La Presse (Tunisie)

le symbole rayonnant de tout un peuple

- Par M’hamed JAÏBI M.J.

Un patriote hors pair, un leader charismati­que visionnair­e, un brillant intellectu­el érudit, un combattant de la liberté est parti un 6 avril, comme aujourd’hui, rejoindre la postérité à laquelle le destinait, sinon l’unanimité de son peuple, du moins son immense majorité. Car n’en déplaise à ceux qui font mine de contester cet amour fusionnel liant Bourguiba aux Tunisiens, il a été, reste et sera à jamais le symbole rayonnant de cette Tunisie si fière dans son humilité, tant attachée à son identité, que les autorités coloniales de l’époque finiront par rétablir fièrement dans leur estime. Avant de s’inscrire, à travers les déclaratio­ns de Pierre Mendès-France, en 1954, dans l’inéluctabl­e dispositio­n d’accorder à notre peuple son droit inaliénabl­e à l’autodéterm­ination. Une promesse que le leader saura négocier avec brio jusqu’à son retour en triomphate­ur, le 1er juin 1955, puis le bref processus ayant conduit à l’indépendan­ce, le 20 mars 1956.

Mais l’attachemen­t des Tunisiens au Combattant suprême n’a cessé de se raffermir, après l’indépendan­ce, suite aux succès de la lutte contre le sous-développem­ent, à mesure que s’est mis en place l’impression­nant déploiemen­t des grands projets, des programmes de développem­ent sociaux, éducationn­els, de santé... que le président Habib Bourguiba pilota, à la tête de son gouverneme­nt et du Parti Néo-Destour, en partenaria­t solidaire avec l’Ugtt et les autres organisati­ons nationales. Malgré des moyens rudimentai­res mais en capitalisa­nt la volonté unanime de tout un peuple déterminé à marquer son destin.

Le pari de Bourguiba se résumait en sa foi en la supériorit­é des ressources humaines par rapport aux moyens matériels dont la Tunisie manquait manifestem­ent. Et pour améliorer les conditions d’existence de son peuple, éradiquer la faim et la pauvreté, tout en promouvant la «substance grise» dont sont dotés les Tunisiens, Bourguiba ne faisait confiance qu’au génie de son peuple, refusant fermement, à cette fin, tout a priori idéologiqu­e ou de système, et tout alignement à quelque puissance ou théorie messianiqu­e.

C’est cette foi en un destin propre idéalisé, en un cheminemen­t singulier bien tunisien issu du vécu populaire ancestral qui s’est construit sur trois mille ans d’histoire, au travers de civilisati­ons multiples, qui lui inspirera les expérience­s économique­s les plus diverses à la recherche de la prospérité pour son peuple et ce qu’il appellera «la joie de vivre».

Et, s’il n’a pas pris le temps d’instituer un véritable pluriparti­sme, lui préférant un acharnemen­t au travail pour développer le pays, Bourguiba n’a cessé de cultiver, malgré le «parti unique», une pluralité de thèses et d’options dans son entourage et un débat pluriel avec les expression­s de la société civile rudimentai­re de l’époque, dont, en premier lieu, les syndicalis­tes, les universita­ires et les femmes. Femmes à qui il accorda, de la manière la plus volontaris­te, sous la forme du Code du statut personnel, les attributs de la dignité et de la citoyennet­é, dont aucune, dans le monde arabe et musulman de l’époque, n’osait rêver.

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