Zéro bonus et 0.6 % de réussite !
Grâce à la bonification de 25 puis de 20 %, le taux de réussite au bac est resté au-dessus de la barre des 20 % pour les candidats du secteur privé. La suppression de cette faveur a brouillé les cartes.
La donne a, subitement, changé dès 2015. La chute est, en effet, significative. Au cours de la session de 2015, le taux de réussite au baccalauréat n’a pas dépassé 5.9 %. Une légère reprise est signalée en 2016 avec 9.6 %. Toutefois, il paraît que cette chute est irréversible notamment avec la suppression définitive des 20 % restants.
Taux de réussite en chute libre
On s’interroge, alors, sur les raisons qui se cachent derrière ces résultats. Il y a, forcément, de nombreux facteurs objectifs qui sont à l’origine de ce phénomène. Généralement, l’enseignement secondaire privé est choisi par une catégorie d’élèves cherchant une deuxième chance. Ce sont beaucoup plus les parents qui y tiennent. Ils sont prêts à payer, pourvu que leurs enfants parviennent un jour à décrocher le diplôme. C’est pourquoi l’instauration des 25 % avait dopé cet enseignement. Du coup, on a assisté à la création de plusieurs nouveaux établissements. Ainsi, leur nombre est-il passé de 291 en 2010 à 346 en 2016. Automatiquement, le nombre des admis au bac était devenu consistant. Pour preuve ces chiffres. En 2010, on avait enregistré un taux de réussite de 28.4 % et les admis étaient au nombre de 5.974. Et c’est l’année 2011 qui connaîtra l’un des taux les plus élevés avec 6.319 nouveaux bacheliers et un taux de réussite de 30.9 %. Une forte baisse est, toutefois, enregistrée en 2012 avec 4.255 admis pour un taux de réussite de 19.4 %. Les années 2013 et 2014 renouent avec les taux supérieurs à 20 %. Soit, respectivement, 23.8 et 22 %. À partir de 2015, c’est la descente en dessous de 10 %. De 5.940 admis en 2014, on n’est plus qu’à 1.267 en 2015 et 1.638 en 2016. Ces résultats, faut-il le préciser, n’ont, certes, rien à voir avec ceux des candidats libres. Là, c’est, quasiment, la catastrophe. Le taux de réussite se situe entre 2 et 1 %. En 2010, il avait atteint 2.7 % et 53 candidats admis, tandis qu’en 2016 il s’est situé à 0.9 % contre 0.6 % au cours de la session principale de 2017. Il est à noter, aussi, que l’affluence vers les établissements privés ne sera plus la même. Les prochaines années ne devraient pas être favorables selon l’avis d’un professeur ayant une longue expérience dans le domaine. Si rien n’est fait pour améliorer les conditions dans ces institutions, la situation ne pourra que se dégrader. Un nouveau cahier des charges est nécessaire. C’est à travers lui que tous les problèmes pourraient être résolus.
Démotivations
Le niveau assez bas a des origines qui ont, déjà, été identifiées. Les «bonnes» performances enregistrées grâce aux bonus des 25 et des 20 %, durant plus d’une décen- nie, ont servi les intérêts des propriétaires de ces établissements sans, véritablement, être d’un apport scientifique pour l’élève. L’une des principales causes du bas niveau d’enseignement dans ces écoles privées demeure le cadre pédagogique. Le mode de recrutement précaire en vigueur n’est pas pour garantir un bon rendement. Justement, sur ce point, les avis divergent selon qu’on se place du côté des propriétaires ou des parents. Les premiers ne s’estiment pas gâtés. Il n’y aurait pas, à titre d’exemple, des incitations fiscales à la mesure des enjeux. Les moyens financiers dont les établissements disposent suffisent, à peine, à gérer le quotidien. Aux yeux d’un responsable d’une école privée située à Tunis, les recettes vont directement à la rétribution des professeurs qui sont payés au nombre d’heures effectuées. Il avoue qu’il est difficile de recruter à plein temps. Deux motifs existent. D’abord la situation économique de l’institution qui n’est pas aussi viable qu’on le pense. Elle ne permet pas, par conséquent, de s’offrir des professeurs à plein temps. Ensuite, les intéressés, eux-mêmes, ne se permettraient pas de s’engager dans une carrière dont l’avenir n’est pas assuré. Actuellement, il s’agit, pour eux, d’un salaire d’appoint sans plus. Sans obligation de résultats. D’ailleurs, l’encadrement pédagogique de ces enseignants est très insuffisant pour ne pas dire inexistant. Ajoutons-y la démotivation totale de la majorité des élèves et nous obtiendrons ce tableau de bord peu honorable que nous connaissons. Ces élèves assistent aux cours pour ne pas contrarier leurs parents. Seule une petite minorité cherche à réussir. Le déroulement des cours est très difficile car la discipline n’est pas toujours garantie dans la classe. L’affluence des candidats au bac issus des écoles privées constitue une sorte de thermomètre de la situation qui y prévaut. Depuis 2010, leur nombre n’est pas descendu au-dessous de 20.000. L’attrait du bonus des 25 % y était pour beaucoup. Un dernier sursaut a été noté au cours de cette dernière session avec plus de 19.000 candidats. En 2014, l’augmentation du nombre de participants a atteint 30.403 élèves. Le débat sur la suppression du bonus battait, alors, son plein. Le taux qui fut enregistré était de 22 % d’admis. L’année d’après, ce sera la dégringolade avec un taux de réussite de 5.9 %. Peut-être que si les données changent dans le bon sens, il y aura un espoir. Pour l’heure, rien n’est possible. De plus, le statut actuel de ces établissements ne leur donne pas la possibilité de contracter des prêts auprès des banques susceptibles de les aider à introduire certaines améliorations nécessaires.