On sape à qui mieux mieux…
Les Journées théâtrales de Carthage s’annoncent ; plus que 72 heures ;mais on épilogue encore sur les 27es JCC. Epiloguer ?Le verbe est bien doux. On critique, on polémique. Pis :on se bagarre, on s’accuse. Pire :on médit, on invective, on injurie. Et pourquoi cette «guerre» ? Les «belligérants» eux-mêmes ne sauraient trop nous dire. A la vérité, à être franc et distant, pour rien, quasiment pour rien. Nos collègues du journal ont tout relaté et commenté. Des histoires de «trous sous le tapis rouge», de robes trop «voyantes», de places manquantes, et d’invités «délaissés» peu ou prou. Des broutilles dans la perspective d’un grand festival. Des «fautes impardonnables», des «motifs de honte» au regard d’esprits «perfectionnistes», «méticuleux», ou simplement«cherchant noise», ou encore «malintentionnés».Et ceux-là, témoins ou pas, de près ou de loin, se seront montrés loquaces, tenaces, outre que «présents à l’appel» et fort nombreux.
Inutile de revenir sur les faits, chacun campant sur ses positions. Mais l’affaire illustre nos moeurs en général, comme celles propres au milieu des arts et de la culture, au bout de ces six années de révolution.
Simplifions : la dictature éjectée, les Tunisiens se disputent pratiquement tout. Argent et biens s’entend, et par tout moyen. Les pouvoirs surtout. Tous les pouvoirs. A tous les niveaux. Il n’y a plus de «monarques», plus de «familles régnantes», plus d’élites partisanes, plus de «privilégiés du système», plus «d’oligarchies», plus de hiérarchies établies. La voie est libre. Place à la liberté de penser, place à la liberté d’opinion, place au mérite, place à la compétence et au talent, mais place aussi(hélas !) à la démesure des ego, des vanités, des cupidités, des opportunismes et des ambitions.
Nous en connaissons les modes en politique. De la Troïka à Nida. Ce ne sont, derrière «les masques» de la gouvernance, que luttes intestines, affrontements larvés, sournois, combines et coups bas. Mazen Chérif l’a vite écrit, décrit, Bouchnaq l’a vite chanté : pour les «Karassi», les seuls «Karassi». Un travail de sape à qui mieux mieux, individuel par «essence», dans le dos et aux détriments des institutions
Mais dans l’administration de la culture, le phénomène est plus courant, plus voyant. Sept ministres s’y sont relayés, ne l’oublions pas. Pas fortuit. Jamais gratuit. Pour accéder à ces postes, après la révolution, en temps de transition, on donne et on reçoit des coups, forcément. A défaut, on complote en catimini, on «érode», on«ourdit», on s’allie, on rallie, on trahit : on sape à qui mieux mieux.
Le tollé sur les JCC 2016 c’était sans doute cela. Clan contre clan. «Postulants» contre directions. Anciens contre nouveaux. Sfax capitale de la culture arabe en connaît déjà un bout. Les JCC du cinquantenaire(de la «cible» Brahim Ltaief) auront eu beau drainer des jeunes par centaines de milliers, pour des broutilles habilement, insidieusement grossies, elles «fragiliseront» sûrement les prochaines éditions :les «journées cinématographiques» entières, dans leur parcours, dans leurs acquis.
Les autres grands festivals, comme les autres «journées», du théâtre, de la musique en particulier (les plus visées ?)n’échapperont probablement pas à la «règle». Ils savent, au moins, ce qui les attend.
La dictature éjectée, les tunisiens se disputent tout… Les pouvoirs surtout… tous les pouvoirs… Les «Karassi»… A tous les niveaux. Dans l’administration de la culture, en particulier. Pour cela, on complote en catimini, on «érode», on «ourdit», on s’allie, on rallie, on trahit : on sape à qui mieux mieux.