Habib Ammar met les points sur les i
Quand Habib Ammar, le général qui dirigeait la Garde nationale dans les années 80 du siècle dernier, décide de parler et de livrer à l’opinion publique ses mémoires, c’est pour rétablir les vérités sur le changement du 7 novembre 1987 qui a porté Ben Ali à la présidence de la République et pour dire à ceux qui revendiquent aujourd’hui la paternité de l’éviction de Bourguiba du Palais de Carthage qu’ils n’ont rien à voir avec «ce que Ben Ali et moi-même avons décidé pour mettre fin à la confusion qui a régné dans le pays durant les derniers mois de 1987 et pour sauver la Tunisie de la banqueroute», comme il le répète à plusieurs reprises dans son livre paru ces derniers jours sous le titre : «Général Habib Ammar, parcours d’un soldat : entre le devoir et l’espoir. 7 novembre 1987 : éclairages sur les événements». Et ce sont bien ces éclairages qu’on attendait depuis longtemps pour savoir qui sont réellement les concepteurs du changement du 7 novembre 1987 et quelles sont les ambassades qui ont soutenu le mouvement ou en ont été informées. Habib Ammar est tranchant : «L’idée de déposer Bourguiba et de lui réserver les honneurs qu’il mérite du fait de son statut de Combattant suprême et d’édificateur de la Tunisie moderne a germé uniquement et exclusivement dans nos esprits, Ben Ali et moi-même. Personne n’en a été informé jusqu’au dernier jour. Hédi Baccouche lui-même a été mis à l’écart des préparatifs. On lui a demandé tout juste de rédiger la déclaration qui allait être lue par Ben Ali après la réussite de l’opération. Aucun ambassadeur n’a été informé de notre action et tous ont écouté la déclaration du 7 novembre à la radio comme tout le monde». Voilà qui est clair et précis : Ben Ali n’a consulté personne avant de décider de déposer Bourguiba pour raisons de sénilité et il n’a eu recours au soutien ou aux conseils d’aucun ambassadeur étranger. Habib Ammar apporte dans ses mémoires rédigées dans un style cohérent et simple, un cinglant démenti, particulièrement à Hédi Baccouche, le Premier ministre de Ben Ali, qui ne cesse de décla- rer qu’il était l’un des principaux concepteurs du changement du 7 novembre allant jusqu’à avouer que «Ben Ali, moi-même et Habib Ammar avons pensé à un moment ramener un poison d’Italie pour l’administrer à Bourguiba. Nous avons abandonné ce projet parce que j’aimais Bourguiba». Et pourtant, Habib Ammar ne tient pas rigueur à Hédi Baccouche «qui a subi aussi les foudres de Ben Ali comme moi-même à cause d’une simple déclaration à Jeune Afrique». Toutefois, le général, qui respecte toujours Ben Ali pour «ce qu’il a fait pour la Tunisie», ne livre pas à ses lecteurs la déclaration: «Le 7 novembre, c’est moi» publiée par Jeune Afrique sur sa page Une début 1989. Habib Ammar consacre de longs chapitres à ses réalisations au ministère de l’Intérieur où il a passé 9 mois, à l’ambassade de Tunisie à Vienne, poste qu’il a accepté «à contrecoeur pour fuir les médisants qui cherchaient à avoir ma peau à tout prix», au ministère des Télécommunications dans la grande bâtisse coloniale de la rue d’Angleterre, à la tête du comité préparatoire des Jeux méditerranéens 2001 et à la tête du comité d’organisation du Sommet mondial de la société de l’information en 2005 (Smsi). Les lecteurs des mémoires du général Habib Ammar, plus particulièrement les jeunes qui ont aujourd’hui 20 ou 30 ans, découvriront comment Ben Ali gérait les affaires du pays jusqu’à l’irruption du clan des Trabelsi au palais de Carthage et se rendront compte aussi qu’il existait des hommes qui résistaient aux exactions de ce clan et qu’ils ont payé chèrement leur résistance.