Les dessous d’un professionnalisme de façade
L’association sportive ne sera pas dissoute par la création de la société à objet sportif, elle sera «absorbée» et son rôle consistera en la gestion des activités non professionnelles.
En Tunisie, le football occupe une place de choix dans la vie sociale et culturelle de nos concitoyens. Le sport-roi est aussi devenu une économie qui draine des sommes d’argent importantes. Il faut donc organiser tout cela et non plus naviguer à vue selon la conjoncture. Revaloriser les structures et planifier deviennent un impératif au bon déroulement du football. Or, le paysage sportif tunisien prouve tout le contraire avec des clubs confrontés à des déficits abyssaux et des crises financières aiguës. Enjeux compétitifs, réticences au changement, billetterie restreinte (quota de supporters et huis clos), sponsoring et mécénat pas toujours en progression, les clubs se limitent aux dons des collectivités locales pour survivre. Ces clubs qui, aujourd’hui, sont devenus de véritables entreprises de spectacles qui n’ont plus rien à voir avec les associations sportives du quartier. Mais paradoxalement, elles ont toutes le même statut juridique ! Car étant donné le fait qu’ils sont considérés comme des associations à but non lucratif, les clubs sportifs se trouvent souvent confrontés à des problèmes naissant de ce cadre juridique particulier.
Émanation de l’association sportive préexistante
Depuis le milieu des années 90, date à laquelle le professionnalisme a été appliqué, les autorités publiques espéraient voir nos clubs sportifs atteindre les objectifs assignés. Or, ils ont été confrontés à des clubs souffrant de déficits budgétaires, incapables d’assurer une bonne gestion administrative et financière. Afin de faire face à cette situation particulière, la question du statut juridique des clubs sportifs doit être au centre du débat. Si les clubs se financent principalement par le biais des subventions, des dons, et depuis quelques années, par la vente des joueurs, la diversité des ressources aurait dû combler les besoins et garantir une gestion efficace de l’association avec une trésorerie équilibrée. Ce qui est loin d’être le cas puisque la plupart des associations sportives en Tunisie souffrent d’un déficit, parfois chronique, de leur trésorerie. Amender la loi sur les associations n’est pas un gage de révolution sportive. Avant toute révision institutionnelle, il faut un préalable pour ne pas être confronté à des réticences au changement. Si prochainement, un changement du statut juridique de l’association par la transformation en une société (attribution de la personnalité morale) s’opère, un ajustement sera forcément de mise, et ce, outre les spécificités propres à la société (détention d’une part importante du capital social et des droits de vote à l’assemblée générale de la société à objet sportif concernée). Ce faisant, la transformation de l’association sportive en société devrait commencer par sensibiliser tous les intervenants dans la vie associative et sportive afin qu’ils appréhendent de façon claire le processus et surtout la raison de ce changement juridique de taille. Cependant, il est notable et établi que la transformation des associations en sociétés à objet sportif n’est pas une simple procédure qui pourrait être prise à la légère. Elle constituerait un tournant important dans la vie sportive en Tunisie grâce aux nouveautés apportées sur la structure juridique des clubs sportifs. En effet, le rôle social des clubs justifie la recherche de solutions nouvelles lorsque le club se dote d’un statut juridique de société commerciale. Pour réussir cette transformation, il faut inéluc- tablement commencer par une refonte du cadre juridique actuel régissant les associations sportives et promulguer de nouveaux textes. En parallèle, il faudra procéder à une vaste restructuration des fédérations sportives concernées, par l’instauration antérieure du professionnalisme, et impliquer davantage les dirigeants des clubs afin qu’ils contribuent à sa réussite. En conclusion, il est important de préciser que la future société à objet sportif qui sera créée sera une émanation de l’association sportive préexistante dite association support. Sa création ne remettra pas en cause l’existence de l’association antérieure. Bien au contraire, celle-ci survit, participe au capital de la nouvelle société et assumera la charge du secteur amateur du club sportif; le secteur professionnel étant réservé à la société nouvellement créée. En clair, l’association ne sera pas dissoute par la création de la société, elle sera «absorbée» et son rôle consistera en la gestion des activités non professionnelles. Finalement, suite à la transformation du régime associatif au régime sociétaire, le club bénéficiera désormais d’un nouveau statut, et se verra ouvrir des horizons beaucoup plus prometteurs qui favoriseront la réalisation des objectifs dressés auparavant par les dirigeants. Cette transformation permettra au club une meilleure rigueur dans la gestion administrative et financière des affaires courantes. Elle lui permettra également d’emprunter une dimension supérieure afin de rivaliser sur le plan international caractérisé par des structures solides et durables. Étant le catalyseur et le noyau essentiel de l’équipe nationale, la réussite du club devra rejaillir sur le rendement de l’équipe nationale. Tout bénéfice pour le rayonnement de notre sport-roi.