joyeusement agrippés à des balançoires publiques en ce matin ensoleillé.
Fer de lance du projet d’aide à l’exploitation tunisienne, Serge Jourdan, quant à lui, est élu, à vingtdeux ans, en 1977, plus jeune maire de France, avant de rester premier magistrat de son village de Losse, dans les Landes, non loin de Toulouse et de Bordeaux, durant quarante-trois années. « J’ai eu un challenge à relever : mettre en place, en 2010, avec les apports exclusifs - 280 millions d’euros - de l’entreprise EDF Energies Renouvelables, devenue ensuite EDF Renouvelables, la plus grande centrale solaire d’Europe : 1 million 100 000 panneaux, s’étendant sur 300 hectares, et produisant 75 mégawatts, c’està-dire la consommation de 75 000 habitants, à rapporter à la population de mon village, qui compte 300 habitants », résume-t-il. La désertification rurale en France tranche ainsi avec, en proportions inversées, la densité encore vivace des milieux ruraux tunisiens : Jhina compte 12 000 habitants. André Couitti, pour sa part, président de la structure associative qui porte le projet d’entraide à Jhina, l’Agence de prospective pour la ruralité et l’économie solidaire (APRES), est un homme à la grande expérience de travail en milieu rural, un milieu qui possède, en France, une solide tradition, comme en témoigne, depuis des lustres, l’ancrage local de la Confédération nationale (française) des foyers ruraux.
Il connaît la Tunisie et y séjourne une moitié de l’année tous les ans depuis 2011. Il aurait dû être à Jhina depuis longtemps, s’il n’y avait pas eu la pandémie de Covid-19. Faisant acte de résilience face à l’adversité pandémique, il cosigne, avec Ahlem Ben Farhat, soeur de l’agriculteur jhinien, qui vit à Strasbourg et exerce comme auto-entrepreneure commercialisant des produits à base de bois d’olivier, ce qu’ils appellent un contrat de solidarité qui a permis à M. Ben Farhat de bénéficier durant ces deux dernières années d’une sorte de salaire minimum agricole de 120 euros mensuels, porté à 150 euros en 2022. De plus, M. Couitti a personnellement financé, à hauteur de 1000 euros, le remplacement partiel d’un cheptel dont les bêtes, brebis et moutons, avaient été volés à la famille Ben Farhat en 2021. A présent que la crise sanitaire semble faire partie du passé, l’enjeu de son implication vaut son déplacement à la ferme de Jhina. Mais pas seul : en plus de M. Jourdan, M. Couitti est accompagné par le frère de l’exploitant, Yassine Ben Farhat, avocat à Sfax de son état, et d’une équipe d’ingénieurs tunisiens composée, pour l’ingénierie de réseaux, d’Oussama
Ben Salem, et, pour les questions d’énergie, de Mounir Saïdi et de Soumaya Skhiri.
L’hôte du projet pilote en matière énergétique, M. Ben Farhat, qui reçoit ses invités comme un grand seigneur, est, lui, un petit exploitant qui a progressivement planté quatre cents pieds d’oliviers et une centaine d’orangers depuis 2004. Mais il n’en dégage qu’un maigre profit annuel : trois mille dinars, pas davantage. En visite de terrain, les porteurs d’un programme ambitieux de revalorisation de cette exploitation sont venus faire connaissance avec lui et sa famille et identifier les besoins financiers réels afférents à des objectifs comportant plusieurs volets.
Au premier chef, le volet agricole : il consiste à équiper en panneaux solaires la station de pompage de l’eau, qui y est en formidable abondance souterraine et que « le réseau de la Société tunisienne d’électricité et de gaz (STEG) n’alimente pas, fait remarquer M. Ben Farhat, en tension suffisante pour pomper à un rythme soutenu, sauf à des prix astronomiques ».