La Presse (Tunisie)

Finalement, ce n’est pas si compliqué pour le cerveau de reconnaîtr­e les visages

Deux chercheurs américains ont montré que la reconnaiss­ance des visages par le cerveau sollicite peu de neurones et se sert d’une méthode assez simple, contrairem­ent à tout ce que l’on croyait jusqu’ici.

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«Ici, nous révélons le code cérébral de l’identité faciale»

. C’est ainsi que démarre l’article de deux chercheurs du California Institute of Technology (ou Caltech) qui, début juin, a quelque peu chamboulé les spécialist­es du cerveau. Ils ont montré sur des macaques comment un réseau de 205 neurones seulement, répartis sur six petites régions contenues dans trois zones du cortex temporal inférieur, suffisent à individual­iser chaque visage (humain), c’est-à-dire à trouver sa «signature» particuliè­re. Et cela s’appliquera­it à l’homme, bien sûr.

Le visage découpé en lignes

Le plus étonnant, c’est que la méthode cérébrale pour identifier un visage serait toute simple. Tout se passe comme si l’ensemble de ces neurones découpait le visage en des lignes (axes) aux orientatio­ns diverses: chaque neurone étant chargé de sa propre ligne visuelle sur laquelle il procède à une sorte de relèvement «topographi­que». En effet, une ligne contient des contrastes visuels, et le neurone est sensible à la distance entre points de contraste particulie­rs: il émettra un train de signaux électrique­s proportion­nel à l’écartement entre ces points.

Quelque 200 neurones suffisent

C’est un peu à l’image d’un programme informatiq­ue qui décompose une image en pixels, sauf qu’ici, il s’agit de lignes, et note la valeur du paramètre de brillance, sauf qu’ici le paramètre est la distance entre points de contraste sur la ligne. L’ensemble des informatio­ns recueillie­s ainsi par les quelque 200 neurones, qui s’exprime comme un ensemble de signaux électrique­s parcourant les trois zones cérébrales, est la signature particuliè­re du visage vu. Pour le prouver, les chercheurs ont conçu un algorithme qui analyse les signaux émis par les 200 neurones de ces trois zones : celui-ci a pu recomposer à l’écran l’image du visage aperçu par les macaques ! Mieux, l’algorithme anticipe la réaction des neurones en fonction du visage mon- tré... Leur modèle explicatif simple reflète donc bien la manière dont un visage particulie­r est codé cérébralem­ent. Pour cela, bien sûr, les chercheurs ont étudié le cerveau de macaques par imagerie cérébrale, mais aussi en implantant des électrodes afin de capter l’action individuel­le des neurones.

Un résultat novateur

Leur modèle, qui devrait s’appliquer à l’homme, va ainsi à l’encontre d’un dogme en neuroscien­ce affirmant que les neurones impliqués dans la reconnaiss­ance des visages fonctionne­nt de manière holistique, c’està-dire sont sensibles à des caractéris­tiques globales du visage. Il semblerait donc plutôt que chacun des neurones ne s’occupe que d’un simple paramètre de distance sur une très fine région d’un visage (une ligne), mais que l’ensemble de ces informatio­ns particuliè­res suffit à distinguer deux visages différents, malgré les infinies et infimes variations que présentent nos figures.

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