«Ce n’est pas le moment»
Hachemi Ouahchy appelle à la prudence dans la refonte des textes législatifs des associations sportives. «Actuellement, il y a bien d’autres priorités» , insiste-t-il.
« D’abord, il faut une forte volonté politique pour espérer réviser la situation législative des associations sportives dans le pays. L’économique prime. Or, nous ne sommes pas actuellement dans les meilleures dispositions de ce côté-là. Le dernier séminaire organisé à Monastir sur le sujet a démontré la complexité du processus. Il faudra sans doute d’autres réunions de réflexion pour faire avancer le projet. Une réforme dans un contexte économique difficile, ce n’est pas évident. Il faut par ailleurs tenir compte de la spécificité du domaine d’intervention. Les clubs possèdent une base, un crédit de popularité. Ils sont l’émanation des supporters qui s’identifient à une association. Or, celle-ci ne se constitue pas uniquement autour d’un capital financier. Des générations entières ont combattu pour rendre ce que ces clubs sont aujourd’hui. L’Etoile Sportive du Sahel, par exemple, n’est pas tombée de la dernière pluie. Comment tenir compte de ces décennies d’histoire sans marginaliser les supporters et les dirigeants bénévoles sur l’autel de la capitalisation ? Voilà la véritable équation. L’optimisation ne consiste pas à couper les clubs de leurs racines les plus profondes. Toutefois, il faut admettre qu’il n’est plus possible de continuer dans le modèle boiteux et aberrant actuel».
«Au-dessus de leurs moyens»
«Le problème, c’est que les clubs veulent vivre au dessus de leurs moyens. La réforme doit apporter une solution efficace aux besoins financiers croissants ; tôt ou tard, on va y arriver. Tout est lié au contexte économique. Des sociétés à but lucratif, en quoi vont-elles drainer beaucoup plus de fonds dans un contexte économique plombé ? Je ne crois pas que les billets d’accès au stade puissent coûter plus cher, ou que les droits TV vont rapporter des montants faramineux. Quant au merchandising, regardez ce qu’achètent la majorité des supporters: de la contrefaçon, tout court. Dans l’immédiat, il faut trouver une formule intermédiaire qui n’exclut pas les symboles des associations, que ce soit les joueurs, les présidents dont je tiens à saluer le grand sacrifice et les supporters. Le patrimoine d’un club reste beaucoup plus moral et affectif qu’économique. Une association doit-elle appartenir au public ou à un grand capital ? Elle va avoir un bilan négatif au départ de l’application d’une éventuelle législation. Peut-elle se permettre un tel cap difficile ? En fait, il y a un tas de projets de loi qui attendent d’être examinés à l’ARP. La législation sportive n’est pas la plus urgente quand on voit les régions de l’intérieur se soulever, les mouvements de contestation fleurir aux quatre coins du pays, les jeunes réclamer leur droit à l’emploi… L’histoire ne nous pardonnera pas si nous bradions des clubs qui constituent des patrimoines construits au prix de l’effort et de la sueur du front. Non, à mon sens, il faut temporiser un peu. Ce n’est pas le moment».