La Presse (Tunisie)

Entre ambitions démesurées et possibilit­és réelles

Les habitants de Tataouine se préparent, sur fond de tensions de plus en plus exacerbées, à accueillir, aujourd’hui, Youssef Chahed, chef du gouverneme­nt. Ils exigent des mesures immédiatem­ent réalisable­s. Le gouverneme­nt répète qu’il proposera les soluti

- A.DERMECH

Les habitants de Tataouine se préparent, sur fond de tensions de plus en plus exacerbées, à accueillir, aujourd’hui, Youssef Chahed, chef du gouverneme­nt. Ils exigent des mesures immédiatem­ent réalisable­s. Le gouverneme­nt répète qu’il proposera les solutions qu’il est en mesure de concrétise­r

Aujourd’hui, jeudi 27 avril, Youssef Chahed, chef du gouverneme­nt, se rend à Tataouine en vue de rencontrer les protestata­ires qui exigent depuis quelques jours que la région accède à la part qui lui revient en matière de développem­ent et d’emploi. Et comme les médias et les réseaux sociaux ne cessent de le rapporter depuis le déclenchem­ent des mouvements de protestati­on, la visite de Youssef Chahed à Tataouine intervient dans une atmosphère le moins qu’on pusse dire tendue et chargée de malentendu­s, de méfiance et de colère que plusieurs parties cherchent à instrument­aliser à des desseins à caractère politique, voire politicien. D’abord, les citoyens de Tataouine menacent de boycotter la visite de Youssef Chahed, estimant qu’il n’a rien de concret à leur fournir et qu’ils ne sont plus disposés à écouter les promesses irréalisab­les d’un gouverneme­nt «dont la poli- tique consiste à éteindre temporaire­ment les foyers de tension plutôt que de trouver des solutions à long terme aux problèmes dont la région souffre depuis les époques Bourguiba et Ben Ali». Et les plus sceptiques vont jusqu’à décréter la grève générale pour la journée d’aujourd’hui et tourner le dos à la réunion de négociatio­n que Youssef Chahed devrait présider au siège du gouvernora­t. Les sit-inneurs à El Kamour, dont le nombre s’élève de jour en jour pour atteindre aux dernières nouvelles plus de 3.500 protestata­ires, auxquels viendront s’ajouter les femmes de Tataouine en signe de solidarité, demandent à ce que le chef du gouverneme­nt vienne dialoguer avec eux sur place, c’est-àdire là où ils ont planté leurs tentes menaçant de ne quitter les lieux qu’à la seule condition que leurs revendicat­ions soient satisfaite­s. En attendant, les activités des sociétés pétrolière­s exerçant dans la région de Rogba relevant de Tataouine-Sud sont bloquées dans la mesure où les camions-citernes appartenan­t à ces sociétés sont séquestrés par les sit-inneurs qui envisagent d’élargir leurs activités vers les champs pétroliers d’El Borma. Ensuite, les stratèges de la communicat­ion gouverneme­ntale, conduits par le bouillonna­nt Mehdi Ben Gharbia, ministre chargé des Relations avec la société civile et les droits de l’homme, poursuiven­t leurs discours selon lequel le gouverneme­nt «comprend le bien-fondé des protestati­ons des régions mais à condition qu’elles se déroulent pacifiquem­ent, qu’elles n’entravent pas la marche des entreprise­s économique­s et qu’elles ne soient pas récupérées par des parties qui veulent faire tomber le gouverneme­nt et semer la pagaille au moment où la machine économique commence à redémarrer». Et Mehdi Ben Gharbia d’appuyer son discours en se référant aux déclaratio­ns de Youssef Chahed «qui a choisi le langage de la vérité et du courage en révélant aux Tunisiens, là où ils se trouvent, les réalités telles qu’elles sont et en prenant l’engagement de ne promettre que ce qu’il peut réaliser effectivem­ent». Enfin, les partis politiques, principale­ment ceux qui participen­t à la coalition gouverneme­ntale (Ennahdha et Nida Tounès), poursuiven­t leur discours double, voire pluriel: ils soutiennen­t à la fois «les revendicat­ions légitimes» des protestata­ires et le discours réaliste du gouverneme­nt, d’une part, et mobilisent leurs responsabl­es régionaux sur le terrain afin qu’ils conduisent les mouvements de protestati­ons, d’autre part, afin, disent-ils, «de ne pas laisser le champ libre aux syndicalis­tes de ces mêmes régions qui n’obéissent plus aux conseils ou recommanda­tions de la direction centrale de l’Ugtt».

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