A vau-l’eau…
Sur les gradins, deux amis, un Algérien et un Tunisien, se sont retrouvés. Ils avaient décidé de suivre ensemble le match Libye-Tunisie. En attendant l’entrée des joueurs sur le terrain, ils ont échangé quelques mots à propos de la marche du sport dans leurs pays respectifs. Le Tunisien a saisi l’occasion pour s’épancher. Il a apparemment gros sur le coeur et s’est lancé dans un long monologue.
«Tu sais, chez nous, les affaires du sport donnent l’impression d’aller dans tous les sens, et on enregistre tous les jours d’incroyables invraisemblances. Nous ne savons ni ne comprenons ce qui se passe, ni les raisons de cette léthargie qui frappe un secteur que l’on considère, partout ailleurs dans le monde, comme le plus important dans la prise en main et la formation de l’homme de demain.
Dans un monde plein de tentations, notre jeunesse ne sait plus quoi faire de son temps libre, l’enfance vit une période pour le moins qu’on puisse dire mouvementée, pour les familles tiraillées et inquiètes, les choix ne sont pas bien nombreux, parce que l’horizon est masqué par le doute et le marasme ambiant.
Bien entendu, les raisons, et c’est ce qui est le plus important, sont en étroite liaison avec l’absence totale d’initiatives pour reprendre en main la situation d’un secteur qui fait du surplace depuis bien longtemps.
Nous avons perdu la première place en tout. Dans l’organisation où nous étions passés maîtres, dans l’infrastructure où nous étions en avance et notre pays était le refuge pour toutes les confédérations africaines qui se trouvaient prises au dépourvu pour organiser à n’importe quel moment n’importe quelle compétition. Nous n’entretenons même plus celles que nous possédons. Elles sont dans un état de délabrement total.
Les responsables ? Ils sont gentils, discrets ne font pas de vagues. On y vient, on visite les équipes nationales, on prend des photos-souvenir, on rafistole quelques installations, on distribue quelques subsides, le temps de faire quelques promesses et au prochain qui viendra de faire le même parcours. Tout reste en l’état et toutes les parties prenantes, complètement asphyxiées, ne savent plus à quel saint se vouer.
La première constatation et c’est la plus importante, est cette impression que l’on a lorsqu’on essaie d’analyser les agissements de bien des responsables du secteur, à tous les niveaux.
Au niveau des fédérations, on est bien cloîtré dans ce qui a été mis en place depuis des décades. Pis, on profite du manque de poigne pour se barricader et garantir une présence à vie, qui aura tout loisir de tuer toute initiative et accession de nouveaux responsables porteurs de dynamisme et de fraîcheur.
Les clubs s’enfoncent. La discipline la plus en vogue et que les dirigeants en mal de moyens et d’argument affectionnent le plus, c’est la menace de démission. Ils veulent diriger un club professionnel avec l’argent des autres. Ils ne font aucun effort pour trouver des sources de financement.
Des disciplines sportives sont menacées de disparition, à causes de dépenses folles en faveur d’équipes le plus souvent moyennes, mais dont les joueurs sont payés à prix d’or. Personne ne lève le petit doigt pour remédier à cette situation et pour «nourrir» le football, on sacrifiera d’autres disciplines. Dans quelques années, on remplacera les salles de sport et les piscines par des terrains de football et tout le monde sera bien heureux de diriger avec des démissionnaires potentiels, un sport désargenté, sans idées, sans moyens.
Au niveau des finances qui ne sont plus qu’une gestion de ce qu’on n’a jamais possédé et qui se transforme en gouffre, les bailleurs de fonds se font rares, mais les «sages» sont aussi généreux en belles paroles et en conseils qu’ils auraient dû adresser à eux-mêmes lorsqu’ils étaient aux affaires.
Au moment où on ne parle que de sacrifices pour le pauvre citoyen, par mesure d’austérité, on risque de se priver de bien des choses, mais sans vergogne, on rediscute le plus souvent à la hausse le renouvellement des contrats professionnels. Ni le ministère ni la fédération ni la Banque Centrale ou le ministère des Finances n’interviennent pour poser des garde-fous.
Chacun n’en fait qu’à sa tête. Les problèmes que posent les prétendants au trône et ceux qui sont en place épuisent les uns et les autres tout en voyant la situation de bien des disciplines déjà mal en point se dégrader au fil des jours.
Les entraîneurs ? Les uns se considèrent comme les maîtres du monde. Surtout ceux qui opèrent dans les équipes nationales. Les autres se font tout petits pour ne pas se faire limoger à la première grimace.
Même la formation des cadres souffre des invraisemblances que posent des enseignants qui veulent faire la loi à leur façon et qui refusent de reconnaître les jugements émis par le T.A.S. Et personne ne bouge le petit doigt pour que force reste à la loi. C’est la foire ! A part ça, tout va bien. Et vous, comment va le sport chez vous ? On en parlera après le match….