La Presse (Tunisie)

«Le repos est le meilleur remède»

- Propos recueillis par T.G. M.M.

L’ancien latéral droit internatio­nal de l’Etoile Sportive du Sahel, reconverti dans la médecine sportive, prévient contre les risques que fait peser le marathon estival sur les organismes, avec un nombre accru de blessures graves.

«Jouer en été rend l’effort double et les blessures plus sérieuses et fréquentes (tendinites, bobos musculaire­s…), la chaleur occasionne le risque de déshydrata­tion alors que le joueur a besoin de deux ou trois semaines de repos actif, c’est-à-dire de se reposer tout en s’adonnant sans trop forcer au tennis, à la natation… selon des doses pas trop exigeantes. Un sportif ne peut pas bénéficier de plus de deux ou trois semaines de repos qui ne doit pas être total. Je crois que la formule adoptée la saison dernière (en deux phases) a soulagé les joueurs, rendant moindre le risque de blessures. Le play-off et le play-out ont réduit le nombre de rencontres, et cela doit être tout bénéfice pour l’ossature de l’équipe nationale. Rendez-vous compte : l’Etoile Sportive du Sahel est partie au Mozambique jouer un important match de coupe d’Afrique avec seulement quinze joueurs. Il faut admettre que les clubs nord-africains engagés dans les compétitio­ns continenta­les sont défavorisé­s. Ils sont astreints à soutenir en plein été le marathon de la phase des poules. A cette époque-là, leurs rivaux de l’Afrique subsaharie­nne se trouvent au contraire en pleine saison. La solution pour nous, sportifs du nord du continent, réside dans un effectif plus dense, avec un nombre de joueurs plus important. L’autre solution, celle du reste la plus évidente, c’est le repos tout court qui constitue le meilleur traitement contre les blessures, les tendinites qui risquent de devenir chroniques».

«Nous avions une longue carrière»

«Mais il n’y a pas que le seul aspect physique, le joueur risque de ressentir aussi une forte lassitude et une baisse de motivation durant l’été lorsqu’il ne trouve même pas le temps nécessaire pour convoler en justes noces, par exemple, surtout lorsqu’il est sollicité aussi bien dans son club qu’en équipe nationale. Ces joueurs-là, il faut les remotiver et leur accorder les jours indispensa­bles de repos. De mon temps, le calendrier n’était pas aussi surchargé. Il n’y avait pas autant de rencontres qu’aujourd’hui. On prenait le temps de se reposer fin juin après la finale de la Coupe de Tunisie quand le sirocco commence à souffler fort. Un mois ou même un mois et demi de répit, cela recharge les batteries. Cela nous a permis de durer dans le temps, d’avoir une carrière de douze ou quatorze ans, sans grosses blessures. Cette durée me paraît aujourd’hui impossible. On pouvait aussi effectuer un copieux travail de musculatio­n et de récupérati­on. Le physique a ses limites. Maintenant, on n’arrive même pas à accomplir convenable­ment la préparatio­n d’avant-saison. Les temps ont drôlement changé. Les fédération­s maghrébine­s doivent négocier avec la confédérat­ion africaine afin de ménager les joueurs l’été venu et d’aménager autrement les calendrier­s. Les clubs ont intérêt à installer d’importants effectifs pour procéder au turnover. Enfin, les joueurs doivent se soucier de leur hygiène de vie et de la diététique». «C’est aberrant pour les équipes qui ne trouvent pas le temps de bénéficier de la trêve. Elles enchaînent la préparatio­n de la saison d’après, notamment celles qui ont des joueurs en équipe nationale comme l’Espérance ou l’Etoile. Ca sera une année difficile surtout pour permettre aux joueurs de récupérer. Lorsque j’étais entraîneur adjoint avec Ruud Krol à l’Espérance en 2014, les problèmes ont commencé avec la phase de poule de la CAF, juste après la fin du championna­t au mois de mai : défaite au premier match contre Sétif, défaite également au deuxième match contre Ahly Benghazi. Résultat : j’ai été remercié avec Krol car en fin de compte, c’est toujours le staff technique qui paie toujours la facture. Il faut rappeler que cette année-là, l’EST a gagné le championna­t avant deux journées de la fin, donc il y a eu un relâchemen­t au sein de l’équipe. Normalemen­t, lorsque une équipe gagne un titre, elle doit bien récupérer pendent deux, trois semaines puis enchaîner avec une nouvelle préparatio­n, et une phase d’oxygénatio­n. Les joueurs qui manquent de compétitio­n ont un programme spécial, et les joueurs qui ont beaucoup joué doivent se reposer. Actuelleme­nt, l’EST est l’équipe la plus touchée par ce rythme, puisque lorsqu’elle terminera la phase de poule de la ligue des champions, elle abordera directemen­t la Coupe arabe au Caire. La fédération n’est pas responsabl­e de ce calendrier puisque le championna­t a été clôturé le 21 mai, ce qui est un bon timing, idem pour la finale de Coupe de Tunisie qui a eu lieu peu après. Donc c’est le calendrier de la CAF qui pose problème. Lorsque j’étais à l’EST, j’ai travaillé pendant quatre saisons de suite sans avoir pris de repos! Nous savons tous que la plupart des joueurs n’ont pas une bonne hygiène de vie et qu’il y a des écarts. On devrait plutôt prendre l’exemple des championna­ts européens dont la phase de repos est sacrée pour les joueurs, puisqu’ils ont un programme de préparatio­n et de remise en forme spécifique. Au cours de cette phase, ils peuvent même faire du vélo et jouer au tennis».

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