DIPLOMATIE, UN REDÉPLOIEMENT STRATÉGIQUE ?
Depuis quelque temps, la Tunisie semble vouloir rééquilibrer ses relations diplomatiques aussi bien avec ses alliés historiques et traditionnels qu’avec le nouveau pôle qui émerge à l'Est, et notamment la Russie et la Chine. Il faut rappeler que de nouvelles positions ont commencé à apparaître, surtout sur le conflit palestino-israélien, rompant avec la position classique de la Tunisie qui a toujours ajusté ses positions sur celles des pays arabes à travers leur Ligue, ainsi que sur la légalité internationale concernant ce conflit. L'agression barbare perpétrée par l'Etat d'Israël sur la population civile palestinienne à Gaza, tuant des dizaines de milliers de victimes innocentes, a encore plus radicalisé la position tunisienne à travers les discours du Président de la République et les actions du MAE, allant jusqu'à ne plus jamais reconnaître un Etat nommé Israël et ceci quels que soient l'issue des combats et le résultat des négociations sur le Moyen-Orient. La position tunisienne sur cette question est plus proche de celle de l'Iran que d'aucun autre pays arabe. Elle part d'un principe simple : le droit des Palestiniens à libérer tous leurs territoires d'avant 1948, avec tous les moyens, y compris la lutte armée, chose qui exclut de facto toute reconnaissance de l’État d’Israël. Sauf que le réalisme politique qui avait concrétisé la diplomatie tunisienne a amené la Tunisie à adhérer au principe des deux États, un principe que l'Etat sioniste a tout fait pour saborder, notamment à travers la récente guerre génocidaire, sur le territoire palestinien de Gaza.
Changer d'axe ?
La Tunisie, depuis son indépendance, a été l'alliée du monde dit libre, dit libre dirigé par les USA. Elle fait désormais partie des alliés de l'OTAN, sans en être membre et est donc liée par des accords militaires et politiques avec cet axe. C'est son histoire et sa géographie qui ont scellé ce destin, en plus de la politique clairvoyante de Bourguiba et de son successeur. Cette appartenance à cet axe, quoique, officiellement, elle ne reflète pas la réalité, a été renforcée et accentuée avec « la révolution » à tel point qu'à un certain moment, la Présidente de la Commission de la défense du Sénat américain s'est exclamée : « La Tunisie est une question de sécurité nationale pour les USA ! ». On a même, sous BCE, signé un mémorandum avec la plus grande des puissances dans ce sens. Pour l'anecdote, BCE avait fait signer ce mémorandum par son conseiller de l'époque, Mohsen Marzouk, ne voulant certainement pas laisser une tache noire dans son long parcours politique. Mais depuis, l'Etat tunisien est officiellement un allié stratégique des USA et aucun des successeurs de BCE n'a dénoncé ce texte. Notre pays et surtout notre défense restent liés par cet accord.
Pourtant, la tentation de changer d'alliance plane, depuis quelque temps, sous les cieux de Tunis. Ce que nos amis italiens ont vite compris. Ils ont tiré la sonnette d'alarme. Le ministre italien des Affaires étrangères du gouvernement Meloni s'est même adressé à ses homologues européens, les mettant en garde contre le fait de lâcher la Tunisie, alors en pleine crise financière et migratoire, en leur disant que son gouvernement n'aimerait pas que les Russes installent une base militaire dans notre pays ou que les Islamistes reprennent le pouvoir ! Pour les Italiens, il s’agit d’assurer leur propre sécurité et aussi, de contrôler le flux migratoire subsaharien, dont le principal portail reste la Tunisie.
Les Italiens, qui tentent depuis un moment de bruler la politesse aux Français, qui actuellement vivent une débandade historique en Afrique et au Maghreb, certainement avec la bénédiction de Washington, s'implantent de plus en plus chez notre voisin de l'Ouest avec qui ils scellent des accords stratégiques, notamment en matière d'énergie. Sauf que là-bas, les Russes sont installés depuis longtemps et solidement. Et Alger a toujours été un allié sûr de Moscou dans cette partie du Maghreb et de l'Afrique. Les rapports de forces sont en train de changer et, comme l'a dit le ministre américain de la Défense, cette région sera le lieu d'affrontements féroces entre les USA et leurs alliés d'un côté, la Chine et la Russie de l'autre.
Péril jaune et ours polaire chez nous !
Il y a presqu’un an, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, devait effectuer une visite officielle en Tunisie. La visite a été reportée soudainement pour des raisons restées inconnues. Certains voyaient à l'époque, à tort ou à raison, la main de Washington. Un an après, non seulement, il effectua une visite de deux jours dans notre pays, mais il rencontra le Président de la République, le Premier ministre et évidemment son homologue tunisien. Les résultats de